Des morts et des blessés par des obus à Goma en RDC

En République démocratique du Congo, alors que la prise par les rebelles du M23 de la ville minière de Rubaya, dans le Masisi, se confirme, les combats continuent dans les faubourgs de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Ce vendredi matin encore des obus sont tombés sur des sites de déplacés, faisant plusieurs morts et des dizaines de blessés et entraînant ainsi la colère des déplacés.

Attaque de l'armée et répliques des rebelles

Tout a commencé aux alentours de 9h. L'armée congolaise, en bordure de Goma, a fait feu vers les collines entourant la ville de Saké, où se trouvent les rebelles du M23, "ce qui a permis la destruction de dépôts d'armements et de munitions de l'ennemi", a communiqué le gouvernorat du Nord-Kivu. La réplique ne s'est pas fait attendre, entre quatre et cinq obus sont tombés sur plusieurs sites de déplacés et dans leurs alentours, confirme une source sécuritaire. Ce qu'atteste par ailleurs Fidèle Bahati, présent sur les lieux. "Ici, les bombardements des M23 nous ont atteint", raconte-t-il à la DW. "Nous sommes fâchés. Nos voisins et nos frères sont morts ici. On a eu plusieurs bombardements, cinq environ."

"On partageait la bière, mais maintenant, il est mort", raconte un autre homme qui vient de perdre son frère. "C'était un volontaire. Alors les bombes là, pourquoi ne pas les diriger vers l'ennemi, au lieu de les envoyer dans les camps de déplacés." Des déplacés qui ont laissés éclaté leur colère.

Appels à l'armée 

De nombreux barrages ont été dressés sur la route entre Goma et Saké et des jeunes, prêts à en découdre, se sont emparés de bâtons, notamment pour empêcher l'armée de répliquer à nouveau. Car non loin du camp de déplacés sont positionnées les pièces d'artillerie de l'armée, qui font feu sur les rebelles du M23.

"La recommandation est que nos forces arrêtent de lancer des bombes au niveau des collines où se trouvent le M23", insiste Héritier Kakule, résident du site de déplacés de Mugunga. "Vous l'avez vu, il y a des gens qui ont trouvé la mort. Des enfants… il y a beaucoup de pertes en vie humaine." Pour l’heure, aucun bilan exact n’a été donné. Les témoins parlant de plus de dix morts, dont des enfants, y compris quatre ayant succombé à leurs blessures sur la route pour l’hôpital du CICR, qui a pris en charge 27 blessés. 

 

Le 6 mai, les Tchadiens vont élire leur prochain président

Entamée officiellement le 14 avril, la campagne électorale pour l’élection présidentielle du 6 mai au Tchad prendra fin 24 heures avant le scrutin. 

Bien que l'on compte une dizaine de candidats, pour Ladiba Gondeu, sociologue et anthropologue à l'université de N'Djamena, seuls trois candidats ont pu se démarquer.

"Nous avons le candidat du parti Les Transformateurs, Succès Masra, qui a été en contact direct avec le peuple", expliquait-il sur la DW Afrique ce vendredi. "Dans la même veine, nous avons également le candidat du parti RDNT-Le Réveil, Albert Pahimi Padacké, qui lui également a su être en contact avec son électorat. En revanche, le président candidat a eu une difficulté de communication dans sa campagne, avec une équipe de direction de campagne qui n'était pas vraiment faite pour la circonstance. Il a ramené des personnes ayant servi son papa et souvent « vomies » par les citoyens, à qui les Tchadiens ont attribué l'échec de Déby père," précise l’enseignant.

 Des résultats connus d’avance ?

De son côté, la société civile se dit préoccupée par un processus électoral dont l’issue semble claire. Max Loalngar, porte-parole de la plateforme de l'opposition tchadienne Wakit Tama, n'hésite pas à parler d'une mascarade dont il ne faut rien espérer.

"Nous sommes soucieux de la montée de la violence verbale qui a marqué cette campagne. Nous sommes également soucieux du risque de dérapage et du mépris des droits de l'Homme et de la dignité humaine. En dehors de ça, nous le martelons et le répétons : il s'agit d'un processus qui n'est pas du tout sincère, marqué par des institutions totalement inféodées au régime. Tout est fait pour que la monarchisation du Tchad se poursuive", estime M. Loalngar.

Appel au boycott

Max Kemkoye, président de l'UDP, l’Union des démocrates pour le développement et le progrès, explique que si l'UDP appelle au boycott de ce scrutin, c'est parce qu’elle redoute un bain de sang. "C'est une élection à haut risque avec une possible crise post-électorale, peut-être la plus dramatique de l'histoire politique du Tchad. Nous avons tiré la sonnette d'alarme. Comme toujours, nous avons été incompris ou ignorés, mais d'ici quelques jours, soit en fin d'après-midi du 6 mai, ou le jour suivant, le Tchad va assister une fois de plus à un bain de sang. L'ensemble du peuple tchadien est engagé dans le couloir de la mort, voilà les risques très forts que nous craignons à l'issue de ces élections", justifie le président de l’UDP.

Le 28 avril dernier, l'agence électorale tchadienne a interdit la possibilité de photographier les procès-verbaux des scrutins, suscitant des soupçons de fraude. Le code électoral tchadien ne prévoit pas l'affichage des procès-verbaux de dépouillement dans les bureaux de vote, ni leur remise aux mandataires des candidats.

En RDC, l’opposition hostile à la double nationalité

Le débat a été relancé cette semaine, lors de la visite du président Félix Tshisekedi en France. Alors que le président Félix Tshisekedi a appelé à la patience dans la gestion de cette question qui est sensible en RDC, l'opposition souligne pour sa part son hostilité à la double nationalité.

"Congolais d'origine, vous l'êtes partout où vous êtes et vous le demeurez. Si vous voulez maintenant obtenir une autre nationalité, c'est encore libre à vous. Mais avec cette conséquence que vous n'êtes Français, Canadien, Américain qu'en France, au Canada ou en Amérique", a estimé Ferdinand Kambere, le secrétaire permanent adjoint du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie, le PPRD de l'ancien président, Joseph Kabila.

Une nationalité exclusive

De son côté, Rostin Manketa, directeur exécutif de la Voix des sans voix, estime que la question de la nationalité doit plutôt être abordée avec sagesse et intelligence. 

Le Felix Tshisekedi à Kinshasa
S’il n’existe pas de données précises, on estime le nombre de Congolais de la diaspora entre cinq et sept millions, en y incluant ceux qui ont acquis la nationalité de leur pays d’accueil. null Arsene Mpiana/AFP/Getty Images

"Autant nous avons peur que le pays soit infiltré en acceptant la détention concurrente de la nationalité congolaise avec une autre, autant il faut également savoir que la République perd énormément en refusant la détention par une personne de la nationalité congolaise, concurremment avec une autre", a-t-il déclaré.

Un débat très complexe, selon Carlos Mupili, professeur de droit, qui explique que la légalisation de la double nationalité devra passer par une révision de la Constitution.

"S'il faut qu'on puisse toucher à la question d'unicité et d'exclusivité de la nationalité congolaise, il faut d'abord réviser l'article 10 de la Constitution. Or, pour le moment, ce n'est pas encore à l’ordre du jour. Aujourd'hui, si on ouvre la question de la double nationalité, ceux qui en seront bénéficiaires, ce sont les étrangers", a expliqué Carlos Mupili.

L'article 10 de la Constitution stipule que la nationalité congolaise est "une et exclusive". Elle ne peut être détenue simultanément avec aucune autre.

 

 

Tchad : Saleh Kebzabo s'exprime au sujet du processus électoral

Les Tchadiens sont appelés aux urnes le 6 mai prochain. A quatre jours de ce scrutin présidentiel, notre rédaction a pu joindre Saleh Kebzabo, ancien Premier ministre et actuel médiateur de la République.

Il nous explique pourquoi il ne s'est pas présenté à une élection présidentielle qui met aux prises, entre autres candidats, le président de la transition Mahamat Idriss Déby et son Premier ministre, Succès Masra. Cliquez sur l'image qui suit pour écouter.

"J'espère qu'il n'y aura pas de débordements" (Saleh Kebzabo)


Le premier tour de l’élection présidentielle mettra fin à 3 années de transition dans le pays. C’est le fichier électoral qui a servi pour le référendum de décembre dernier qui sera utilisé dans le cadre de cette élection présidentielle. 

Sur la base de ce fichier électoral, plus de 8 millions d’électeurs sont inscrits sur la liste électorale, sur 17,72 millions d’habitants que compte le pays. 

Président de la transition tchadienne et grand favori de l'élection présidentielle le 6 mai, Mahamat Idriss Déby Itno a succédé à son père Idriss Déby Itno à la tête du Tchad qu'il a dirigé d'une main de fer entre 1996 et 2021.

Proclamé président de transition par l'armée à la mort de son père en 2021, Mahamat Idriss Déby Itno est quasiment assuré de rester au pouvoir après l'assaut meurtrier de l'armée contre l'un de ses principaux rivaux, Yaya Dillo, et l'invalidation d'autres candidatures par le Conseil constitutionnel dont il a nommé les membres.  

Polémique au sujet de la transparence de la présidentielle au Tchad

Depuis le 14 Avril, les dix candidats en lice sont en campagne partout dans le pays. Mais une partie de l'opinion accuse l'agence nationale de gestion des élections (Ange) de mettre en place des manœuvres de manipulation de résultats. A l'origine, l'interdiction faite aux délégués des bureaux de vote et aux électeurs, de photographier les procès-verbaux à la fin des opérations de vote.

L'agence nationale de gestion des élections (Ange) justifie l'interdiction de photographier les procès-verbaux des bureaux de vote par les électeurs ou délégués des bureaux, par le souci d'éviter toute publication de ces documents sur les réseaux sociaux.

L'agence électorale interdit la photographie des PV du scrutin

L'agence électorale dit craindre que son travail soit mis à mal et qu'une publication non contrôlée des procès-verbaux provoque des conflits.

Ahmed Batchiret président de l'organe chargé de la gestion des élections met en garde ceux qui s'hasarderaient à publier les resultats dans les reseaux sociaux. 

"La place de l’armée française, c’est en France"

"Aujourd'hui, on sait comment on peut manipuler les chiffres à travers les réseaux sociaux donc il faut faire très attention. J'attire l'attention des uns et des autres d'éviter de donner des résultats fantaisistes à travers les réseaux sociaux pour revendiquer une victoire, etc...'', previent Batchiret. 

''Cela serait extrêmement grave et ces gens qui veulent vont engager leur responsabilité. S'ils se hasardent à le faire, ils auront à faire à la loi", a-t-il menacé. 

Mais ces explications sont loin de convaincre la société civile tchadienne. Pour celle-ci, la décision de l'organe de gestion des élections est en totale contradiction avec l‘article 9 de la Constitution qui dit et je cite : "les candidats, les partis politiques en compétition ont le droit d'accéder au fichier des résultats par bureau de vote tenu par l'Ange", fin de citation.

Un recul démocratique ?

Ce n’est pas l’Ange qui a élaboré le code électoral, mais l’Ange est chargée de sa stricte application, affirme l'agence electorale
Ce n’est pas l’Ange qui a élaboré le code électoral, mais l’Ange est chargée de sa stricte application, affirme l'agence electoralenull Alexis Passoua

Ildjima Lokiam Agnès, qui dirige un réseau d'organisations de la société civile pour l'observation électorale, rejette les arguments du président de l'Ange, Ahmet Batchiret.

"Nous parlons d'une élection libre et transparente, alors la transparence c'est justement là où les gens peuvent filmer les procès-verbaux. Surtout les délégués des bureaux de vote doivent filmer les procès-verbaux si nous sommes vraiment dans la transparence comme on le dit. Mais là, on le leur interdit et nous trouvons que c'est une atteinte au droit des candidats. Il y a un peu de recul dans notre démocratie.", regrette Lokiam

Il peut arriver, que certains candidats jugent les résultats publiés par l'organe électoral non-conformes à ceux prélevés dans les bureaux de vote. Dans ce cas, les procès-verbaux qui contiennent les données sensibles tel que le nombre de suffrages obtenus par les candidats, servirait de preuve. Or si le code électoral interdit de les photographier, il serait difficile d'apporter des preuves, et c'est tout l'enjeu de la polémique.

''Une fois affichés, les résultats tombent dans le domaine du public''

Dernière ligne de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle du 6 mai
Dernière ligne de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle du 6 mainull Alexis Passoua

Christian Baidessou, expert tchadien des questions électorales condamne lui aussi la décision de l'agence électorale. 

"Une fois affichés, les résultats tombent dans le domaine public et peuvent être repris aussi bien par les électeurs que par les délégués et candidats auxquels l'Ange n'a pas prévu de remettre des copies des procès-verbaux alors même qu'ils en sont signataires.'', dit Baidessou. 

Et d'ajouter : ''Les candidats qui en ont les moyens peuvent mettre en place un dispositif de collectif des résultats affichés devant les 26 611 bureaux de vote pour se faire une idée des voix qu'ils ont obtenues. C'est là toute la maladresse de la communication et de la décision de l'Agence nationale de de gestion des élections".

Pour certains analystes, c'est un début de fraude électorale. Car, à travers cette décision, l'agence nationale chargée de la gestion des élections veut priver les candidats de toutes possibilités de disposer de preuves pour étayer leurs contestations devant le Conseil constitutionnel. 

Quelles suites au dialogue national au Gabon ?

Ce dialogue national inclusif gabonais avait deux principales missions : fixer la durée de la transition d'une part, et d'autre part, proposer l'organisation politique, économique et sociale de la nation après le départ des militaires.

Alors que la question de la durée de la transition était au centre des discussions ces derniers mois, les participants viennent donc de confirmer le délai de deux ans fixé, l'an dernier, par les militaires au pouvoir, mais cette fois avec un bonus d'un an en cas de force majeure.

Eric Simon Zué, secrétaire général du mouvement Mon Gabon et membre de la société civile, se dit satisfait des conclusions du dialogue.

‘'Ce qui a été annoncé augure vraiment d'un Gabon nouveau, d'un Gabon meilleur, où tout a été remis à plat pour que les choses renaissent. Et je dois dire que la réussite de ce dialogue ne tient pas seulement au contenu, cela tient aussi au chronogramme, donc à cette volonté de bien faire et de respecter la parole donnée'',  dit Simon Zué.

Le dialogue national a rassemblé, pendant près d'un mois, plus de 600 personnes issues de toutes les couches de la société, en vue de proposer des réformes.

Une révolution dans l’équilibre des pouvoirs

Il faudra aussi être Gabonais d'origine pour être au gouvernement, marié à un Gabonais ou une Gabonaise d'origine pour certains ministères sensibles
Il faudra aussi être Gabonais d'origine pour être au gouvernement, marié à un Gabonais ou une Gabonaise d'origine pour certains ministères sensiblesnull Massassa Bunny Claude/picture alliance/AP Photo

Outre la durée de la transition, les panelistes préconisent un régime présidentiel, avec un mandat de sept ans renouvelable une fois pour le président qui, une fois élu, sera à la fois chef de l'Etat et du gouvernement.

Mais aussi un parlement bicaméral dont les pouvoirs ont été renforcés et qui pourra destituer le président de la République dans un certain nombre de cas.

Mais, une autre résolution essentielle de ce dialogue est la suspension de tous les partis politiques pour permettre, officiellement, une normalisation de la vie politique.

''Des dispositions inmodifiables"

Pour le docteur Jonathan Lutu, universitaire gabonais, la nouvelle Assemblée constituante sera le garde-fou de toutes les réformes.

‘'Il y a des garde-fous car il ya certaines dispositions qui deviennent inmodifiables, c'est à dire que personne, aucun chef d'Etat ne pourra modifier ces dispositions de la Contitution, lorsqu'elle sera redigée par la Constituante, puis soumise à référendum'', affirme-t-il. 

Le dialogue propose aussi une incompatibilité entre les fonctions de ministre et de député.

Mais, selon les participants, ces mesures ne sont que des recommandations. Et désormais, c'est le général Brice Clotaire Oligui Nguema qui sera chargé d'en assurer l'exécution sous forme de lois et règlements.

Mandat d'arrêt contre l'ex-président centrafricain Bozizé

Un tribunal spécial parrainé par l'ONU a lancé un mandat d'arrêt international contre l'ancien président de Centrafrique François Bozizé, dans une enquête sur sa responsabilité dans de possibles crimes contre l'humanité commis par des militaires dans une prison entre 2009 et 2013.
Françis Bozizé, 77 ans, qui s'était emparé du pouvoir en 2003 par un coup d'Etat avant d'être renversé 10 ans plus tard par des rebelles et qui est aujourd'hui à la tête de la principale rébellion centrafricaine, est exilé en Guinée-Bissau depuis mars 2023.

Le mandat d'arrêt international a été émis le 27 février, précise dans un communiqué la Cour Pénale Spéciale (CPS), une juridiction hybride composée à Bangui de magistrats centrafricains et étrangers, chargée de d'enquêter et de juger des crimes de guerre et contre l'humanité commis depuis 2003 en Centrafrique, un pays qui a connu une litanie de guerres civiles et régimes autoritaires depuis son indépendance de la France en 1960.

Rebelles de la Séléka à Bangui le 5 décembre 2013
Les milices sont accusées d'avoir commis de nombreux crimes en RCAnull Jerome Delay/AP Photo/picture alliance

Des indices graves

Des juges de la CPS ont émis ce mandat dans le cadre d'une "instruction" sur de possibles "crimes contre l'humanité" commis par la Garde présidentielle de M. Bozizé, entre février 2009 et mars 2013, dans "une prison civile" et un "centre d'instruction militaire" à Bossembélé, dans le centre du pays. 

Les juges ont conclu à "l'existence d'indices graves et concordants à charge" de M. Bozizé, "de nature à engager sa responsabilité pénale", "en sa qualité de supérieur hiérarchique et chef militaire".

Ces crimes présumés, commis dans la prison et le camp militaire de Bossembélé par des éléments de la garde prétorienne de M. Bozizé ainsi que "d'autres services de sécurité", concernent notamment des "meurtres", "disparitions forcées", "tortures", "viols" et "autres actes inhumains", selon la CPS, créée en 2015 avec le parrainage de l'ONU, qui réclame la "coopération de la Guinée-Bissau, par l'entremise d'Interpol" pour "arrêter" et remettre "le suspect" à la CPS en Centrafrique.

Un accusé en exil en Guinée-Bissau

Joint par la DW, le porte-parole de la CPS, Gervais Bodagay Laoulé, estime que, " les juges ont collectés des éléments de preuves probants. Le mandat d'arrêt a été lancé et aucun pays ne peut se retirer de la lutte contre l'impunité des auteurs de crimes graves." Cliquez sur l'image pour écouter son interview.

Le renversement de M. Bozizé en 2013 par une coalition de rebelles à majorité musulmane, la Séléka, avait déclenché l'une des plus terribles guerres civiles de l'histoire ce pays d'Afrique centrale parmi les plus pauvres du monde, avec des massacres de civils essentiellement.

"Tous les moyens doivent être mis en oeuvre pour qu'il soit appréhendé", Gervais Bodagay Laoulé (CPS)

M. Bozizé avait organisé la création de milices dominées par les chrétiens et les animistes, les anti-balakas, pour tenter de reprendre de pouvoir et des milliers de civils ont été les principales victimes de massacres perpétrés par les deux camps.
L'ONU a accusé en 2018 les ex-Séléka et anti-balaka de nombreux crimes de guerre et contre l'humanité.

Fin 2020, M. Bozizé avait pris la tête d'une nouvelle alliance rebelle, la Coalition des Patriotes pour le Changement (CPC), qui avait menacé le pouvoir du président Faustin Archange Touadéra avant que l'envoi par Moscou de centaines de paramilitaires de la société privée Wagner ne permette au pouvoir de les repousser loin de Bangui.

L'ex-président avait pris le chemin de l'exil, au Tchad voisin, avant la Guinée-Bissau en mars 2023.

Il a été condamné le 22 septembre 2022 par un tribunal centrafricain aux travaux forcés à perpétuité, notamment pour "complot" et "rébellion" en tant que chef de la CPC.
     

Tchad : Lydie Beassemda, la candidate qui défie les hommes

Lydie Beassemda, âgée de 57 ans, est au départ une ingénieure en industrie agroalimentaire.

Elle est titulaire d’une maîtrise en sciences naturelles et d’un diplôme d'études supérieures spécialisées (DESS) en industries agroalimentaires, en planification territoriale et développement local. 

Des diplômes obtenus entre les universités du Tchad, du Niger, du Burkina Faso et l'Université du Québec à Montréal.

Elle fut ministre de la Production, de l'Irrigation et des Equipements agricoles de 2018 à août 2019, avant d’être nommée, en mai 2021, ministre de l'Enseignement supérieur dans le gouvernement de transition, mis en place par le Conseil militaire de transition. 

Image de femmes devant une urne
plus de 8 millions d’électeurs sont inscrits sur la liste électoralenull Alexis Passoua

Début en politique

Lydie Beassemda a fait ses premiers pas en politique en avril 2010, au côté de son père, Djébaret Julien Beassemda, leader du Parti pour la démocratie et l'indépendance intégrale, le PDI. Un parti qui soutient le fédéralisme et qu’il a fondé en 1997.

"Je me suis engagée en politique pour venir à la rescousse de papa et maman, des leaders engagés politiquement. Je me suis engagée pour donner un coup de main, un souffle à ceux qui étaient là et qui étaient un peu fatigués de continuer la lutte", déclare la candidate au micro de la DW.

"Tout ce qui nous motive, c'est la fédération"

Après le décès de son père, en 2018, Lydie Beassemda prend la présidence du PDI dont elle était secrétaire générale depuis 2014. Pour elle, les échéances électorales sont une opportunité pour sa formation politique.

"Ce ne serait pas logique pour nous de ne pas aller à cette élection. Pour nous, c'est une opportunité pour encore parler de la fédération. Tout ce qui nous motive dans tout ce que nous faisons, c'est la fédération. Si nous n'allons pas aux élections, ça veut dire que nous avons capitulé, que nous avons arrêté cette lutte. Chaque fois qu'il y aura une opportunité pour dire que les Tchadiens aspirent à la fédération, nous n'allons pas la manquer."

Face aux obstacles qui freinent la participation des femmes à la vie politique, Lydie Beassemda critique le fait que les hommes refusent de partager le pouvoir.

"Le niveau de la culture politique est encore faible au Tchad. En tant que femme c'est pire, parce que les hommes n'acceptent pas que vous partagiez le même espace politique. Lorsqu'il y a des problèmes, ils préfèrent gérer entre eux. Ils n'acceptent pas que les femmes prennent part aux décisions dans l'espace politique. Mais nous autres, nous avons été éduquées en sachant que les droits n’ont pas de sexe" ajoute Lydie Beassemda.

Les explications de Blaise Dariustone

Première femme à se présenter à la présidentielle tchadienne, elle a terminé troisième lors de l’élection présidentielle d’avril 2021, où elle a recueilli 3,16% des suffrages.

Malgré ce score faible, Lydie Beassemda croit cette fois en sa  victoire, au soir 6 mai, et elle annonce ses priorités.   

"Les Tchadiens pour le fédéralisme. Et aujourd'hui, nous partons d'un projet de société fédéraliste qui ne peut que requérir l'attention des Tchadiens. C'est possible que notre projet de société l’emporte. Notre projet de société a pour vision de faire du Tchad une nation puissante établie dans un Etat fédéral où les droits sont égaux, où les opportunités sont accessibles à tous et où la prospérité est partagée", conclut la candidate á la présidentielle.

Lydie Beassemda est également une militante engagée des droits humains, principalement pour la cause féminine.

L'archevêque de Kinshasa visé par une information judiciaire

En République démocratique du Congo, la justice s'en prend au chef de l'Eglise catholique, le cardinal Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa.

Une information judiciaire vient en effet d'être ouverte contre le prélat. Il lui est reproché d'avoir tenu des "propos séditieux", au moment où le pays fait face à l'offensive militaire conduite par les rebelles du M23 dans l'est du pays.

Fridolon Ambongo n'a en effet pas caché, ces derniers temps, ses critiques vis-à-vis du gouvernement, auquel il reproche, selon lui, son incapacité à résoudre la crise sécuritaire dans l'Est.

Incitation à la révolte contre les institutions

Dans sa lettre au procureur général près la cour d'appel de Kinshasa - Matete, Firmin Mvonde, procureur général près la cour de cassation, souligne que le cardinal Ambongo "violente délibérément les consciences et semble trouver un plaisir à travers des faux bruits et incitations à la révolte contre les institutions établies et aux attentats contre les vies humaines". 

Monseigneur Donation Tshole, secrétaire général de la Conférence épiscopale nationale du Congo, la Cenco, n'a pas voulu réagir à chaud. Il a simplement affirmé que le cardinal poursuit librement ses occupations.

En RDC, l’armée se prépare à prendre la relève de la Monusco

Une procédure habituelle

Jonas Tshiombela, coordonnateur de la nouvelle société civile, rappelle que la loi est la même pour tous. Il estime qu'il n'y a rien d'anormal dans cette procédure. 

"Le cardinal n'est pas au-dessus de la loi. Même le président de la République n'est pas au-dessus de la loi. La justice a intérêt de s'intéresser à ce qu'il a fait comme déclaration. Mais toutefois, quand on peut convoquer quelqu'un et que le dossier est sous instruction, il peut être à charge ou à décharge. A ce stade, on ne peut pas dramatiser. Il jouit encore de la présomption d'innocence."

La main de l'exécutif

Mais pour Papy Niango, avocat au barreau de Kinshasa-Matete, il s'agit là de l'instrumentation de la justice par le pouvoir. Il s'étonne que la justice se lève contre ceux qui dénoncent les insuffisances, mais ferme les yeux face aux détournements des deniers publics auxquels les Congolais assistent au quotidien.

"La justice apparaît plus lorsqu'il faut taire la voix du peuple, lorsqu'il faut taire ceux qui se lèvent pour contredire les gestionnaires de l'Etat. Aussi pour dénoncer leurs méfaits. Là, nous voyons la justice agir d'une façon très expéditive pour museler l'opinion."

Certains opposants ont également condamné l'enquête lancée contre le prélat catholique. Parmi eux, figurent Martin Fayulu, coordonnateur de la coalition Lamuka, et Denis Mukwege, prix Nobel de la paix. Tous deux étaient candidats à l'élection présidentielle de décembre dernier.

"Je veux donner sa chance à la paix en RDC" (Félix Tshisekedi)

Le président de la République démocratique du Congo, Félix Tshisekedi, a entamé dimanche une visite officielle en Europe.

En Allemagne, il a eu un entretien avec le chancelier fédéral, Olaf Scholz.

La crise sécuritaire dans l’est de la RDC était notamment au menu des échanges.

L'Allemagne soutient les efforts de médiation de l’Angola dans le cadre du processus de paix de Luanda. 

Cette rencontre avec le chancelier Olaf Scholz a été suivie d’un dîner de travail commun avec les délégations des deux pays.

Félix Tshisekedi dit vouloir faire de la République démocratique du Congo, "l'Allemagne de l'Afrique". 

Pour Félix Tshisekedi, la RDC dispose des ressources exploitables pour ces investissements mais il accuse le voisin rwandais de les piller. 

Malgré tout,le président congolais veut donner une dernière chance, dit-il, aux efforts de paix avec le pouvoir rwandais. 

Félix Tshisekedi répond aux questions de Wendy Bashi et Christina Gerhäusser. 
 

Interview de Félix Tshisekedi (1/2)

DW : Comment est-ce que vous comptez intensifier les relations entre la République démocratique du Congo et l'Allemagne ?

Félix Tshisekedi : J'ai beaucoup d'admiration pour ce qui se fait en Allemagne. J'ai toujours dit que je rêvais de faire de mon pays une sorte d'Allemagne d'Afrique, donc un moteur du développement africain. Et dans l'infrastructure, nous avons énormément de besoins, et c'est la clé d'ailleurs pour le développement d'un pays. Que ce soit les infrastructures routières et l'énergie propre. Surtout en ce moment. Et le Congo a des atouts. Mais maintenant, il faut des investissements pour développer tout ça.

DW : Vous êtes le président d'un pays qui dispose d'immenses richesses. Et récemment, la RDC a accusé la multinationale Apple d'utiliser des minerais issus d'exploitations illégales acheminés et blanchis principalement vers le Rwanda en finançant même des groupes armés dans l'est de la RDC. Il y a même un ultimatum posé. Pour quoi exactement ?

Félix Tshisekedi: Mais pour que ça cesse, tout simplement. Ça fait 30 ans que ça dure. Le Rwanda a découvert qu'en République démocratique du Congo, il y avait des minerais. Le Rwanda a noué des contacts dans la communauté internationale qui lui ont permis justement d'être le receleur, le  vendeur de ces minerais du sang. Des minerais obtenus par la violence exercée sur  nos populations pour les pousser à quitter les localités dans lesquelles on trouve ces minerais.

DW : On a la présence aujourd'hui du M23 qui est soutenu par le  Rwanda. Votre gouvernement l'a dit plusieurs fois. Est-ce que dans les prochains jours, vous prévoyez de rencontrer Paul Kagame?

Félix Tshisekedi: Il y a maintenant une tentative que nous, nous estimons être de la dernière chance. Et moi, comme je l'ai dit, je donne la chance à la paix. Le plus possible.

DW : Mais, en décembre 2023, vous étiez plus incisif. Vous disiez alors : "A la moindre escarmouche, on va attaquer le Rwanda".

Félix Tshisekedi : Tout à fait.Vous savez, lorsque j'ai haussé le ton,  les partenaires de mon pays sont venus me voir. J'ai bien voulu leur accorder évidemment cette chance aussi, d'essayer pour la dernière fois quelque chose. C'est ce qui se passe en ce moment.

Pour écoutez la suite de l'interview de Félix Tshisekedi, cliquez sur l'audio ci-contre

Interview de Félix Tshisekedi (2/2)

La fraude fiscale ruine l’Afrique

Un peu plus de huit milliards de dollars en Afrique : c'est le montant estimé par le Tax Justice Network, dans son rapport 2023, des fraudes à l'impôt sur les sociétés, aux taxes douanières et à l'impôt sur le revenu de riches particuliers.

Cette perte fiscale annuelle subie équivaut à 15% des dépenses de santé sur le continent africain, un triste record dans le monde.

L'année 2024 pourrait toutefois marquer une amélioration : l'entrée en vigueur d'un accord conclu entre près de 140 pays, sous la coordination de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), prévoit désormais un taux minimum d'imposition des sociétés de 15%.

Mais une autre question a émergé : celle du poids des pays riches dans la gestion des questions fiscales.

Le leadership de l'OCDE en matière de coordination fiscale mondiale est en effet remis en cause par une initiative africaine. 

Frustrés de ne pas être, selon eux, suffisamment consultés, 125 pays, pour la plupart en développement, ont soutenu aux Nations unies, le 22 novembre dernier, un projet de résolution proposé par le Nigeria, appelant à une "convention cadre sur la coopération internationale”.

Quarante-huit pays, pour la plupart développés, dont l'Allemagne, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et le Japon, ont voté contre.

Le vote de l'Onu devrait conduire à une coopération accrue entre l'OCDE et le G20. Désormais, les Etats en développement réclament qu'on les entende sur un phénomène planétaire, l'évasion fiscale, qui impacte plus durement les pays les plus pauvres.

Les pays riches organisent l'évasion fiscale

Au niveau mondial, les pertes fiscales totales subies chaque année par les Etats s'élèvent à près de 500 milliards de dollars et les multinationales sont en grande partie responsables du siphonnage des revenus imposables.

Les entreprises multinationales représentent en effet un tiers de la production économique mondiale, la moitié des exportations, près du quart de l'emploi mondial et sont responsables de... 65% des pertes fiscales.

Les multinationales échappent notamment à l'impôt sur les sociétés en transférant leurs bénéfices vers des paradis fiscaux, des pays où le taux d'imposition sur les entreprises est quasiment nul.

Ces transferts de bénéfices sont estimés à plus de mille milliards de dollars chaque année.

Or, ce sont les pays riches, dont nombreux sont des territoires d'outre-mer britanniques (Iles Caïmans, Bermudes, Iles vierges britanniques...) qui organisent ce transfert de capitaux en offrant des régimes fiscaux avantageux.

Au sein de l'Union européenne, le Luxembourg, l'Irlande et les Pays-Bas ont aussi créé des législations attractives pour les multinationales.

Les membres de l'OCDE sont ainsi responsables de près de 80% des pertes fiscales subies par les pays du monde entier.

La Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement, la Cnuced, estime que chaque année, 89 milliards de dollars quittent le continent africain et échappent ainsi à l'impôt.

Ces flux sortants, ou flux financiers illicites (FFI), comprennent "la fuite illicite de capitaux, les pratiques fiscales et commerciales illégales, comme la fausse facturation des échanges commerciaux, et les activités criminelles provenant de marchés illégaux, de la corruption ou du vol”.

Les femmes sont les premières victimes

Pour ce qui concerne l'Afrique francophone, les deux Congo sont les pays les plus touchés par ces fuites de revenus. Les deux autres puissances économiques de la zone, la Côte d'Ivoire et le Sénégal, arrivent également en tête de la liste des pays victimes.

La Cnuced souligne que, dans les pays africains touchés par cette fuite de capitaux, "les gouvernements dépensent 25% de moins pour la santé que les pays où les FFI sont faibles, et 58% de moins pour l'éducation.”

Les femmes ayant statistiquement un accès plus faible à la santé et à l'éducation, elles sont ainsi les premières touchées par cette réduction des budgets sociaux.

Les fuites de capitaux constituent parfois une perte irréparable pour certains Etats. C'est le cas de la République démocratique du Congo (RDC) et de la République du Congo, où celles-ci représentent respectivement 89% et 538% du budget national consacré à la santé.

Le poids de l'industrie minière explique l'ampleur des pertes subies par ces Etats. En RDC, plus de 90% des exportations proviennent de l'industrie minière (cuivre, cobalt, or, diamants...)

Le pays représentait aussi, en 2021, près de 70% de la production de cobalt dans le monde, selon le dernier rapport du World Mining Data.

De l'or dans les bagages à main

Le secteur minier est connu sur le continent pour entretenir des pratiques de sous-facturation des exportations, afin de réduire le montant des taxes, mais aussi de contrebande. Celle-ci est facilitée par le fait que certains produits comme l'or et le diamant sont aisés à transporter, de petites quantités pouvant représenter des valeurs importantes.

L'histoire des "sièges vides” réservés sur les vols entre la capitale rwandaise Kigali et Dubaï est devenue célèbre : encore récemment, les trafiquants utilisaient ces sièges pour transporter de l'or de contrebande dissimulé dans des bagages à main.

Officiellement, le Rwanda ne produit que 2.000 kilos d'or par an, mais les ventes de ce métal précieux, essentiellement vers les Emirats arabes unis, représentent plus de 30% des exportations du pays et ont une valeur supérieure à celle des volumes déclarés. 

Le Rwanda est en effet accusé d'organiser la contrebande d'or à partir notamment de la région du Nord-Kivu, dans l'est de la République démocratique du Congo.

Ainsi, quasiment la moitié des près de 89 milliards de dollars qui, chaque année, quittent illicitement l'Afrique, concernent l'industrie minière et en grande partie le commerce de l'or.

En termes d'impact négatif sur les budgets sociaux, là encore, les pays en développement sont ceux qui souffrent le plus.

Les pays à revenus élevés perdent en effet plus d'impôts en valeur absolue, mais leurs pertes fiscales sont moindres si on les compare à leurs budgets sociaux. C'est exactement l'inverse pour les pays en développement : ils perdent moins d'argent, mais cette perte suffit à creuser des trous importants dans leur budget.

Les flux financiers illicites sortant d'Afrique sont, par ailleurs, presque aussi importants que les montants entrants de l'aide publique au développement (48 milliards de dollars) ajoutés aux investissements directs étrangers (54 milliards de dollars).

L'Afrique, "créancier net du reste du monde” 

Pour ce qui concerne les stocks, et toujours selon les chiffres du Cnuced, "de 2000 à 2015, la fuite illicite de capitaux en provenance d'Afrique s'est élevée à 836 milliards de dollars”

Or, le stock total de la dette extérieure du continent s'élevait à 770 milliards de dollars en 2018. Un chiffre inférieur donc, qui fait de l'Afrique "un créancier net du reste du monde”, comme l'a affirmé à plusieurs reprises, mais il n'est pas le seul, l'ancien président sud-africain Thabo Mbeki. 

Les pays africains ont entre leurs mains une partie de la résolution du problème, mais peu semblent pourtant prêts à prendre les mesures nécessaires.

Seuls 23 pays africains, tous membres du Forum mondial et de l'Initiative Afrique, ont signé la Convention concernant l'assistance mutuelle en matière fiscale (Maac). Une coopération qui facilite "l'assistance en matière fiscale en vue de la prévention de l'évasion fiscale.”

Parmi les non-signataires, on trouve trois pays qui sont pourtant lourdement touchés par la fuite de capitaux : la RDC, la République du Congo et la Côte d'Ivoire. A ceux-ci s'ajoutent le Tchad, le Burundi, la Guinée, le Mali, le Niger et la Mauritanie.

Par ailleurs, seulement neuf pays africains mettent en œuvre l’échange automatique de renseignements sur les comptes financiers (EAR) et tous sont anglophones, à l'exception de Maurice et de la Tunisie.

Depuis 2009, cet échange d'informations a permis aux pays africains d'identifier plus de 1,2 milliards d'euros de recettes supplémentaires grâce aux enquêtes fiscales lancées entre les pays qui acceptent de coopérer.

Si on compare cette somme avec le fait que le continent perd chaque année huit milliards de recettes budgétaires, ce rattrapage représente, depuis 2009, à peine 1% des sommes non perçues par les Etats.

Les soldats américains priés de quitter le Tchad

Une centaine d’hommes, essentiellement des membres des forces spéciales, étaient basés dans le plus grand secret à l’aéroport de N’Djamena. Ceux-ci vont donc se retirer, officiellement en raison d’un défaut de document permettant leur présence.

Le Pentagone a accepté le principe de ce départ momentané qui suscite des réactions dans le pays. Certains Tchadiens se demandent si ce retrait aura un impact sur la sécurité au Tchad et au Sahel.

Présence discrète

La plupart des Tchadiens ne sont pas au courant de la présence des forces spéciales américaines dans leur pays.

"Les forces américaines sont invisibles au Tchad. Quand on a dit que les forces américaines allaient quitter le Tchad, les gens étaient surpris d’apprendre que nous hébergeons les forces américaines. En revanche, les forces françaises, elles, sont visibles", a déclaré le chercheur Kamane Bedaou Oumar qui estime que leur départ sera sans conséquence au Tchad.  

Alors que le Niger, abrite plus d’un millier de soldats, qui ont aussi été priés de quitter le pays, les Etats-Unis ne disposaient que d'une centaine de soldats au Tchad, dans le cadre de la lutte anti-djihadiste au Sahel.

Parade de l'armée tchadienne à N'djamena en 2023.
Devenu un acteur militaire incontournable dans la lutte contre le terrorisme, le pouvoir tchadien a joué la carte de la diplomatie militaire et consolidé son alliance politique et son partenariat sécuritaire avec les pays occidentaux.null Denis Sassou Gueipeur /AFP

Washington a vite réagi

Pour le porte-parole du Pentagone, Pat Ryder, il s'agit d'un « retrait temporaire » dans le cadre d'une révision en cours de la coopération de sécurité entre les deux pays, qui reprendra après l'élection présidentielle du 6 mai au Tchad.

Cette sortie américaine fait dire à l’analyste politique tchadien, Evariste Toldé, que la décision prise par les autorités à la veille de la présidentielle n’est pas anodine.

"Le camp occidental est trop exigeant sur les questions liées aux valeurs universelles que partagent certaines nations éprises de justice. On a senti une éruption de la rhétorique guerrière dans les discours lors de la campagne présidentielle", a-t-il expliqué.

Donc, selon toujours l’analyste, une présence américaine au Tchad à l’approche des élections, "supposerait que les Américains voudraient regarder à la loupe tout ce qui se passe. Parce que la décision a été prise après la visite de deux sénateurs qui ont rencontré le chef de l'Etat en présence de l’ambassadeur américain à N’Djamena".

Situation sécuritaire instable

Mais Evariste Toldé redoute qu’un départ des Américains, s’il était définitif, puisse compliquer la situation du Tchad.

"Leur positionnement aujourd'hui dans le pays, permet au Tchad d’avoir un droit de regard sur ce qui se passe au Sahel. Une telle décision viendrait compliquer non seulement les relations diplomatiques entre les deux pays, mais aussi mettrait à mal les forces occidentales d'une manière générale, et les forces tchadiennes qui opèrent contre les djihadistes."

A ce sujet, les Américains cherchent à rassurer. Washington va "continuer à explorer les options possibles afin d'assurer que les Etats-Unis soient toujours en mesure de faire face aux potentielles menaces terroristes dans la région", a déclaré le porte-parole du Pentagone.

La RDC porte de graves accusations contre Apple

Les autorités congolaises estiment que les minerais exploités illégalement dans les mines de la République démocratique du Congo sont transportés hors de ce pays, notamment vers le Rwanda où ils seraient finalement blanchis.

William Bourdon et Vincent Brengarth, avocats de l'Etat congolais, soulignent que le Rwanda est un acteur central de l'exploitation illégale de minerais, notamment de l'exploitation de l'étain et du tantale en RDC.

Après leur extraction illégale, ces minerais sont acheminés par contrebande au Rwanda, où ils sont intégrés dans les chaînes d'approvisionnement mondiales, précisent-ils.

Dans tous les cas pour ces avocats, la mise en demeure cible le groupe Apple à la suite de la contradiction criante entre les nombreux engagements éthiques pris par cette société et les conditions dans lesquelles ces minerais sont en réalité extraits en RDC.

DR Kongo | Luhihi-Goldmine in der östlichen Provinz Süd-Kivu in der Demokratischen Republik Kongo
Le sous-sol de la RDC regorge de minerais, le pays étant notamment le premier producteur mondial de cobalt et le premier producteur africain de cuivre. Selon un rapport de l'ONG The Enough Project publié en 2015, "les sites de minerais sont souvent contrôlés par des groupes armés qui contraignent, par la violence et la terreur, des civils à y travailler et à transporter ces minerais. Des enfants sont également forcés à travailler dans ces mines".null Alexis Huguet/AFP/Getty Images

Une question complexe

En réalité, la question est complexe et le cas du groupe Apple n'est qu'un exemple. Plusieurs grandes sociétés utilisent des minerais en provenance de la République démocratique du Congo.

"Ce qui rend la chose complexe sur ce dossier de responsabilité c'est justement qu'au long des chaînes d'approvisionnement, à la fois en RDC jusqu'à l'exploitation, mais même au niveau international, davantage lorsqu'on passe à travers les grandes fonderies c'est que les minerais qui sont exportés légalement et illégalement ont tendance à aussi finir par se mélanger", a expliqué à la DW, Christophe Vogel, chercheur sur les dynamiques de conflit en Afrique centrale.

Et justement, les avocats de l'Etat congolais envisagent d'engager dans les semaines à venir, d'autres actions à l'encontre d'autres sociétés impliquées dans ce commerce.

Le gouvernement de Kinshasa accuse le Rwanda de vouloir faire main basse sur les ressources, minières notamment, de l'Est congolais, une des raisons pour lesquelles, selon lui, Kigali soutient la rébellion du M23, à l'offensive depuis plus de deux ans dans la province du Nord-Kivu.

 

Au siège de l'Onu, nouvelle passe d'armes entre Kinshasa et Kigali

L'envoyé spécial du secrétaire général pour la région des Grands Lacs, Huang Xia, a exprimé sa "vive préoccupation devant l'aggravation du conflit et la détérioration alarmante des conditions humanitaires dans la région". Il a appelé à la désescalade, notant une intensification des tensions entre les deux pays, illustrée par les affrontements récurrents entre le M23 et les FARDC.

Échanges d'amabilités

Autour de la table des discussions, les voisins rivaux n'ont rien fait pour calmer la tension. Ernest Rwamucyo, le représentant du Rwanda donne le ton :

"Il est surprenant que certains acteurs connaissent bien la réalité mais continuent de l'ignorer et font même progresser un discours marqué par des préjudices, ciblant le gouvernement de Rwanda", a-t-il déclaré. "C'est un déni systématique et cela revient à protéger les génocidaires

La réponse de Zénon Mukongo Ngoy, le représentant permanent de la RDC auprès de l'ONU ne s'est pas faite attendre : "Nous, nous avons toujours contribué au maintien de la paix en respectant nos accords", a-t-il soutenu. "Mais le Rwanda n'a jamais rien respecté. La preuve est que les troupes rwandaises se trouvent sur le territoire congolais pendant que nous parlons ici. Le représentant des États-Unis a bien fait de demander au Rwanda de retirer ses troupes du terriritoire de la RDC. Ils ne le font pas mais ils viennent brandir le génocide, le discours de la haine. On ne les écoutera pas éternellement”.

"Ce qu'il faut, ce sont des sanctions" (Henri-Désiré Nzouzi)

Sanctions contre le Rwanda

Pour l'analyste géopolitique, Henri-Désiré Nzouzi, il y a nécessité pour le Conseil de sécurité de sévir. 

"Au-delà des condamnations de certains pays pris individuellement, appelant notamment au retrait des troupes rwandaises, ce qu'il faut, ce sont des sanctions qui puissent contraindre Kigali de retirer ses troupes de RDC. Aujourd'hui, en 2024, aucun pays souverain ne peut accepter de négocier avec un autre Etat ayant déployé des troupes sur son territoire. Et je vous donne un exemple très simple: ce qui se passe à l'heure actuelle en Ukraine” .

La réunion d'hier s'est pourtant achevée sans qu'aucune résolution concrète ne soit adoptée.

 

Les FARDC s’entraînent pour prendre la relève de la Monusco

En République démocratique du Congo, tandis que les combats entre les rebelles du M23 et l’armée congolaise, soutenue par des milices armées, continuent de fragmenter le Nord-Kivu, les derniers soldats de la Monusco sont en train de quitter le Sud-Kivu.

Et pour bien préparer ce retrait, les casques bleus se sont improvisés instructeurs pour les forces armées de la RDC, les FARDC. Ce fut notamment le cas dans les hauts-plateaux, à Mikenge.

La scène a tout d’une vraie offensive, et pourtant… Sous le regard des Casques bleus du contingent pakistanais, une vingtaine de FARDC courent, roulent, montent à l’assaut et imitent le bruit des kalachnikovs sur la colline du village de Mikenge.

Des personnes protestent avec des pancartes contre le présence de la Monusco
Pour un retrait que l'Onu et Kinshasa disent vouloir "ordonné, responsable et durable", un "plan de désengagement" en trois phases a été adopténull Benjamin Kasembe/DW

Le temps presse 

D’ici la fin du mois, ils reprendront les rênes de la base de la Monusco, installée depuis 2020 pour protéger les personnes qui ont fui les violences chroniques dans la région.

Pour le major Jawad, commandant pakistanais de la base opérationnelle temporaire de Mikenge, il est grand temps de mettre en place les derniers ajustements, leur mission ici ne pouvant dépasser le 30 avril.

"Nous sommes censés fermer cette base opérationnelle temporaire très bientôt, explique-t-il. A cette fin, nous entraînons les FARDC depuis près de 15 jours maintenant. Nous les entraînons aux techniques de combat de base, aux précautions de sécurité ainsi qu’à comment interagir avec les locaux. Mais étant donné qu'ils sont Congolais, ils sont déjà bien ancrés dans la culture locale."

Un Casque bleu entouré d'habitants à Rugari, à 50 kilomètres de Goma
Après le Sud-Kivu, les 2e et 3e phases du "désengagement" de la Monusco concerneront l'Ituri et le Nord-Kivu, null Glody Murhabazi/AFP/Getty Images

Manque de moyens pour prendre la relève 

Car malgré la présence des groupes armés d’autodéfense banyamulenge, souvent considérés comme des étrangers, et souvent en conflit avec des communautés locales comme les Babembe, le major congolais Jonas Baraka assure qu’il n’y a aucune raison que les violences reviennent dans le secteur.

Pour Jonas Baraka, "maintenant, les Pakistanais, la plus-value qu’ils apportent à nos militaires concerne notamment la protection des populations civiles après leur départ. Il y a des groupes armés, mais nous sommes capables d’intervenir dans tous les cas." 

Une force de réaction rapide, censée pouvoir intervenir au moindre coup de feu. Car si la Monusco part, elle ne laisse pas d'enclaves vides. Les militaires, dans les zones occupées par des groupes armés, et la police, pour les régions apaisées, doivent prendre sa relève.

Le modèle aura-t-il ses limites ? Selon une source proche de la police de Kamanyola, ville à la frontière rwandaise, où la base de la Monusco a été transférée à la police fin février, les policiers ne disposent pas de rations ni d’essence pour effectuer leur mission et les premiers signes de découragement commencerait déjà à poindre.

 

En RDC, l’armée se prépare à prendre la relève de la Monusco

Au Tchad, la campagne électorale évite le nord du pays

La campagne électorale pour la présidentielle du 6 mai au Tchad se poursuit. Dix jours après son démarrage, les dix candidats en lice ne se sont pas encore déplacés dans le Nord, où leur sécurité n’est pas assurée. Ce qui suscite la colère des habitants de cette région qui ont le sentiment d’être abandonnés. 

L’éloignement de ces provinces désertiques du Nord et l’insécurité qui y règne, en raison de la présence de groupes armés, explique l’absence des candidats en campagne. 

Il est vrai que l’Etat tchadien ne contrôle pas complètement cette partie du pays, mais pour ceux qui y habitent, cette absence est vécue comme un manque de considération des leaders politiques envers les Tchadiens de l’extrême-nord. 

Ecoutez le reportage de notre correspondant au Tchad...

Les habitants se sentent ignorés 

Pour Younouss Ali, un commerçant joint à Miski dans la province du Tibesti, "c’est une élection qui concerne tous les Tchadiens, donc la campagne doit se dérouler sur l’ensemble du pays. Car le président qui sera élu, sera le président de tous les Tchadiens. Malheureusement, ici, nous sommes négligés, personne ne vient nous expliquer pourquoi on doit voter, ni demander ce qu’on veut ou quelles sont nos préoccupations." 

Un avis que partage la jeune Mariam Khadidja, également de Miski. "Je ne pense que l’élection ne nous concerne pas", se désole Mariam. Elle assure que "personne n’est venu nous recenser ici. C’est pour cela qu’ils pensent qu’il n’y a pas d’électeurs à Miski." 

"La place de l’armée française, c’est en France"

Une partie du pays qui échappe à l’Etat 

Pour le docteur Djiddi Ali Sougoudi, natif du Nord, il est important pour ces candidats d’aller parler aux habitants de cette région. 

Il note que "ce sont des régions un peu reculées, il faut donc des moyens et de la logistique pour les atteindre. Malheureusement, les gens n'ont pas d'audace. Il y a des candidats qui sont sectaires, ils ne viennent pas dans le Nord. Et c'est aussi une erreur de croire que le Nord est peu peuplé. Beaucoup de candidats le pensent et ils estiment que cela ne joue pas dans la balance de l'élection."

L’extrême-nord du Tchad est réputé être une zone de non droit où sont présents des groupes rebelles et des narcotrafiquants venus de la Libye, du Niger ou du Soudan. Une région septentrionale qui continue à échapper partiellement à l’emprise de l’Etat central. 

Éléphants de la Garamba, des voisins un peu trop encombrants

Frédéric Tati Mery, le président de la société civile du territoire de Watsa, dans le Haut-Uélé, ne cache pas son inquiétude. Il explique que les pachydermes détruisent les cultures des populations. 

Il demande de l'aide aux autorités parce que ces éléphants sont, selon lui, une menace pour les populations et leurs champs.

"Chaque année, à la saison des mangues, les éléphants quittent la forêt" (Paulin Tshikaya)

"C'est une réelle difficulté pour ceux qui pratiquent l'agriculture parce que toutes leurs cultures sont détruites. Ils ne pourront pas bénéficier de leurs récoltes. C'est pour cette raison que nous demandons aux autorités de se pencher sur ce dossier et voir ce qui peut être fait pour dégager ces pachydermes et permettre aux populations de vaquer à leurs occupations. "

Une habitude plutôt connue dans la région

Paulin Tshikaya est directeur technique et scientifique à l'Institut congolais de conservation de la nature. Il a travaillé au parc de la Garamba et précise que cette situation n'a rien de nouveau.

"Chaque année, quand il y a la saison des mangues, les éléphants quittent la forêt pour venir consommer les mangues. Nous envoyons systématiquement des équipes de sensibilisation parce que nous sommes face à des troupeaux d'éléphants et on ne peut pas prendre des mesures pour les chasser. Tout le monde sait qu'après un ou deux mois, ils retournent dans le parc. La seule chose que nous faisons, c'est donner des conseils aux communautés de ne pas approcher les troupeaux, de ne pas les déranger, de ne pas chercher à

couper les mangues là où les éléphants sont déjà présents et cela nous permet de maintenir un équilibre, " confie le scientifique à la Deutshe Welle.

Vers une meilleure cohabitation entre les humains et les éléphants ?

Pour Corneille Ewango, professeur à l'université de Kisangani et spécialiste en biologie de conservation et en biodiversité, qui a lui aussi longtemps travaillé au parc national de la Garamba, il est impératif de comprendre l'écologie de ces animaux :

"L'éléphant ou les autres animaux passent et repassent dans leurs traces. Pour eux, c'est leur territoire et ils peuvent faire la transhumance là où il y a disponibilité de nourriture. Les communautés doivent savoir s'organiser pour mener des activités en couloir. L'agriculture doit se faire de manière regroupée, de manière à assurer la protection des cultures. Mettre en enclos les éléphants ou les animaux du parc national de la Garamba, ou d'un autre parc, c'est rêver de quelque chose qui n'arrivera pas. Le parc a ses limites connues des humains, mais les animaux ne voient pas ces limites."

Corneille Ewango insiste sur le fait que cette situation n'est pas particulière à la Garamba, cela se passe partout où vivent des éléphants. Pour lui, les animaux, tout comme les humains, ont le droit à la vie et nécessitent d'être protégés.

La RDC pourrait interdire la détention des chiens de combat

En République démocratique du Congo, Le chef de l'Etat congolais a demandé au gouvernement de travailler sur la mise à jour d'une nomenclature qui permettra de classifier les différentes races de chien.   

Parmi les races pointées du doigt figurent les pitbulls et les boerbulls, dont Félix Tshisekedi a souligné l'agressivité et la dangerosité. 

Certains Congolais rencontrés à Kinshasa soutiennent en effet l'interdiction de tels chiens. C’est le cas de Joli-Patrick Tshibangu. Il explique que son voisin en possède un et qu’il n’est pas rassuré. Selon lui, "chaque fois que ce chien aboie, c'est une peur. Un jour, je pourrais tomber nez-à-nez avec ce chien. Il doit être retiré du quartier pour qu'il y ait au moins une paix morale. Un tel type de chien ne doit pas vivre aux côtés de la population. C'est un danger pour la population." 

Ecoutez le reportage à Kinshasa...

Sécuriser sa propriété 

Des propriétaires de chiens de combat reconnaissent le danger que représentent ces bêtes. Mais ils affirment les détenir non pas par plaisir, mais plutôt pour la sécurité de leur maison. Ce propriétaire, qui a voulu garder son anonymat, explique qu’en tant que fonctionnaire, "avec le peu que je gagne, je ne peux pas engager une sentinelle. C’est la raison pour laquelle j'ai acheté un chien pour protéger mon terrain. La parcelle est clôturée. Les voisins, je ne crois pas qu'ils puissent avoir peur. Avec les kulunas (gangs de jeunes délinquants, ndlr), le chien est nécessaire pour la protection." 

La détention des chiens de combat par des particuliers pourrait toutefois être interdite dans les jours qui viennent.  

En RDC, le départ de la Monusco ne fait pas l’unanimité

Toute une économie 

Cette décision qui aurait un impact négatif pour les Congolais qui vivent de l'élevage des chiens. C'est le cas de Valdon Mbobe, responsable de Zedog, une entreprise de production et de distribution de matériels d'élevage canin. Pour lui, "le pitbull, le berger allemand et les autres chiens sont des éléments majeurs de notre activité. Certains d'entre nous ont investi dans ce domaine depuis très longtemps. Pour ma part, depuis 2017. Retirer ces chiens serait déstabiliser notre commerce. Nous sommes des acteurs du développement. Chacun travaille pour l'émergence de ce pays sur le front qui est le sien." 

La question fait donc polémique en RDC. D’autant plus que de nombreux Congolais s'interrogent sur son urgence, alors que les violences dans l’est du pays continuent à faire de nombreuses victimes humaines.

RDC : l'Union Sacrée bute sur son candidat au perchoir

En République démocratique du Congo, les députés de l'Union sacrée, c'est-à-dire de la majorité au pouvoir, organisaient ce mardi (23.04) une primaire en interne. Ils étaient appelés à choisir, entre trois noms, celui de leur candidat à la présidence de l'Assemblée nationale. Les trois hommes candidats à la candidature sont : Christophe Mboso, le président sortant de l'Assemblée, Modeste Bahati, qui est le président sortant du Sénat, et Vital Kamerhe, vice-Premier ministre et ministre de l'Economie dans le gouvernement sortant.

Initiateur du Politoscope, une plateforme de prévention de la violence verbale en politique, et coordonnateur de la Dynamique des Politologues (Dypol) de la République démocratique du Congo, Christian Moleka analyse pour nous ce que cette primaire dévoile de la majorité parlementaire et de l'attitude du président Félix Tshisekedi.

Ecoutez ci-contre l'entretien avec Christian Moleka.

 

DW :  Christian Moleka, l'Union sacrée, la majorité parlementaire en RDC, organise des primaires pour désigner un candidat à la présidence de l'Assemblée nationale issu de ses rangs. Il y a trois noms, trois personnes entre qui les élus devaient choisir : tout d'abord Vital Kamerhe, vice-Premier ministre, ministre de l'Economie du gouvernement sortant, Christophe Mboso, qui est le président sortant de l'Assemblée nationale, et Modeste Bahati, le président sortant du Sénat. Qu'est-ce qui différencie ces trois personnages ?

Ce qui différencie, c'est que Vital Kamerhe, particulièrement, a été l'allié du président [Tshisekedi] depuis 2018. Il appartient à ce qu'on a appelé le courant Cach, Cap pour le changement, l'attelage qui a mené le président [Félix Tshisekedi] au pouvoir en 2018, alors que les deux autres étaient dans un premier temps dans le FCC [le Front commun pour le Congo, derrière Joseph Kabila, ndlr]. Ce sont de nouveaux alliés qui ont rejoint le président durant son second mandat, à l'occasion notamment de la mise en place de l'Union sacrée. Ce qu'ils ont en commun, c'est qu'ils sont tous trois membres de la plateforme de l'Union sacrée.

Interview de Christian Moleka (politologue, RDC)

 

DW : Et comment se fait-il qu'ils n'aient pas réussi à se mettre d'accord sans avoir à organiser ce vote ?

C'est ça, la grande équation. C'est que vous avez, au sein de l'Union sacrée, trois acteurs qui ont les mêmes ambitions pour un même poste. L'Union sacrée s'est construite autour d'une dynamique qui a éclaté, qui a encouragé une transhumance d'acteurs. Ce qui fait qu'aujourd'hui, c'est la plateforme la plus grande, éléphantesque, qui compte énormément d'acteurs qui ont pour point commun le fait de soutenir le président [Tshisekedi] sans grande cohérence idéologique et avec des ambitions très, très différentes. Et comme on n'a pas pu régler les problèmes au niveau du présidium, cette question a été ramenée pour que les élus la tranchent.

Mais il y a également une autre lecture à faire, c'est qu'en les opposant, le président [Tshisekedi] garde la posture d'être le dernier arbitre face à des velléités des acteurs qui peuvent déjà se positionner par rapport à 2028 [date de la prochaine élection présidentielle en RDC, ndlr].

Il y a l'ombre de 2028 qui se profile également par le fait qu'on peut occuper, en étant à la tête l'Assemblée, une position de speaker qui vous donne une visibilité, un rayonnement.

Et puis il y a le fait également que le président ne veut pas porter la responsabilité d'une frustration politique. On sait que, notamment pour le Sud-Kivu, entre Bahati et Kamerhe, ça va créer de la frustration, ça va diviser. Et en laissant les élus décider ça, ça permet au président de dire : "Je ne suis pas responsable du choix des acteurs et je ne suis pas à l'origine de la frustration".

 

DW : Politiquement, pour les Congolais, qu'est-ce que ça change que ce soit l'un ou l'autre qui accède à ces fonctions ?

Ça peut changer quelque chose, parce qu'on a trois profils très différents. Vous avez un Kamerhe qui a été à la tête de l'Assemblée, dont on connaît la capacité à manœuvrer l'Assemblée et qui, déjà à l'époque avait donné un peu plus de place au débat parlementaire.

On a vu un Mboso qui a dirigé pendant cinq ans avec un Parlement qui n'a pas été capable de bousculer exécutif. Ce sont des styles très différents. Si on a un Mboso à l'Assemblée, on peut attendre une continuité de ce qu'a été le Parlement durant la première législature, à savoir un Parlement moins intrusif dans l'action gouvernementale. Peut-être que Kamerhe, on le verrait à un autre degré.

Et puis, en termes d'ambition personnelle, vous avez un Mboso qui a plus de 80 ans, donc qui n'a peut-être pas de projections pour 2028, et deux autres acteurs qui ont la capacité de se projeter sur 2028, qui est une date très importante, parce qu'on aura un président qui en sera à son dernier mandat constitutionnel, et occuper cette position [de président de l'Assemblée], pour eux, peut être un présentoir pour des ambitions à venir.

 

DW : Mais quel contact les citoyens ont -ils avec le président de l'Assemblée ? Est-ce que c'est vraiment un personnage public?

Oui, parce que, dans la structure politique, au Congo, le présent de l'Assemblée est la deuxième institution du pays et il jouit d'une très grande visibilité. Attendu également que nous sommes dans un régime semi-présidentiel, où le Parlement joue un rôle important, à la fois dans le vote du gouvernement, de son budget, également dans le contrôle de l'action gouvernementale, celui qui tient le Parlement a une position de visibilité assez grande et on a vu par le passé des personnalités fortes prendre la conduite du Parlement.

C'est une position qui vous met en lumière, à côté d'un président qui est déjà hyperactif et qui, quelquefois, phagocyte l'action du gouvernement.

 

DW : Est-ce qu'on ne pourrait pas imaginer aussi, dans un avenir proche, un président de l'Assemblée qui soit un petit peu plus jeune et qui reflète peut-être davantage la réalité de la population congolaise ?

C'est le souhait des gens d'avoir un nouveau visage à la tête de l'Assemblée parce que tous les trois ont déjà gouverné dans le passé,. On aurait pu souhaiter avoir un nouveau profil.

Malheureusement, l'UDPS, qui est la première force au Parlement, n'a pas élu le candidat à la tête du bureau. Peut-être pour les autres fonctions du bureau ? Parce que cette primaire ne concerne que le poste de président [de l'Assemblée], il restera à élire les autres membres du bureau. Peut-être qu'on pourra alors voir de nouveaux profils s'imposer.

 

DW : Est-ce que cette primaire, ce n'est pas de l'argent dépensé qui aurait pu être alloué à autre chose ?

Et surtout du temps perdu, parce que nous sommes déjà pratiquement quatre mois après les élections.

On a besoin d'un gouvernement qui s'installe rapidement et donc, on aurait pu nous épargner toute ces tensions. On sait que ça va créer des lignes de fracture. C'est du temps perdu. On aurait pu avoir un arbitrage au niveau de l'Union sacrée pour permettre au pays d'avancer plus rapidement. Parce que ce temps qu'on met pour avoir la primaire, en attendant, le calendrier définitif est mis dans le frigo parce qu'il faut aboutir à un ticket pour aller vers les élections.

Donc, on perd du temps, on perd en argent, on renforce les frustrations et par de là tout, c'est l'UDPS qui est la première force au Parlement. Officiellement, elle a 70 députés. Mais si vous prenez tous les partis mosaïques qui tournent autour, ils sont plus de 100. Donc en principe, c'est l'UDPS qui décidera. Ça veut dire que ça revient au président de choisir. On aurait pu épargner au pays tout le temps qu'on perd inutilement et aller rapidement à la formation du gouvernement.

Londres tient sa loi pour expulser des migrants vers le Rwanda

Le Parlement a fini par adopter, dans la nuit de lundi (22.04) à mardi, le texte qui doit permettre de concrétiser un traité conclu avec Kigali. Il permet de renvoyer vers le Rwanda les demandeurs d’asile arrivés illégalement au Royaume-Uni, notamment en traversant la Manche.

Pour l’organisation allemande de défense des migrants Pro Asyl, l’accord avec le Rwanda est "clairement illégal, inhumain et extrêmement coûteux". En plus, poursuit l’ONG, il "repose sur l'hypothèse erronée qu'il permettra d'empêcher la fuite (de migrants) vers le Royaume-Uni."

C’est pourtant ce que prétend le Premier ministre Rishi Sunak et son gouvernement conservateur. "Stop the boat", promet, depuis son arrivée au pouvoir, le Premier ministre britannique. Il veut "stopper les bateaux" qui traversent la Manche, alors que le nombre d’arrivées sur les côtes est à nouveau en hausse et que le Royaume-Uni dit avoir enregistré quelque 67.000 demandes d'asile l’an dernier. 

Rishi Sunak a fait de sa politique migratoire une clé de voûte de son action. 

Reste que cela passe, selon les Nations unies, par des lois "de plus en plus restrictives" et qui "ont érodé l'accès à la protection des réfugiés" depuis 2022. L’Onu appelle ainsi Londres à "reconsidérer son plan" avec le Rwanda. 

La nouvelle loi contourne une décision de la Cour suprême britannique. Elle avait jugé le projet initial illégal, car il violait selon les juges plusieurs accords internationaux et ce, au motif qu’il n’existe pas de procédure d'asile sûre au Rwanda, ni de protection contre la persécution.  

Un bateau de secours arrive dans le port de Dover, au Royaume-Uni
Au moins cinq migrants, dont une enfant, sont décédés après "un mouvement de foule" en mer lors d'une tentative de traversée de la Manche dans la nuit de lundi à mardinull Gareth Fuller/PA/AP/picture alliance

Le Rwanda, un pays sûr selon Londres 

Pour se mettre à l’abri des recours juridiques, le texte voté au Parlement déclare tout simplement le Rwanda comme un pays tiers sûr. Il interdit aussi le renvoi des migrants vers leur pays d'origine. 

La loi prévoit même que le gouvernement pourra outrepasser d'éventuelles injonctions de la Cour européenne des droits de l'homme pour empêcher les expulsions. C’est ce que la Cour avait fait l'an dernier pour annuler à la dernière minute le décollage du premier vol d’expulsion. 

Le Haut-commissariat aux réfugiés de l’Onu doute également du traitement des demandes d’asile au Rwanda, et craint l’absence d’un "système d'asile accessible, fiable, juste et efficace" dans un pays où des organisations comme Amnesty International ou Human Rights Watch dénoncent régulièrement des atteintes aux droits de l’Homme, à la liberté d’expression ou encore des disparitions forcées. 

Plus largement, d’après Pro Asyl, ce genre d’accord d’externalisation présente le risque que des Etats se placent "dans une relation de dépendance avec des régimes autocratiques et dictatoriaux". L’ONG dénonce ainsi "le silence du gouvernement britannique sur le soutien rwandais au groupe rebelle M23, dans l'est de la RDC"

"Les vols auront lieu quoi qu'il arrive" 

Mais Rishi Sunak est bien déterminé à concrétiser l’accord avec Kigali initié sous son prédécesseur, Boris Johnson. D’autant que des élections régionales et nationales auront probablement lieu en octobre et que le Premier ministre est au plus bas dans les sondages. Or, la migration est un thème porteur auprès d’une partie de l’électorat. 

Le premier avion pourrait décoller dans dix à douze semaines, selon Rishi Sunak. Une compagnie aérienne commerciale a accepté d’opérer les vols charters. Cinq cents personnes chargées d'accompagner les demandeurs d’asile auraient déjà été formées. 

L’Etat mobilise également des juges pour traiter rapidement les recours juridiques des demandeurs d’asile qui peuvent contester individuellement leur expulsion. 

"Nous sommes prêts. Les plans sont en place. Et ces vols auront lieu quoi qu'il arrive", a déclaré le chef du gouvernement britannique. 

Les Banyamulenge auraient aimé voir rester la Monusco

En République démocratique du Congo, la composante militaire de la Monusco, la plus ancienne des missions de maintien de la paix, est sur le point de quitter pour de bon la province du Sud-Kivu

Une première étape dans le désengagement de la mission, qui devra ensuite se retirer du Nord-Kivu puis de l'Ituri, deux autres provinces de l'est du pays. Pour rappel, cette page onusienne se tourne à la demande du gouvernement congolais, notamment après plusieurs manifestations violentes contre la présence de la Monusco, à laquelle certains Congolais reprochaient son inaction face aux groupes armés.

Mais est-ce que tous les Congolais sont aujourd'hui satisfaits de cette décision ? Dans le Sud-Kivu, certaines communautés comme les Banyamulenge se sentent encore menacées.

Des hommes et femmes banyamulenge de dos, dans les collines du Sud-Kivu (archive de 2020)
De nombreux Banyamulenge ont dû quitter leur domicile à cause des groupes armésnull Alexis Huguet/AFP/Getty Images

La peur du retour des attaques

Mikenge, sur les hauts plateaux du Sud-Kivu. En contrebas du village, se trouve un site de déplacés de 2.500 personnes, toutes appartenant à la communauté banyamulenge, des Congolais rwandophones.

Philémon Chiza en fait partie. Il témoigne de l'insécurité qui les a poussés à fuir leur lieu de vie : "C'est la guerre. Les maï-maï (des milices d'autodéfense dont certaines se sont transformées en groupes criminels, ndlr) nous ont attaqués dans notre village. Ils nous ont ravi nos bêtes, toutes les richesses que nous avions. C'est pourquoi nous sommes venus ici, proches de la Monusco."

Ce que ce pasteur de 64 ans craint, c'est le retour de la violence dans la région, bien qu'à l'heure actuelle, les relations avec les autres communautés soient apaisées dans Mikenge et ses alentours. 

Un milicien maï-maï dans un champ (archive)
Les populations banyamulenge se sentent toujours menacées par la présence de groupes armés comme les maï-maïnull Phil Moore/AFP/Getty Images

Car depuis 2017, les tensions entre les quatre ethnies occupant les hauts-plateaux ont repris de plus belle et les Banyamulenge sont au centre. Souvent affiliés aux Tutsis rwandais, la plupart des habitants des environs les considèrent comme des étrangers. Ce que réfute Philémon Chiza : "Je suis né ici. Mon papa est né ici. Le papa de mon papa, donc mon grand-père est né ici. Je suis Congolais."

Liens avec le Rwanda ?

Seulement voilà, un nouvel élément pourrait raviver la flamme de la haine envers les Banyamulenge. Dans leur rapport de janvier 2024, les experts des Nations unies ont établi un lien entre le M23, soutenu par le Rwanda, et les Twirwanehos, le principal groupe d'autodéfense des Banyamulenge. 

Des connexions prouvées, selon Josaphat Musamba, chercheur et  spécialiste des dynamiques des groupes armés dans le Sud Kivu. Pour autant, si le soutien du M23 aux twirwanehos n'est pas surprenant,  des rumeurs d'alliance du M23 avec le chef de guerre Ebuela, qui se bat pour le départ des Banyamulenge, poussent sur les cimes des hauts plateaux.

Cette alliance contre-nature n'est pourtant pas impossible pour le chercheur Josaphat Musamba : "Ce qui est antinomique par rapport à ce que l'on sait, mais pas impossible", estime-t-il, avant de constater que "les changements et recompositions d'alliances dans ces zones-là jouent beaucoup."

Quoiqu'il en soit, le chercheur craint que, après le départ de la Monusco, les groupes armés présents dans la région des hauts-plateaux se réapproprient de nouveau l'espace au détriment des populations civiles. 

Au Tchad, la campagne électorale comme source de revenus

Au Tchad, la campagne électorale en vue du scrutin présidentiel du 6 mai prochain se poursuit. Ce sont au total dix candidats, dont une seule femme, qui sillonnent le pays depuis le 14 avril, afin de convaincre les électeurs de voter pour eux. Un scrutin censé mettre fin à la transition militaire de trois ans qui dure depuis la mort de l'ancien chef de l'Etat, Idriss Déby Itno. Et en marge de cette campagne, des jeunes essayent de faire de petites affaires. 

Les rues de N'Djamena, la capitale tchadienne, ont pris les couleurs des différents partis politiques depuis bientôt une semaine. Tout au long des artères de la ville sont implantés des bureaux de soutien aux différents candidats, dirigés par des jeunes qui sont les plus courtisés par les formations politiques.  

Engagement apolitique 

Ces jeunes sont souvent sollicités pour l’animation de ces bureaux de soutien. Ils doivent également jouer le rôle d’ambassadeurs auprès d’autres jeunes électeurs.  

En contrepartie, ils reçoivent un petit salaire, comme l’explique Irène Yomadjal, une étudiante rencontrée dans un bureau de soutien au quartier Walia, dans le neuvième arrondissement.  

Ecoutez le reportage à N'Djamena...

Selon Irène, "ce sont tous les jeunes qui se débrouillent en cette période de campagne. Ce n’est pas forcément par conviction politique, mais si ça peut nous permettre de payer le savon, pourquoi pas ? Moi, ce sont les amis qui m’ont invitée à faire partie de ce bureau de vote. Et on nous donne un peu d’argent pour nous maintenir". 

T-shirts et banderoles 

Les imprimeurs, infographes et graffitistes profitent aussi de la campagne. Rodrigue Alladoum, détenteur d’une petite imprimerie implantée chez lui au quartier Moursal, assure que "c’est vraiment une bonne période de business. Le chiffre d’affaires que j’ai réalisé en une semaine dépasse de loin mes revenus de deux à trois mois. Ici, j’imprime pour tous les partis politiques. Nous produisons jusqu’à 500 tee-shirts et une centaine de banderoles par jour". 

Outre les jeunes, les personnes âgées, dont des ministres et anciens ministres, se joignent à ces activités. Certains louent une partie de leur domicile pour l’ouverture de bureaux de soutien, d’autres sont même propriétaires de cellules de soutien créées à l’occasion de cette campagne partout dans la ville.  

Au Rwanda, anciens bourreaux et victimes cohabitent

Lorsque le génocide contre les tutsis a commencé en 1994, Frederick Kazimungu et Tharcien Nkundiye, tous deux hutus, ont activement participé au massacre de leurs voisins tutsis, avec lesquels ils vivaient en paix depuis de nombreuses années.

Nous étions en avril 1994. Mais désormais, les deux hommes, âgés aujourd’hui respectivement de 56 et 74 ans, cohabitent avec les survivants du génocide.

Les villages dits de réconciliation

Frederick et Tharcien, ont été reconnus coupables et condamnés à de lourdes peines de prison, mais après avoir demandé officiellement pardon, ils ont été libérés au bout de neuf ans.

Les deux hommes vivent désormais à Mbyo, un village situé à 40 kilomètres de la capitale, Kigali. C'est l'un des six villages dits de réconciliation où ex-bourreaux et survivants du génocide vivent ensemble.

Au moins 400 personnes, hutus et tutsis, habitent dans ce village qui est à l’image d’autres villages ordinaires au Rwanda, avec des maisons aux toits de tôle situées sur de petites parcelles adjacentes aux terres agricoles.

L’ancien groupe rebelle du président Paul Kagame, le Front patriotique rwandais, dirigé par les tutsis, a pris en 1994 le pouvoir après 100 jours de massacre, et il dirige depuis le Rwanda sans partage.

Commémoration des 30 ans du génocide rwandais.
A Kigali le 7 avril, près de 5000 personnes ainsi que des personnalités de haut niveau se sont rassemblés afin de commémorer le 30e anniversaire du début du génocide. null Jean Bizimana/REUTERS

Des témoignages émouvants

"J'ai plaidé coupable et demandé pardon aux survivants, dont j'ai tué les membres de la famille, et maintenant nous vivons en paix. Nous ne nous identifions plus selon des critères ethniques", explique Tharcien.

Tharcien dit que "personne ne m'a forcé à me réconcilier. Ceux qui vivent hors du Rwanda et qui pensent que nous avons été forcés, veulent ternir l'image du Rwanda."

Il explique qu’"en prison, j'ai envoyé une lettre à Anastasie, détaillant comment j'ai tué les membres de sa famille et en lui demandant pardon", poursuit-il, précisant que "les auteurs qui ont refusé jusqu'à présent d'admettre leur rôle dans le génocide devraient l’avouer, et peut-être qu’ils pourraient être libérés."

Comme Tharcien, Frederick, aujourd'hui père de sept enfants, a demandé aussi pardon et a été libéré de prison. Cependant, il reproche à l'ancien gouvernement d'avoir poussé des civils comme lui à tuer leurs voisins tutsis.

"Depuis l'enfance, on nous disait que les tutsis étaient nos ennemis et qu'ils colonisaient les hutus depuis longtemps. Alors, lorsque les massacres ont commencé, nous avons dû tuer les tutsis", explique-t-il.

Des photos des victimes du génocide rwandais de 1994
Le Rwanda a commémoré les 30 ans du génocide des tutsi. Le devoir de mémoire semble toujours au centre d’une politique d’union nationale. null Ben Curtis/AP Photo/picture alliance

Une difficile cohabitation

Silas Usengimuremyi et Anastasie Mukamusoni – survivants du génocide et voisins des deux hommes qui ont tué des membres de leur famille – affirment qu'ils se sont réconciliés avec les auteurs du génocide grâce aux efforts du gouvernement.

Anastasie se souvient des tutsis impuissants face aux hutus qu'elle avait vus à un barrage routier, près du village de Mbyo. En 1994, elle avait 20 ans.

Tharcien a tué le premier mari d'Anastasie, mais maintenant ils sont voisins et s'entraident en cas de besoin. "Quand j'ai besoin d'aide, Tharcien est toujours disponible", déclare Anastasie.

"Je détestais tellement les hutus que je ne pouvais pas accepter de les rencontrer", précise-t-elle, ajoutant qu'il lui a fallu beaucoup de temps "pour penser que je pouvais interagir avec un hutu".

Au début, Anastasie n'appréciait pas l'idée que les auteurs de ces crimes retournent dans leur communauté. Mais maintenant, elle doit vivre avec eux dans le même village de réconciliation de Mbyo, que certains Rwandais citent comme exemple en matière de vivre-ensemble, 30 ans après le génocide.

Comme Anastasie, Silas confirme qu'au début, il était difficile de pardonner aux auteurs de l’assassinat de son père et d'autres membres de sa famille, pendant le génocide.

 

Volker Türk "préoccupé'' par la peine de mort en RDC

Le Haut-commissaire Volker Turk a visité des camps de personnes déplacées à Bunia, dans la province de l'Ituri, et à Goma, chef-lieu de la province voisine du Nord-Kivu. Il a relevé que la préoccupation immédiate des populations touchées par le conflit est leur sécurité. Volker Turk s'est déclaré inquiet quant au sort des populations une fois les forces onusiennes se retiraient précipitamment de la RDC.

"Les autorités congolaises et la communauté internationale doivent continuer à travailler en partenariat pour éviter un vide de protection qui mettrait davantage en danger les civils. J'ai de réelles inquiétudes quant à ce qui pourrait arriver aux civils en cas de retrait précipité de la Monusco.", a regretté Türk. 

''La peine de mort devrait être abolie partout''

 Les Nations unies sont très claires, elles souhaitent l'abolition de la peine de mort partout dans le monde a dit Volker Türk lors de sa rencontre avec le président Félix Tshisekedi à Kinshasa
Les Nations unies sont très claires, elles souhaitent l'abolition de la peine de mort partout dans le monde a dit Volker Türk lors de sa rencontre avec le président Félix Tshisekedi à Kinshasanull Congo Presidency Press Unit

La visite du Haut-commissaire des Nations-Unies aux droits de l'homme est survenue quelques semaines après que les autorités congolaises ont décidé de lever le moratoire sur la peine de mort. Volker Turk a bien précisé que les Nations unies s'y opposent.

"Je suis préoccupé par la récente décision du gouvernement de lever le moratoire sur l'application de la peine de mort. Les Nations Unies sont claires à ce sujet. La peine de mort devrait être abolie partout dans le monde.", a-t- il dit. 

 Le 15 mars, le gouvernement a annoncé sa décision de lever le moratoire sur l'exécution de la peine de mort qui était en vigueur depuis plus de 20 ans dans le pays.  Il expliquait que cette mesure ciblait les militaires accusés de trahison, alors que la province du Nord-Kivu, dans l'est de la RDC, est en proie à la rébellion du M23 ("Mouvement du 23 mars") qui, soutenue par l'armée rwandaise, occupe de larges pans de territoire. 

Elle vise aussi les auteurs de "banditisme urbain ayant entraîné mort d'homme", ajoutait-il. Cette décision a aussitôt été vivement critiquée par les organisations de défense des droits humains.

Rencontre avec la société civile 

Au cours de sa mission, le Haut-commissaire a échangé avec des défenseurs des droits humains et une délégation de partis politiques de l'opposition. Avant de quitter Kinshasa, il a rencontré la nouvelle Première ministre Judith Suminwa et a été reçu par le président Félix Tshisekedi.

Une conférence pour la paix au Cameroun

La conférence se tient à Maroua, capitale régionale de l'extrême-nord du Cameroun. Elle est soutenue par la fondation allemande Friedrich Ebert. L'objectif est de constater l’ampleur des conséquences de l’insécurité à la frontière entre le Cameroun et le Nigeria, et tenter de recenser les besoins des personnes déplacées. À peine arrivée dans la ville de Maroua, la délégation de la plateforme de la convention nationale des femmes pour la paix au Cameroun, met le cap sur Minawao, village situé à la frontière nord du Cameroun avec le Nigeria.

Environ un demi-million de femmes et de filles du pays ont été victimes de viol et d'autres formes de violence sexuelle au Cameroun
Un réseau de « tantes » aide les survivantes de viol au Cameroun null Elisabeth Asen Somo/DW

Ici, plus de 70.000 réfugiés sont hébergés. Beaucoup ont fui la violence de la secte islamiste Boko Haram au Nigeria.

Lydie, 20 ans, a déjà passé la moitié de sa vie dans le camp de Minawao.

La conférence est initié  par la plateforme de la convention nationale des femmes pour la paix au Cameroun
À Maroua, les femmes participent á une conférence sur la paixnull Elisabeth Asen/DW

"Quand les troubles ont commencé, tout le monde partait chercher où se réfugier. Moi j'ai suivi ces personnes-là. Nous avons marché pendant deux jours et demi pour arriver jusqu'ici. Depuis dix ans ici, la vie est difficile. J'ai mangé hier mais aujourd'hui non, il n'y a plus de provisions", témoigne la jeune femme.

Dans ce camp de réfugiés, les témoignages sont poignants et se ressemblent.

"Nous avons vu des femmes et des filles déplacées et réfugiées qui ont perdu leurs maisons, leurs villages, elles n'ont plus d' avenir et ça c'est tragique. En plus, elles sont traumatisées, elles ont vu comment leurs enfants, leurs maris ont été tués…maintenant elles se retrouvent dans une communauté autre, elles n'ont rien à faire, pas de formation. Elles ne savent pas comment se loger, comment se nourrir…c'est la situation sécuritaire qui est difficile, la situation alimentaire difficile et c'est surtout la situation psychosociale qui est très difficile", affirme Nina Netzer est chargée du Cameroun et de l’Afrique centrale pour la fondation Friedrich Ebert.

Aide

Face à une telle situation, les membres de la convention nationale des femmes pour la paix

veulent aider les femmes et les enfants qui vivent ici.

Le reportage à Maroua de Élisabeth Asen

"Les femmes ont appelé à ce qu'il y ait plus de centres psychosociaux dans tous les départements de notre région. Et donc nous avons formulé des recommandations dans le sens de renforcer ou de développer une collaboration avec les instances étatiques pour pouvoir apporter notre contribution"  soutient Aissa Doumara coordinatrice régionale de l'association  de lutte contre les violences faites aux femmes dans l'extrême-nord.

Entre décembre 2023 et janvier 2024, 7.000 personnes ont été déplacées à la suite des attaques des groupes armés non-étatiques dans la région, d’après un rapport conjoint de l’Onu et d’autres organisations humanitaires. Comme les groupes armés continuent de semer la terreur dans cette partie frontalière avec le Nigéria, d’autres arrivées ne sont pas à exclure.