Des morts et des blessés par des obus à Goma en RDC

En République démocratique du Congo, alors que la prise par les rebelles du M23 de la ville minière de Rubaya, dans le Masisi, se confirme, les combats continuent dans les faubourgs de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Ce vendredi matin encore des obus sont tombés sur des sites de déplacés, faisant plusieurs morts et des dizaines de blessés et entraînant ainsi la colère des déplacés.

Attaque de l'armée et répliques des rebelles

Tout a commencé aux alentours de 9h. L'armée congolaise, en bordure de Goma, a fait feu vers les collines entourant la ville de Saké, où se trouvent les rebelles du M23, "ce qui a permis la destruction de dépôts d'armements et de munitions de l'ennemi", a communiqué le gouvernorat du Nord-Kivu. La réplique ne s'est pas fait attendre, entre quatre et cinq obus sont tombés sur plusieurs sites de déplacés et dans leurs alentours, confirme une source sécuritaire. Ce qu'atteste par ailleurs Fidèle Bahati, présent sur les lieux. "Ici, les bombardements des M23 nous ont atteint", raconte-t-il à la DW. "Nous sommes fâchés. Nos voisins et nos frères sont morts ici. On a eu plusieurs bombardements, cinq environ."

"On partageait la bière, mais maintenant, il est mort", raconte un autre homme qui vient de perdre son frère. "C'était un volontaire. Alors les bombes là, pourquoi ne pas les diriger vers l'ennemi, au lieu de les envoyer dans les camps de déplacés." Des déplacés qui ont laissés éclaté leur colère.

Appels à l'armée 

De nombreux barrages ont été dressés sur la route entre Goma et Saké et des jeunes, prêts à en découdre, se sont emparés de bâtons, notamment pour empêcher l'armée de répliquer à nouveau. Car non loin du camp de déplacés sont positionnées les pièces d'artillerie de l'armée, qui font feu sur les rebelles du M23.

"La recommandation est que nos forces arrêtent de lancer des bombes au niveau des collines où se trouvent le M23", insiste Héritier Kakule, résident du site de déplacés de Mugunga. "Vous l'avez vu, il y a des gens qui ont trouvé la mort. Des enfants… il y a beaucoup de pertes en vie humaine." Pour l’heure, aucun bilan exact n’a été donné. Les témoins parlant de plus de dix morts, dont des enfants, y compris quatre ayant succombé à leurs blessures sur la route pour l’hôpital du CICR, qui a pris en charge 27 blessés. 

 

Au siège de l'Onu, nouvelle passe d'armes entre Kinshasa et Kigali

L'envoyé spécial du secrétaire général pour la région des Grands Lacs, Huang Xia, a exprimé sa "vive préoccupation devant l'aggravation du conflit et la détérioration alarmante des conditions humanitaires dans la région". Il a appelé à la désescalade, notant une intensification des tensions entre les deux pays, illustrée par les affrontements récurrents entre le M23 et les FARDC.

Échanges d'amabilités

Autour de la table des discussions, les voisins rivaux n'ont rien fait pour calmer la tension. Ernest Rwamucyo, le représentant du Rwanda donne le ton :

"Il est surprenant que certains acteurs connaissent bien la réalité mais continuent de l'ignorer et font même progresser un discours marqué par des préjudices, ciblant le gouvernement de Rwanda", a-t-il déclaré. "C'est un déni systématique et cela revient à protéger les génocidaires

La réponse de Zénon Mukongo Ngoy, le représentant permanent de la RDC auprès de l'ONU ne s'est pas faite attendre : "Nous, nous avons toujours contribué au maintien de la paix en respectant nos accords", a-t-il soutenu. "Mais le Rwanda n'a jamais rien respecté. La preuve est que les troupes rwandaises se trouvent sur le territoire congolais pendant que nous parlons ici. Le représentant des États-Unis a bien fait de demander au Rwanda de retirer ses troupes du terriritoire de la RDC. Ils ne le font pas mais ils viennent brandir le génocide, le discours de la haine. On ne les écoutera pas éternellement”.

"Ce qu'il faut, ce sont des sanctions" (Henri-Désiré Nzouzi)

Sanctions contre le Rwanda

Pour l'analyste géopolitique, Henri-Désiré Nzouzi, il y a nécessité pour le Conseil de sécurité de sévir. 

"Au-delà des condamnations de certains pays pris individuellement, appelant notamment au retrait des troupes rwandaises, ce qu'il faut, ce sont des sanctions qui puissent contraindre Kigali de retirer ses troupes de RDC. Aujourd'hui, en 2024, aucun pays souverain ne peut accepter de négocier avec un autre Etat ayant déployé des troupes sur son territoire. Et je vous donne un exemple très simple: ce qui se passe à l'heure actuelle en Ukraine” .

La réunion d'hier s'est pourtant achevée sans qu'aucune résolution concrète ne soit adoptée.

 

Les Banyamulenge auraient aimé voir rester la Monusco

En République démocratique du Congo, la composante militaire de la Monusco, la plus ancienne des missions de maintien de la paix, est sur le point de quitter pour de bon la province du Sud-Kivu

Une première étape dans le désengagement de la mission, qui devra ensuite se retirer du Nord-Kivu puis de l'Ituri, deux autres provinces de l'est du pays. Pour rappel, cette page onusienne se tourne à la demande du gouvernement congolais, notamment après plusieurs manifestations violentes contre la présence de la Monusco, à laquelle certains Congolais reprochaient son inaction face aux groupes armés.

Mais est-ce que tous les Congolais sont aujourd'hui satisfaits de cette décision ? Dans le Sud-Kivu, certaines communautés comme les Banyamulenge se sentent encore menacées.

Des hommes et femmes banyamulenge de dos, dans les collines du Sud-Kivu (archive de 2020)
De nombreux Banyamulenge ont dû quitter leur domicile à cause des groupes armésnull Alexis Huguet/AFP/Getty Images

La peur du retour des attaques

Mikenge, sur les hauts plateaux du Sud-Kivu. En contrebas du village, se trouve un site de déplacés de 2.500 personnes, toutes appartenant à la communauté banyamulenge, des Congolais rwandophones.

Philémon Chiza en fait partie. Il témoigne de l'insécurité qui les a poussés à fuir leur lieu de vie : "C'est la guerre. Les maï-maï (des milices d'autodéfense dont certaines se sont transformées en groupes criminels, ndlr) nous ont attaqués dans notre village. Ils nous ont ravi nos bêtes, toutes les richesses que nous avions. C'est pourquoi nous sommes venus ici, proches de la Monusco."

Ce que ce pasteur de 64 ans craint, c'est le retour de la violence dans la région, bien qu'à l'heure actuelle, les relations avec les autres communautés soient apaisées dans Mikenge et ses alentours. 

Un milicien maï-maï dans un champ (archive)
Les populations banyamulenge se sentent toujours menacées par la présence de groupes armés comme les maï-maïnull Phil Moore/AFP/Getty Images

Car depuis 2017, les tensions entre les quatre ethnies occupant les hauts-plateaux ont repris de plus belle et les Banyamulenge sont au centre. Souvent affiliés aux Tutsis rwandais, la plupart des habitants des environs les considèrent comme des étrangers. Ce que réfute Philémon Chiza : "Je suis né ici. Mon papa est né ici. Le papa de mon papa, donc mon grand-père est né ici. Je suis Congolais."

Liens avec le Rwanda ?

Seulement voilà, un nouvel élément pourrait raviver la flamme de la haine envers les Banyamulenge. Dans leur rapport de janvier 2024, les experts des Nations unies ont établi un lien entre le M23, soutenu par le Rwanda, et les Twirwanehos, le principal groupe d'autodéfense des Banyamulenge. 

Des connexions prouvées, selon Josaphat Musamba, chercheur et  spécialiste des dynamiques des groupes armés dans le Sud Kivu. Pour autant, si le soutien du M23 aux twirwanehos n'est pas surprenant,  des rumeurs d'alliance du M23 avec le chef de guerre Ebuela, qui se bat pour le départ des Banyamulenge, poussent sur les cimes des hauts plateaux.

Cette alliance contre-nature n'est pourtant pas impossible pour le chercheur Josaphat Musamba : "Ce qui est antinomique par rapport à ce que l'on sait, mais pas impossible", estime-t-il, avant de constater que "les changements et recompositions d'alliances dans ces zones-là jouent beaucoup."

Quoiqu'il en soit, le chercheur craint que, après le départ de la Monusco, les groupes armés présents dans la région des hauts-plateaux se réapproprient de nouveau l'espace au détriment des populations civiles. 

Niger : bientôt le bye-bye des soldats américains

Les milliers de soldats américains au Niger, qui constituent une force de renseignement et de lutte contre le terrorisme, vont très bientôt quitter le Niger. Ce qui suppose, selon Moussa Moumouni, stratège en matière de lutte contre le terrorisme, l’ultime étape du démantèlement de l’alliance internationale antiterroriste. Pour l'expert, le départ des troupes américaines du Niger est "une catastrophe pour le Niger en particulier et pour le Sahel en général".

Le départ des Américains est précédé par celui des militaires français. "Après les Français, c’est au tour maintenant des Américains de plier bagages et de partir, alors même que la coopération avec la France et les Etats Unis nous ont permis d’avoir des résultats positifs face aux terroristes", regrette Moussa Moumouni.

Des manifestants tenant une pencarte sur laquelle est écrit : "Armée américaine, tu pars tu bouges. Pas de Bonus ni negociation. "
Des manifestations ont eu lieu à l'appel d'un collectif de 24 associations de la société civile soutenant le régime militaire.null AFP

Des manifestations pour un départ immédiat

Dans la région d'Agadez, où se trouve la base militaire américaine, des milliers de personnes ont manifesté dimanche (21.04) pour exiger le départ sans délai des soldats américains.

Pour eux, leur présence n’a rien apporté à la région et au pays. "Comme nous l’avons toujours dit, cette base américaine n’a aucune utilité, et personne, aucun nigérien, ne peut vous dire ce qui se passe à l’intérieur de cette base. Donc ça c’est une humiliation vis-à-vis de notre peuple", explique Slimane Ag Ibrahim, activiste de la société civile d’Agadez.

"Et ils n’ont fait aucune réalisation pour la population locale d’Agadez, aucune, même pas un forage, une école ou quoi que ce soit", conclut l'activiste.

Une délégation américaine est attendue au Niger dans les prochains jours pour s'accorder sur les détails du retrait de ces soldats engagés dans la lutte antijihadiste au Sahel.

Les explications d'Abdoulkarim Mahamadou

Désormais, il revient à l’armée nigérienne de combattre le terrorisme sur le territoire et aux armées de l’espace sahélo-saharien au-delà de l’Alliance des Etats du Sahel de mutualiser leurs forces à travers les mécanismes existants pour lutter contre le terrorisme, estime Abdoulaye Seydou, président du mouvement M62.

Il cite l'example du "CEMOC (Comité d'Etat-Major Opérationnel Conjoint) qu’il faut redynamiser et renforcer qui regroupe l’Algérie, la Mauritanie, le Niger et le Mali. Et de l’autre côté dans la zone des 3 frontières vous avez l’Alliance des Etats du Sahel qui est l’AES." 

Selon certains experts, tout porte à croire que la junte au pouvoir joue la carte de la Russie pour lutter contre le terrorisme, ce qui pour un observateur n’a apporté aucune plus-value au Mali qui s’est alloué les services du groupe de mercenaires Wagner.

Libye : l'envoyé de l'Onu Abdoulaye Bathily jette l'éponge

Des élections présidentielle et législatives libyennes étaient prévues en décembre 2021, mais avaient été reportées sine die en raison de divergences entre les deux camps qui revendiquent la direction du pays : le gouvernement reconnu par l'Onu de Tripoli, dirigé par Abdelhamid Dbeibah, et le maréchal Haftar à Benghazi.

Abdoulaye Bathily a dénoncé le manque de volonté politique et de bonne foi des dirigeants libyens qui se satisferaient, selon lui, de l'impasse actuelle.

"Le pays d'origine de l'envoyé spécial est important"

Pour Tim Eaton, chercheur principal au think tank Chatham House, basé à Londres, le départ du Sénégalais Abdoulaye Bathily n'est pas surprenant, pour la simple raison que le processus qu'il menait depuis plusieurs mois était déjà exsangue.

"Nous avons constaté, au fil du temps, parmi les nombreux envoyés spéciaux, que son aura joue pour beaucoup. De même, le pays d'origine de l'envoyé spécial est important."

Virginie Collombier, professeur à la Luiss School of government de Rome et coéditrice du livre Violence et transformation sociale en Libye, estime pour sa part que la démission d'Abdoulaye Bathily n'aura pas beaucoup d'impact sur la situation déjà précaire en Libye.

Selon elle, "au cours de l'année écoulée, Bathily s'est concentré sur cette sorte de diplomatie de la navette, essayant de convaincre les principales parties au conflit à se rencontrer. Il n'a jamais réussi à les réunir. Et il est clair qu'il n'avait que très peu de moyens de pression sur les parties au conflit. Je ne pense pas que cela aura donc un quelconque impact.''

Des efforts sapés par les acteurs régionaux

La Libye est en effet gouverné par deux exécutifs rivaux
La Libye est en effet gouverné par deux exécutifs rivauxnull UNITED NATIONS/AFP

Le désormais ancien envoyé spécial de l'Onu a également pointé du doigt, sans les nommer, les soutiens étrangers des deux camps rivaux.

Depuis le début de la guerre, plusieurs Etats ont soutenu les deux camps antagonistes, parfois jusqu'à l'envoi de mercenaires en Libye : la Turquie et le Qatar à l'Ouest (Tripoli), la Russie, l'Arabie Saoudite et l'Egypte à l'Est (Benghazi).

Selon Claudia Gazzini, analyste principale de l'International Crisis Group pour la Libye, il ne s'agit pas seulement de la responsabilité des acteurs libyens, mais aussi de l'Onu.

"Pourquoi y a-t-il une situation de  tension ou un manque de progrès sur la scène politique ? Je pense que Bathily a une part de responsabilité dans la situation actuelle parce qu'il a conçu un processus de négociation qui est entièrement entre les mains des acteurs libyens qui sont au pouvoir", affirme Claudia Gazzani.

En attendant un successeur, c'est l'Américaine Stephanie Koury, désignée en mars comme adjointe d'Abdoulaye Bathily pour les affaires politiques, qui assurera l'intérim. Un remake du scénario du mandat intérimaire de sa compatriote Stephanie Williams, après le départ en mars 2020 de l'ancien émissaire, Ghassan Salamé.

La mobilisation générale reconduite pour un an au Burkina

Au Burkina Faso, le décret de mobilisation générale et de mise en garde a été prolongé. Cette mesure, qui permet d’enrôler, parfois de force, les Burkinabè, devait prendre fin ce jeudi (18.04), mais elle a été reconduite pour une durée d’un an.  

La décision vise, selon les autorités militaires au pouvoir, à "consolider les acquis" de la lutte contre le terrorisme.  

Mais un an après, le constat est plutôt négatif : la mobilisation générale divise l’opinion publique burkinabè, notamment parce qu’elle permet les enrôlements forcés qui ont touché un certain nombre d’opposants politiques.  

A ceci s’ajoute la peur des arrestations et des enlèvements. Certaines familles n’ont plus de nouvelles de leurs proches depuis des mois.  

"Acte patriotique" selon le pouvoir 

Alassane Sawadogo, coordonnateur du Front pour la défense de la patrie, le nom de la junte au pouvoir, évoque au contraire une "décision patriotique" qui permet, selon lui, de transmettre "les visions" du chef de l’Etat, le capitaine Ibrahim Traoré : 

"C’est un acte patriotique que j’apprécie beaucoup. La mobilisation générale a permis au chef de l’Etat et à son gouvernement de pouvoir travailler sans inquiétude. Si vous remarquez, les réquisitions et la suspension des activités politiques et autres, c’est grâce à la mobilisation générale et beaucoup de personnes ont pu y contribuer. Cette mobilisation est une forme de conscientisation du peuple burkinabè, afin d’adhérer aux visions du capitaine Ibrahim Traoré. C’est une nécessité."

Daouda Diallo
Le défenseur des droits humains, Daouda Diallo, avait été enlevé en décembre 2023null Sophie Garcia/AP/picture alliance

Mais pour ce Burkinabè, qui a voulu garder l’anonymat, le décret de mobilisation est perverti par les réquisitions forcées et les arrestations qui l’ont accompagné.  

Selon lui, "les actions qu’ils mènent sur le terrain sont en parfait désaccord avec les termes réels du décret et nous nous posons la question sur l’utilité de ce décret. Des gens ont osé critiquer la mauvaise gestion du pouvoir et ils ont été envoyés au front. C’est pour dire qu’à l’étape actuelle, le décret n’a plus sa raison d’être. L’exécutif prend des textes et fait ce qu’il veut."

Envoyé au front à 70 ans 

L’article 2 du décret, dit de la mobilisation générale et la mise en garde, donne le droit au gouvernement, de "requérir les personnes, les biens et les services (…) à l’emploi de défense, à titre individuel ou collectif". 

Lassané Zoromé, analyste politique, critique pour sa part l’application d’un autre article de ce décret. 

Il dit constater "les irrégularités dans son application par le passé. Au niveau de l’article 5 du décret de la mobilisation, on a dit que sont concernés, par la présente mobilisation générale, les membres des forces de défense et de sécurité, les membres des forces de défense et de sécurité en position non active, les jeunes de 18 ans ou plus, non membres des forces armées nationales, physiquement aptes, appelés à s’enrôler selon les besoins exprimés par les autorités compétentes. Alors, si on fait une interprétation de l’article 5, on se rend compte que ce n’est pas ce qui a été appliqué. On a vu, au nom de ce décret sur la mobilisation générale, des hommes de 70 ans qui ont été réquisitionnés pour aller au front. Ce sont des abus du décret." 

Enfin, l’article 8 de ce décret permet de restreindre, dans certains cas,les libertés publiques. Il confère aussi des possibilités élargies de perquisition à domicile. 

Rentrer ... ou pas en Centrafrique

Un bus soulève de la poussière alors qu'il s'éloigne du camp de réfugiés de Gado-Badzere, dans l'est du Cameroun. Il se dirige vers la République centrafricaine (RCA), située à seulement 30 kilomètres de là. A l'intérieur du bus, se trouve un groupe de près de 300 réfugiés qui ont choisi de retourner dans leur pays d'origine.

Abdel Aziz, lycéen, fait partie des rapatriés volontaires. Lui et sa mère ont fui les combats en RCA il y a cinq ans. Le père d'Aziz serait mort. Malgré l'instabilité qui persiste en Centrafrique, Aziz, qui n'a que 16 ans, est déterminé à rentrer chez lui. Il souhaite poursuivre ses études et faire partie de la solution à la crise qui frappe son pays : 

Réfugiés dans le camp de Gado-Badzere
Si certains déplacés sont disposés à rentrer volontairement en RCA, pour d'autres, la décision est plus difficile à prendre.null Etienne Mainimo/dpa/picture alliance

"Maintenant, j'aspire à devenir officier de police judiciaire pour aider à lutter contre les crimes dans la société, comme la guerre en République centrafricaine", dit le jeune homme. 

Une peur tenace

Mais pour l'heure, beaucoup ont encore trop peur de rentrer. Yolanda, dont le nom a été modifié pour des raisons de sécurité, et sa fille ne retourneront pas en RCA : "Les rebelles de la Séléka ont attaqué ma maison. Ils m'ont violée et ils ont violé ma fille de 14 ans. Puisque que j'étais chrétienne avant de me convertir à l'islam, je suis devenu une cible de la Séléka ainsi que des anti-balaka. Les deux camps me voient comme un danger pour eux."

Des organisations de défense des droits de l'Homme comme Amnesty International et Human Rights Watch ont documenté de nombreux cas de viols systématiques perpétrés par la Séléka, des rebelles à majorité musulmane, par les anti-balaka, une milice chrétienne, et par d'autres groupes armés.

Le dilemne des réfugiés centrafricains au Cameroun

S'engager pour sensibiliser 

La fille de Yolanda assure également que le retour sera difficile pour elle car elle n'a plus de famille en Centrafrique. Si la jeune fille de 14 ans étudie assidûment, c'est qu'elle envisage un avenir où elle pourra faire la différence en aidant les jeunes filles qui, comme elle, ont été victimes des dures réalités de la guerre.

"Je veux devenir conseillère municipale pour aider les jeunes filles traumatisées par la guerre. Je remercie Dieu de nous avoir protégés pour sortir vivants de cette guerre. C'est pourquoi je veux devenir conseillère municipale, pour sensibiliser les enfants à certaines choses."

En raison de la situation sécuritaire toujours instable en Centrafrique, une personne sur cinq est déplacée dans le pays.

 

Volker Türk à l'écoute des déplacés de Bulengo

Ce mercredi (17.04.2024), Volker Türk a visité le camp de déplacés de Bulengo, l'un des plus importants de la région. Situé dans la périphérie de Goma, il est peuplé de personnes déplacées ayant fui l'avancée des rebelles du M23.

Après de brefs échanges, le Haut-commissaire aux droits de l'Homme a assuré aux déplacés que des efforts seraient faits pour qu'ils puissent retourner chez eux. 

"J'ai parlé avec des personnes qui étaient chassées de leurs zones d'origine à cause de la violence, à cause des massacres, avec des viols", a-t-il déclaré. "Et ça me brise le cœur de voir des personnes qui sont déplacées, des cas de violation des droits de l'Homme en RDC et plus particulièrement en province du Nord-Kivu. Et leur grand message est qu'ils veulent la paix et veulent que cette violence et ce conflit s'arrêtent et que ceux qui ont une influence sur les parties au conflit l'utilisent pour que cette guerre s'arrête."

Deux poids, deux mesures

Les déplacés rencontrés dénoncent notamment leurs conditions de vie difficiles dans le camp. Il attendent aussi, après le passage du Haut-commissaire, que le gouvernement prenne des mesures pour qu'ils puissent enfin rentrer chez eux. Enfin, ils se sentent oubliés et déplorent le silence de la communauté internationale vis-à-vis des crimes commis dans l'est de la RDC. 

"Ce qui nous étonne dans ce monde", dit Muhindo Wasukundi, un déplacé âge d'une trentaine d'années, "c'est qu'on donne des sanctions à la Russie qui a envahi l'Ukraine, mais jamais à l'Ouganda et au Rwanda qui ont envahi la RDC à travers le M23. C'est comme si, en RDC, nous n'étions pas des personnes comme les autres. Voici la masse des gens ici, mais nous ne savons pas à quel saint nous vouer."

"C'est comme si, en RDC, nous n'étions pas des personnes comme les autres" (M. Wasukundi)

Programme chargé

Jean-Luc Bahati, défenseur des droits humains, estime que la présence de Volker Türk pourra aider les déplacés qui sont par ailleurs pris pour cible par les rebelles du M23 qui bombardent les alentours du camp : "Nous espérons qu'il va s'impliquer suffisamment et qu'il ressortira avec des recommandations qu'il demandera à notre République d'appliquer pour réduire les cas des violations des droits de l'Homme en RDC et plus particulièrement en province du Nord-Kivu."

La mission de Volker Türk, qui se poursuit jusqu'à jeudi, comprend des rencontres avec des responsables congolais pour discuter des stratégies de protection des civils et de prévention des violations des droits humains. En outre, Volker Türk prévoit de s'entretenir avec des représentants de la société civile, la Commission nationale des droits de l'Homme, ainsi que des membres de partis politiques et des représentants diplomatiques.

 

 

Israël face à la menace iranienne

À en croire un porte-parole de l'armée israélienne, Arye Sharuz Shalicar, cela fait longtemps qu'Israël se prépare à une telle confrontation. Ce faisant, les forces armées se concentrent sur trois aspects en particulier : le perfectionnement des systèmes de défense, en particulier aérienne, le développement des capacités offensives et la recherche d'alliances régionales et internationales.

Puissance similaire

Pour ce qui est de la puissance militaire, les deux pays ne sont pas très éloignés l'un de l'autre, selon le palmarès 2024 du site américain Global Firepower. Dans le classement mondial des armées les plus puissantes du monde, l'Iran occupe la 14e place, Israël la 17e.

Global Firepower a aussi comparé les deux pays : en termes d'effectifs de troupes, du nombre de chars et de véhicules armés, l'Iran est devant, mais, vu l'éloignement géographique des deux pays, cette avance n'est pas décisive – 1.850 kilomètres séparent Jérusalem et Téhéran.

Si affrontement militaire il y a, ce serait donc par les airs, estime Fabian Hinz, expert du Proche-Orient à l'Institut international des études stratégiques à Londres.

La ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu
En visite en Israël, la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a appelé toutes les parties à faire preuve de "retenue".null Ilia Yefimovich/dpa/picture alliance

Une guerre dans le ciel 

Toujours selon le Global Firepower, il est clairement en faveur d'Israël. Mais au-delà des chiffres, c'est bien-sûr aussi la qualité des avions militaires qui joue un rôle essentiel, voire même déterminant en ce qui concerne Israël, dit encore Fabian Hinz - les sanctions internationales qui pèsent sur l'Iran n'ayant pas permis à la République islamique de moderniser récemment sa flotte aérienne.

Cela explique aussi pourquoi Téhéran s'est davantage concentré sur le développement de drones et de missiles. L'expert du Proche-Orient doute cependant que l'Iran soit en mesure de repousser une attaque aérienne israélienne.

Cela dit, samedi dernier, Israël a aussi compris que Téhéran était en mesure d'envoyer un très grand nombre de drones sur son territoire - 350 - et le soutien de plusieurs alliés, dont les Etats-Unis, a été nécessaire pour repousser l'attaque.

De la fumée s'élève après des frappes aériennes israéliennes à Khiam, au Liban, le 7 février 2024.
Un affrontement de grande ampleur avec le Hezbollah, armé et financé par l'Iran, pourrait représenter un réel défi pour l'armée israélienne null Taher Abu Hamdan/Xinhua/picture alliance

La menace du Hezbollah

Le mouvement libanais est effectivement souvent qualifié de "fer de lance de l'Iran". Il est en tout cas le groupe non étatique le plus armé au monde, selon une étude du CSIS, le Centre d'études stratégiques et internationales, basé à Washington. Son aile militaire est qualifiée d'organisation terroriste par l'Union européenne.

Selon les estimations concernant les stocks de missiles du Hezbollah, ceux-ci varient entre 120.000 et 200.000, des projectiles à courte mais aussi à longue portée. En cas d'affrontement avec Israël, l'Iran pourrait réapprovisionner rapidement la milice, estime le CSIS. Et ce serait l'ensemble du territoire israélien qui serait alors menacé, depuis le Liban, mais aussi, potentiellement, depuis la Syrie où le Hezbollah est également implanté.

Auteure : Karsten Knipp 

"C'est triste car la plupart des Libyens veulent sortir de cette galère !"

C'est d'abord de sa déception dont Abdoulaye Bathily a fait part au Conseil de sécurité.

L'émissaire des Nations unies pour la Libye a démissionné hier (16.04.2024) de ses fonctions. Selon lui, l'Onu ne peut pas réussir à stabiliser le pays tant que les dirigeants libyens placent "leurs intérêts personnels au-dessus des besoins du pays". Avec cette nouvelle démission d'un émissaire de l'Onu, les espoirs de paix s'éloignent encore un peu plus.

Des bâtons dans les roues de l'Onu

"J'ai présenté ma démission au secrétaire général et je lui en ai exposé les diverses raisons", a annoncé Abdoulaye Bathily, confirmant devant la presse son départ de la Manul, la Mission des Nations unies en Libye.

Selon lui, de nombreux efforts ont été entrepris sous sa direction, ces 18 derniers mois, mais le manque de volonté politique lui a mis des bâtons dans les roues.

"Nous avons assisté, ces derniers mois, au développement d'initiatives parallèles dont l'objectif - même s'il n'est pas déclaré - est de perturber le processus mené par les Nations unies.", a-t-il déclaré.

Abdoulaye Bathily d'ajouter : "C'est très triste, d'autant que la majeure partie de la population libyenne veut sortir de cette galère. Des Libyens sont venus me voir et m'ont demandé une formule qui passerait outre les dirigeants qui ne veulent pas mettre fin à la crise du pays, qui veulent prolonger leurs souffrances."

A Darna, en Libye, un homme est assis sur un bâtiment en ruines (photo de 2023)
La Libye, en guerre civile depuis 2011, est en ruinesnull KARIM SAHIB/AFP

La rivalité entre deux hommes

Deux hommes se disputent la tête de l'exécutif libyen : le gouvernement reconnu par l'Onu est celui basé dans l'Ouest, à Tripoli, et dirigé par Abdelhamid Dbeibah. L'autre, qui siège dans l'Est, à Benghazi, est celui du maréchal Haftar.

La lutte entre ces deux camps  est déjà venue à bout du prédécesseur d'Abdoulaye Bathily, Jan Kurbis. Celui-ci a démissionné en novembre 2021. Avant lui, déjà, le cinquième émissaire de l'Onu pour la Libye, Ghassan Salamé, avait aussi jeté l'éponge, en mars 2020.

La Libye est plongée dans la guerre civile depuis l'intervention militaire franco-britannique soutenue par l'Otan, en 2011, et le renversement de Mouammar Kadhafi.

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Pas de démocratie en vue

"On nous a promis la démocratie en 2011. Mais il n'y a aucune démocratie à l'horizon", constate Abdoulaye Bathily, amer.

"Tant que nous compterons sur les soi-disant dirigeants libyens, nous ne pourrons pas trouver de solution, car leur légitimité est remise en question. La Chambre des représentants a été élue en 2014. Cela fait dix ans maintenant. Nous parlons de légitimité alors que les mandats ont expiré. Le Haut Conseil d'Etat a été élu en 2012. Nous sommes en 2024 !"

Evidemment, ces déclarations n'ont pas plus à Taher al-Sunni, ambassadeur de la Libye près l'Onu qui lui a rétorqué : "Mes mots s'adressent à ceux qui brandissent des slogans de justice et les droits humains comme étendard. Parce que nous continuons d'en entendre certains qui continuent à nous faire la morale et à critiquer la situation dans notre pays, à nous donner des leçons sur les principes d'humanité et de démocratie, tout en fermant les yeux sur les scènes de tuerie et de destruction à Gaza, tout en faisant la sourde oreille aux cris des enfants et des femmes ensevelis sous les décombres."

Mais pour Abdoulaye Bathily, les dirigeants libyens font preuve de "mauvaise volonté" : "Dans les circonstances actuelles, il n'est pas possible pour l'Onu d'être couronnée de succès. Ils freinent toute tentative de solution."

Et il appelle les Nations unies à se préoccuper davantage de la population libyenne :

"Les dirigeants libyens doivent parvenir à un règlement politique de la crise, basé sur des négociations et des compromis. Nous ne pouvons pas permettre que les aspirations de 2,8 millions d'électeurs libyens inscrits sur les listes électorales soient éclipsées par les intérêts égoïstes de quelques-uns. J'appelle le Conseil [de sécurité] à prendre en compte les rêves légitimes [des civils libyens]".

Depuis le début de la guerre, des puissances étrangères ont soutenu les deux camps antagonistes, parfois jusqu'à l'envoi de mercenaires en Libye : la Turquie et le Qatar à l'ouest, la Russie, l'Arabie Saoudite et l'Egypte à l'est.

Journée ville morte à Beni en RDC

Les habitants de la ville de Beni, soutenus par les organisations de la société civile, ont décrété deux journées "ville morte" pour protester contre l’augmentation des attaques de groupes armés durant les quatre dernières semaines. 

Depuis vendredi dernier, une vingtaine de personnes ont ainsi été tuées à Beni, mais aussi aux abords de la ville, au cours de deux attaques attribuées aux rebelles ougandais ADF, affiliés au groupe Etat islamique. Mais le bilan pourrait être plus élevé.

Ce mardi (16.04.2024), la majorité des commerces de la ville sont donc restés fermés, notamment au marché central de Kilokwa.

Les écoles et les taxis-motos ont suivi le mouvement. Un sit-in a même été organisé par des jeunes gens devant la mairie de Beni, mais le maire a refusé de les recevoir. 

Opération militaire contre les groupes armés à Beni le 11 décembre 2021
L'armée congolaise peine à neutraliser les groupes armés dans l'est du paysnull Alain Uaykani/Xinhua News Agency/picture alliance

Le correspondant de la DW dans la région, John Kanyunyu, a recueilli les témoignages de quelques habitants de Beni. 

"Les autorités de la ville de Beni et tous ceux qui suivent la question de la guerre ici ne démontrent pas leurs capacités sur le terrain, ce qui provoque le soulèvement de la population. La population estime qu'avec ce soulèvement, elle poussera les autorités à mieux faire leur travail et à ramener la paix dans la ville de Beni, comme ce fut le cas dans le passé", dit un habitant.

"Dans quelle ville nous vivons ?"

Un autre habitant de Beni joint par la DW s'interroge : "Dans quel pays et dans quelle ville nous vivons, où une trentaine de personnes sont tuées et personne n'en parle, même pas le maire de la ville ? Il est donc nécessaire que nous organisions cela pour interpeller la conscience des autorités et leur faire savoir que nous sommes fatigués de ces bêtises."

Soldats congolais et ougandais à beni dans l'est de la RDc, le 8 décembre 2021
L'armée congolaise est accusée d'inéfficacité face aux groupes armésnull Alain Uaykani/Xinhua/picture alliance

Très remonté contre les autorités, il ajoute que "l'objectif ici est de pouvoir appeler les députés, le caucus des députés du Nord-Kivu, tous ces élus du Nord-Kivu et même ces représentants, les quatre ministres qui viennent de notre communauté nande. Pour que nous revenions à Beni et que nous en discutions entre nous. Donc, ce sera comme une question de dialogue entre nous pour dire les vérités. Pouvons-nous nous désolidariser du gouvernement ? C'est notre objectif, car nous ne devons pas nous prévaloir d'être dans un gouvernement qui ne voit pas le malheur de sa population."

Enfin, cet autre habitant de Beni estime que," s'il arrivait qu'après ces deux jours de ville morte, nous ayons quand même quelque chose qui pourrait nous amener la paix dans les jours à venir, nous sommes d'accord et nous le ferons tous ensemble."

Des manifestants, surtout des jeunes, ont bloqué plusieurs rues et avenues dans les communes de Bungulu et de Mulekera.

Le mouvement de grève va se poursuivre ce mercredi selon les organisateurs. 

Situation sécuritaire toujours préoccupante en Ituri en RDC

Sur le terrain, les habitants réclament donc, mais ce n’est pas la première fois, des mesures énergiques de la part de l’armée congolaise.

Les attaques les plus meurtrières sont celles de Lodjo et Galay, en territoire de Djugu, conduites par la Coopérative pour le développement du Congo, la Codéco, qui ont fait plus de 30 morts, les 6 et 14 avril derniers. 

Une dizaine de personnes ont été par ailleurs récemment tuées par les rebelles ougandais des ADF dans la région d'Otomabere en Irumu. 

Sarah Baenga, une habitante de la ville de Bunia, veut que les autorités soient plus efficaces dans la protection des populations civiles.

"Je déplore de voir que ces massacres contre les civils continuent. J'ai l'impression que les autorités favorisent plus l'aspect négociation avec les groupes armés, mais malheureusement ces derniers continuent à endeuiller la province. Nous voulons la paix, nous voulons voir l'armée passer à l’offensive contre ces miliciens qui nous tuent", explique Sarah Baenga.

La situation sécuritaire à Djugu en Ituri

Interdire l'exploitation de l'or

Luc Malembe, un autre habitant de Bunia, préconise l'interdiction momentanée de l'exploitation de l'or à Djugu, qui serait, selon lui, à l’origine des violences armées dans la région.

"La guerre à Djugu, c'est le combat des sites miniers et malheureusement, c'est la population civile qui en paye le prix. On ne pourra pas régler la question de Djugu tant qu'on laissera les groupes armés prendre le contrôle de l'or. L'or est une matière  hautement stratégique et les pays qui nous entourent en tirent profit. C'est comme ça que les groupes armés ne manquent jamais d'armes et munitions", estime Luc Malembe.

Des hommes de la Codéco le 13 janvier 2022 dans le village de Linga en Ituri
La Codéco est une milice qui affirme protéger la tribu Lendu face à la tribu Hemanull ALEXIS HUGUET/AFP

Porte ouverte à la négociation

L’armée congolaise reconnaît que cette zone minière est devenue l'épicentre des violences.

D'après son porte-parole en Ituri, le lieutenant Jules Ngongo, les autorités militaires, qui gouvernent la province de l’Ituri sous état de siège, se heurtent à une résistance dans les sites miniers, où la présence militaire est interdite par la loi. Celui-ci explique que l’armée laisse toutefois la porte ouverte à la négociation.

"Les forces armées sous commandement du lieutenant général Luboya sont déterminées. Là où il faut utiliser l'approche militaire, nous le faisons pour contraindre ceux-là (les groupes armés) à déposer les armes et à ses rendre aux forces armées. Là où il faut appliquer l'approche non militaire, nous l'appliquons avec détermination. L'idéal, ou l'objectif ultime, ce n'est pas détruire le corps du combattant, mais c'est détruire la volonté du combattant à combattre", dit le lieutenant Jules Ngongo.

L'Ituri est sous état de siège depuis près de trois ans, dans l'objectif de vaincre les groupes armés actifs dans cette région. Mais cette méthode n’a pas été capable, jusque-là, de garantir à la population la paix tant désirée.

Le Niger renforce sa coopération militaire avec la Russie

C'est à bord d'un Iliouchine-76, un avion de transport militaire, que le matériel est arrivé à Niamey. Egalement du voyage, des instructeurs russes de l'Africa Corps, présenté comme le successeur du groupe paramilitaire Wagner.

Selon la télévision publique nigérienne Télé Sahel, le matériel militaire réceptionné serait un système de défense anti-aérien capable d'assurer la surveillance totale de l'espace aérien du Niger. Mais aucune autre information n'a été livrée jusque-là en plus.

Pour former l'armée nigérienne à utiliser ce matériel, une centaine de militaires russes sont donc arrivés au Niger.

Pour Abdoulaye Seydou, le coordinateur du Mouvement M62, qui est opposé à la présence de bases militaires étrangères au Niger, il est important que le renforcement de la coopération militaire avec Moscou se fasse en toute transparence et dans le respect de la souveraineté.

"L'arrivée d'instructeurs russes n'est pas en soit un problème puisqu'il s'agit de former nos FDS (forces de défense et de sécurité) autour du matériel acquis et de sa mise en place. Là où il pourrait y avoir un problème, ce serait par rapport à l'implantation définitive d'une base militaire russe", estime-t-il.

Des manifestants protestant contre la présence d'une base aérienne française au Niger
De nombreux Nigériens sont contre la présence de bases militaires étrangères au Nigernull Balima Boureima/AA/picture alliance

"Un paradoxe"

Ce samedi 13 avril, une manifestation est prévue pour demander le départ des forces américaines du pays. Certains s'interrogent donc sur l'arrivée d'autres soldats étrangers.

Pour Souley Oumarou, président du Forum citoyen pour la République, ce renforcement de la coopération militaire avec Moscou, alors que Niamey a tourné le dos à d'autres partenaires occidentaux, est curieux et paradoxal.

Selon lui "ces forces russes ne sont pas là pour le peuple nigérien" dont la majorité ne souhaite plus de présence militaire étrangère. Pour Souley Oumarou renforcer la coopération militaire avec Moscou pourrait juste n'être que le résultat du "désir du pouvoir en place de se sécuriser d'abord, et cela pourrait aussi être une autre source d'inquiétude".

Ibrahim Namaiwa, vice-président de la fédération Niger Uni, ne voit en revanche aucune raison de s'inquiéter et encore moins un paradoxe dans cette coopération russo-nigérienne.

"C'est tout à fait normal que nous cherchions des partenaires efficaces, la Russie fait partie de ces partenaires, c'est un choix assumé", assure-t-il.

Un manifestant pro-Russie avec une pancarte
Pour certains Nigériens il est tout à fait normal que le pays choisisse ses partenairesnull Sam Mednick/AP/picture alliance

La quête de la sécurité

Outre le Niger, la Russie s'est aussi rapprochée militairement d'autres pays du Sahel comme le Mali ou encore le Burkina Faso. En janvier, Africa Corps avait indiqué sur Telegram l'envoi d'unités au Burkina Faso.

Selon Seidick Abba, analyste et spécialiste des questions sécuritaires, la coopération militaire entre les pays de l'Alliance des Etats du Sahel et la Russie pourrait encore se renforcer davantage, en raison notamment de la dégradation de la situation sécuritaire au Sahel.

"Les pays vont penser que compte tenu de l'aggravation, il faut renforcer la coopération avec la Russie, acquérir davantage de matériel", explique-t-il avant de préciser que "chaque fois qu'on parle d'accroître la coopération, cela veut dire acquisition de matériel, mais cela veut dire augmentation d'effectifs aussi".

Comme au Niger, la livraison de matériel militaire au Burkina Faso s'est faite avec le déplacement d'instructeurs chargés de la formation de l'armée burkinabè.

L'école à Chibok dix ans après l'enlèvement des lycéennes

Le 14 avril 2014, près de 300 élèves, toutes des filles, étaient enlevées de force au sein de l'école qu'elles fréquentaient à Chibok, dans l'Etat de Borno, au Nigeria.

Un grand nombre de ces lycéennes enlevées se sont échappées, d'autres ont été libérées après des négociations. Mais dix ans après, on est toujours sans nouvelles d'une centaine de ces lycéennes restées en captivité.

L'école secondaire, détruite par les insurgés, a depuis été rénovée pour offrir un enseignement mixte.

Retour sur ce drame national qui a pris une ampleur mondiale avec le mouvement "BringBackOurGirls" et le point sur la vie au sein de l'école à présent.

Des manifestantes brandissent une pancarte portant l'inscription BringBackOurGirls
L'enlévement des filles de Chibok a été à l'origine du mouvement BringBackOurGirlsnull Sunday Alamba/AP Photo/picture alliance

Une rénovation et plus de sécurité

Le 14 avril 2014, les insurgés de Boko Haram effectuent dans la nuit un raid sur la ville de Chibok. Le lycée de la ville ne sera pas épargné. Ils incendient l'établissement et enlèvent 276 écolières qui s'y trouvent pour leur examen de fin d'études.

Au total, 164 lycéennes parviendront à s'évader ou à être relâchées. Mais dix ans après, on est toujours sans nouvelles de plus d'une centaine de ces filles.

L'école, qui a été incendiée lors de l'attaque par les terroristes de Boko Haram, a rouvert en 2021 après avoir été rénovée et s'appelle désormais " Ecole secondaire gouvernementale " car elle accueille des garçons et des filles.

Elle dispose de nouvelles salles de classe, d'une bibliothèque et d'un laboratoire, d'un centre informatique, d'une clinique, de logements pour le personnel et est maintenant protégée par un mur de béton et des barbelés.

La vie est redevenue presque normale dans la communauté de Chibok et à l'école, où des centaines d'élèves ont été inscrits dans un contexte de sécurité renforcée.

Malam Muhammad Bukar Chiroma, le directeur de l'école secondaire gouvernementale de Chibok, se veut confiant.

" L'école a repris ses cours en 2021, donc actuellement l'école mène ses activités académiques. Après l'incident, la plupart des parents ont transféré leurs enfants dans d'autres écoles de l'Etat voisin d'Adamawa. Mais avec la nouvelle atmosphère actuelle, presque chaque semaine, nous recevons de nouveaux élèves qui reviennent à l'école", explique-t-il.

Mais, il assure que désormais il y a "vraiment une sécurité renforcée". Selon le directeur " un mur entoure l'ensemble des locaux de l'école. Bien que l'école soit très grande, les locaux sont sous la surveillance des militaires 24 heures sur 24".

Un soldat montant la garde
En dépit de la présence des soldats, des attaques sont toujours signaléesnull FLORIAN PLAUCHEUR/AFP

L'espoir en dépit de tout

La reconstruction et la rénovation de l'école ont ravivé l'espoir chez les habitants de Chibok, chez les élèves et leurs parents.

"La seule chose est que nous plaiderons toujours pour que le gouvernement soit réaliste dans tout ce qu'il fait, en particulier en ce qui concerne le programme de la sécurité dans les écoles qui a été lancé il y a quelques années, mais qui n'a pas été parfaitement mis en œuvre", assure Ayuba Alamson porte-parole des parents des écolières de Chibok qui ont été enlevées.

Happy Adamu qui fréquente cette école assure pour sa part que les conditions sont désormais réunies pour une bonne scolarité.

"Nous avons des salles de classe adéquates, suffisamment d'enseignants, il n'y a aucun problème de sécurité dans l'école", précise l'élève.

Si les conditions semblent s'être améliorées pour les élèves de Chibok, certains estiment toutefois que le matériel scolaire reste insuffisant. Par ailleurs, la région de Chibok vit toujours sous la menace des attaques et des enlèvements.

Il y a quelques semaines, le Nigeria a connu deux nouveaux enlèvements de masse : l'un dans l'Etat du Borno, où se situe Chibok, où une centaine de personnes, principalement des femmes et des enfants, ont été enlevés, et l'autre dans l'Etat de Kaduna, dans le nord-ouest du pays, où plus de 130 enfants ont été kidnappés au sein de leur école avant d'être remis en liberté.

Gaza : les espoirs de trêve sont minces

La guerre dans la bande de Gaza est entrée hier [07.04.24] dans son septième mois. D'après le ministère de la Santé du Hamas, l'armée israélienne aurait tué plus de 33.200 personnes durant ses opérations militaires, en représailles à l'attaque terroriste, perpétrée par le Hamas, le 7 octobre dernier. Cette attaque, conduite par le mouvement terroriste palestinien, a entraîné la mort de plus de 1.270 personnes en Israël, en majorité des civils.

En dépit des efforts diplomatiques déployés par plusieurs gouvernements, aucune trêve n'est en vue pour l'instant.

Des responsables israéliens et du Hamas sont intervenus ce lundi pour atténuer tout espoir de cessez-le-feu.

Pourtant, des camions citernes ont pu entrer dans la bande de Gaza par le point de passage de Rafah, ce matin.

Et un média pro-gouvernemental égyptien avait fait état de "progrès significatifs" dans les négociations indirectes qui ont lieu au Caire, par l'intermédiaire de l'Egypte, mais aussi du Qatar et des Etats-Unis.

Des opérations militaires en vue

Le retrait des soldats de Tsahal de la ville de Khan Younès avait aussi laissé espérer une accalmie. Mais les autorités israéliennes continuent de planifier des opérations militaires.

Le gouvernement Netanyahu maintient notamment son projet d'offensive terrestre à Rafah, une ville de la pointe sud de la bande de Gaza, où l'Onu a recensé près d'un million et demi de personnes – pour la plupart des déplacés qui ont fui les combats. Le Premier ministre israélien annonce même ce soir qu'"une date" aurait déjà été fixée pour lancer cette opération à Rafah.

Israël n'exclut pas non plus une offensive dans le nord de son territoire, à la frontière avec le Liban. Ce qui laisse craindre des affrontements plus directs avec l'Iran.

Décryptage : pourquoi l’Afrique du Sud poursuit Israël devant la CIJ

Avi Hyman, le porte-parole du gouvernement israélien, affirme toutefois que c'est la partie palestinienne qui empêche la guerre de se terminer :

"Une fois de plus, c'est le Hamas qui bloque les négociations, ce n'est pas nous. Nous espérons que nous pourrons parvenir à un accord pour libérer ces otages qui auraient dû rentrer dans leur famille depuis longtemps. Mais cela n'affecte en rien l'autre objectif de la guerre, qui est de détruire le Hamas. (...) Le Premier ministre a été très clair à ce sujet dans ses déclarations d'hier sur Rafah. Nous continuerons jusqu'à Rafah, nous détruirons le Hamas".

L'Agence France Presse cite pour sa part un responsable du Hamas qui estime que – je cite - "on ne peut pas parler de progrès concrets jusqu'à présent".

Echec des diplomaties

Des divergences persistent entre les belligérants, surtout sur le retour des déplacés dans la ville de Gaza – une revendication du Hamas  - et la libération, demandée par Israël de la centaine d'otages israéliens toujours détenus à Gaza.

La situation humanitaire se détériore à une telle vitesse pour les civils palestiniens qui vivent dans le territoire sous blocus que tous les efforts diplomatiques valent la peine d'être tentés, selon Ralf Stegner, député allemand du SPD et membre de la Commission des Affaires étrangères du Bundestag. Il s'en est expliqué sur les ondes de nos confrères du Deutschlandfunk:

"[L'attaque du Hamas contre Israël, le 7 octobre], a montré que l'Etat hébreu avait de bonnes raisons de lutter contre le terrorisme et de demander un soutien pour cela. D'un autre côté, le nombre de victimes est tel qu'il est à craindre que la haine perdure pendant plusieurs générations. Et ça, c'est vraiment un échec de la diplomatie internationale, car ce conflit n'est pas nouveau."

Deux obstacles perdurent qui entravent, selon le député allemand, les efforts de l'Egypte, des pays du Golfe, des Etats-Unis et même de l'Allemagne pour aboutir à une trêve.

Tout d'abord, l'intérêt de Benjamin Netanyahu et son gouvernement à une poursuite des hostilités pour se maintenir au pouvoir. Et, d'autre part, le fait que les Palestiniens ne disposent pas d'une administration qui fonctionne de manière démocratique.

Israël annonce vouloir autoriser l'aide vers Gaza

Près de six mois après le début de la guerre entre Israël et le Hamas, le bilan est catastrophique et les perspectives sombres.

Chaque jour apporte son lot de victimes supplémentaires. Les craintes d'une régionalisation du conflit se sont encore accrues en début de semaine après la destruction du consulat iranien en Syrie par des frappes présumées israéliennes. L'objectif israélien d'anéantir le Hamas n'est pas encore atteint. Et 134 otages israéliens se trouvent toujours aux mains du mouvement islamiste.

Manifestations de proches d'otages à Tel Aviv (3.02.2024)
La conduite de la guerre contre le Hamas à Gaza après l'attaque sanglante du mouvement islamiste palestinien en Israël le 7 octobre est de plus en plus critiquée par la population israéliennenull AHMAD GHARABLI/AFP/Getty Images

La situation et le fait que les négociations pour un cessez-le-feu n'avancent guère font monter d'un cran la pression sur le gouvernement israélien. Ces dernières semaines, les manifestations d'opposants et de proches des otages se sont multipliés en Israël tandis qu'à l'étranger, les appels de l'Onu, de l'Union européenne ou encore de la Cour pénale internationale pour éviter qu'une famine ne s'installe dans la bande de Gaza se sont fait plus pressants. 

Ashdod, Erez et Kerem Shalom

C'est dans ce contexte que le cabinet de sécurité israélien a approuvé des "mesures immédiates pour augmenter l'aide humanitaire à la population civile" à Gaza. Celles-ci comprennent l'acheminement "temporaire" de l'aide par le port israélien d'Ashdod, au nord de l'enclave palestinienne et par le point de passage d'Erez, situé entre la bande de Gaza et le sud d'Israël. Par ailleurs, les autorités israéliennes vont aussi permettre "l'augmentation de l'aide jordanienne par Kerem Shalom", un autre poste frontière du sud d'Israël.

Joindre la parole au geste

Des annonces saluées par Berlin et Washington qui ont toutefois appelé à ce qu'elles se concrétisent rapidement. Sur son compte X, la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, écrit : "Nous attendons du gouvernement israélien qu'il mette rapidement en œuvre ce qu'il a annoncé. Plus d'excuses", fin de citation.

"Ce sont des développements positifs" a estimé pour sa part le secrétaire d'Etat américain, Antony Blinken "mais seuls les résultats compteront et c'est ce que nous examinerons dans les prochains jours et les prochaines semaines. Est-ce que l'aide va effectivement parvenir à ceux qui en ont besoin partout à Gaza ?"

Selon la Maison Blanche, le président américain, Joe Biden, a pour la première fois évoqué, jeudi, lors d'un entretien téléphonique avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu, la possibilité de conditionner le soutien américain à Israël à des mesures "immédiates", "concrètes et tangibles" pour répondre à la catastrophe humanitaire à Gaza.

C'était la première fois que les deux hommes se parlaient depuis l'attaque, lundi, d'un convoi humanitaire de l'organisation World Central Kitchen, basée aux Etats-Unis.

Bateau d'aide humanitaire de Chypre vers la côte de Gaza
Une barge de l'ONG World Central Kitchen chargée de nourriture arrive fait route de Chypre vers la bande de Gazanull Israel Defense Forces/REUTERS

L'armée israélienne admet des "erreurs"

Ce vendredi, l'armée israélienne a reconnu une série d'"erreurs" qui ont entraîné la mort de sept humanitaires de l'ONG en question. Une affaire qui préoccupe aussi Berlin : un porte-parole du ministère des Affaires étrangères a estimé qu'elle jetait une "mauvaise lumière sur la conduite de l'armée israélienne".

A noter enfin que le Conseil des droits de l'homme de l'Onu a exigé l'arrêt de toute vente d'armes à Israël dans une résolution évoquant les craintes de "génocide" contre les Palestiniens - un terme qui suscite un vif débat. Vingt-huit des 47 membres du Conseil ont voté en faveur du texte. Six ont voté contre, dont les Etats-Unis et l'Allemagne. Treize pays, dont la France, se sont abstenus.

Au Burkina, un VDP de retour du front témoigne

Lassané Sawadogo, jeune entrepreneur en bâtiments et travaux publiques est marié et père de sept enfants. Le jeune de 37 ans a abandonné son entreprise pour se consacrer à la lutte contre les groupes armés terroristes aux côtés des forces de défense et de sécurité du Burkina Faso.

C’est en octobre 2023 qu’il s’est enrôlé en tant que VDP pour lutter contre les groupes armés terroristes.

S’il s’est engagé c’est dit-il, pour comprendre la réalité sur les champs de combats. De retour du front récemment, Lassané Sawadogo se réserve cependant de parler de la situation qu’il a vécue.

"J’ai commencé la lutte avant l’arrivée de ce pouvoir. Notre lutte c’est de ramener l’intégrité du territoire Burkinabé aux Burkinabé et de travailler à prendre en compte les aspirations profondes du peuple Burkinabé".

Vêtu de son boubou et de son bonnet, calme et avec un regard qui en dit long sur sa détermination, Lassané regrette que les régimes précédents n’aient pas suffisamment agi dans l’équipement militaire de l’armée pour faire face aux groupes terroristes.

"Nous avons suggéré beaucoup de chose aux régimes passés qui n’ont pas été prises en compte. Dans l’armé burkinabé il y’avait le manque d’équipement militaire, de personnel militaire et d’organisation interne de l’armée", raconte Lassané.

Des soldats de l'armée burkinabé.
Des attaques simultanées et synchronisées ont souvent eu lieu et face aux insurgés, les forces loyalistes sont parfois sous-équipées. Mais des efforts se font pour mieux les equiper. null picture alliance / ASSOCIATED PRESS

Des complicités à l'interne

Pour Lassané, "Quand le président Ibrahim Traoré est venu, il a pris toutes ces aspirations en compte. Avant que je ne m’engage comme VDP, je me suis dit que nous parlons des problèmes de l’armée alors que nous n’avons pas les compétences et qu’est ce qui m’empêchait de m’enrôler ? C’est ce qui m’a motivé à le faire".

Mais le constat est que malgré les efforts fournis en armement et moyens mobiles, le Burkina Faso est toujours la cible des groupes armés terroristes. Bien que l’initiative de recruter des supplétifs de l’armée soit saluée par une majorité de burkinabé, certains se montrent tout de même critiques.

En effet, des experts en sécurité s’interrogent toujours sur la moralité et l’engagement réel  des enrôlés. "Des complicités, oui, il en existe au sein des VDP puisqu’ayant été recrutés sous les régimes passés, donc, ils sont en contact avec certains anciens dignitaires du pouvoir", estime Lassané sawadogo.

Mais il en est certain : "Nous avons compris que les réalités du terrain sont contraires à ce qui est dit sur la place publique. Je prends un exemple des attaques que rencontrent nos FDS en général. Vous savez qu’aucune attaque ne peut se mener sans le renseignement. Que ce soit du côté ennemi et ami, la première des choses c’est d’avoir des informations nécessaires. Ça signifie que ces personnes aussi procèdent de la même manière pour attaquer nos bases. Quand on parle de complicité cela veut dire que des gens ont peut-être communiqué des informations. Quand je suis revenu, j’ai compris qu’on a un travail à faire. C’est-à-dire sensibiliser à ne pas donner la position des FDS et leurs moyens."

Lassané Sawadogo dénonce aussi une autre pratique de la part de certains chefs militaires.

"Figurez-vous que des chefs coupent des primes des VDP. Nous pensons que tout ça est démoralisant. Y’a beaucoup de chose. C’est militaire, on ne peut pas tout dire."

Lassané Sawadogo regrette toutefois que de nombreux Burkinabé aient rejoints les mouvements terroristes pour dit-il saboter la vision du capitaine Ibrahim Traoré.

Que cherche la Hongrie au Tchad ?

On n'offenserait probablement pas les Tchadiens ou les Hongrois si l'on disait que beaucoup d'entre eux ne trouveraient pas si facilement l’emplacement géographique de leur pays réciproque sur la carte du monde.

Ce n'est pas étonnant, puisque la Hongrie, un petit pays en Europe centrale, et le Tchad, un Etat sahélien immense, mais beaucoup moins peuplé, n'ont jusqu'à présent que peu de relations bilatérales.

La Hongrie n'a même pas de mission diplomatique au Tchad, et c'est pareil dans l'autre sens. Et pourtant, c'est le pays de Victor Orban qui veut aider le Tchad à se stabiliser en envoyant 200 soldats au Tchad, ainsi que de l'aide au développement et humanitaire. Les relations se sont intensifiées depuis l’automne dernier.

L’Etat stable de la région

Au début de l'année, l'organisation étatique hongroise, Hungary Helps, a ouvert son premier bureau de représentation en Afrique, à N'Djamena, au Tchad.

En octobre dernier, le ministre hongrois de la Défense, Kristóf Szalay-Bobrovniczky, a salué le Tchad comme « le seul Etat stable de la région » et a mis en garde contre les conséquences d'une déstabilisation.

"La région a connu une augmentation des activités terroristes au cours des dernières semaines et des derniers mois, et le Tchad est le seul Etat stable de la région, accueillant un grand nombre de réfugiés en provenance d'autres pays africains. Si le Tchad devient également instable, nous pourrions assister à un flot migratoire qui pourrait en envoyer des centaines de millions supplémentaires vers l’Europe", a déclaré le ministre hongrois.

Aujourd’hui, parler de « centaines de millions » est largement exagéré. Néanmoins, avec environ 1,1 million de réfugiés, le Tchad a accueilli plus de réfugiés que tout autre pays africain par rapport à ses 18 millions d'habitants.

La moitié d'entre eux vient du Soudan voisin, où des unités militaires rivales se battent depuis 11 mois et forcent davantage de personnes à fuir le pays.

Gáspár Orbán, le fils du Premier ministre hongrois, Viktor Orban au milieu.
Gáspár Orbán (milieu), le fils du Premier ministre hongrois, Viktor Orban, lors de la cérémonie de clôture d’une formation des administrateurs des camps de réfugiés au Tchad en octobre 2023. Formation rendue possible grâce à l'aide hongroise.null Cnarr-Tchad/Facebook

Quid de la mission militaire

Si la mission civile a le potentiel d'apporter une contribution significative au pays, celle militaire soulève cependant beaucoup de questions, estime András Rácz, chercheur auprès au Conseil allemand des relations extérieures.

"Je ne pense pas que quelqu’un puisse de façon réaliste s'attendre à ce qu'avec 200 hommes, il soit possible de changer quoi que ce soit dans un pays de 1,2 million de kilomètres carrés. Donc, cette mission n'a fondamentalement aucune chance d'aboutir à un changement significatif."

Outre la situation des réfugiés, il existe d'autres problèmes liés à la politique intérieure qui menacent l’instabilité du pays. Des élections sont prévues au Tchad début mai.

La situation sécuritaire s'est encore détériorée depuis le meurtre d'un homme politique de l'opposition il y a deux semaines. Les observateurs craignent que le président par intérim, Mahamat Déby, ne transforme le Tchad en une dictature.

Jusqu'à présent, Mahamat Déby – contrairement aux putschistes du Niger, du Mali et du Burkina Faso – est considéré comme un allié fidèle de l’Occident, y compris de l’ancienne puissance coloniale, la France.

Le Tchad, un pays stratégique

Le Tchad reste néanmoins un pays central dans les intérêts géopolitiques de Paris, de Budapest et de Bruxelles, estime Ulf Laessing, responsable des projets Sahels à la Fondation allemande Konrad Adenauer.

"Le Tchad est vraiment un point sensible pour les Européens. Certains Etats membres comme la France et la Hongrie soutiennent le pays malgré les nombreux déficits dans le domaine démocratique et des droits de l'homme. Alors que les mêmes pays comme la France sont très critiques vis-à-vis du Mali, du Niger et du Burkina Faso. Au sujet des critiques formulées à l'encontre des gouvernements militaires, vous n'entendez rien concernant le Tchad", a souligné Ulf Laessing.

Mais pour le politologue tchadien Evariste Ngarlem Toldé, la Hongrie avec cette mission n'a en tête que ses propres intérêts.

"La présence hongroise au Tchad s'explique facilement par la volonté de la Hongrie de réduire le nombre de réfugiés que lui impose l'Union européenne", a-t-il expliqué.

Quelques formalités bilatérales font encore obstacle au démarrage de la mission hongroise. On ne sait donc pas si l'opération débutera avant ou après le scrutin du 6 mai 2024.

Quoi qu’il en soit, ce serait la première fois que la Hongrie enverrait des unités entières en Afrique pour une mission militaire – et sans mandat international.

Ces volontaires qui luttent contre le terrorisme au Burkina

Les dernières expériences de Lassané Sawadogo en tant que supplétif de l’armée burkinabè sur le front sont récentes. Dans ses témoignages accordés à la DW, Lassané ne peint pas tout en rose. Il reconnait des efforts dans l’organisation de l’armée mais des difficultés subsistent toujours. 

Lassané Sawadogo est marié et père de sept enfants. C’est en octobre 2023 qu’il s’est enrôlé comme VDP, ou Volontaire pour la défense de la patrie, pour lutter contre les groupes armés terroristes.  

Les Burkinabè débattent des réquisitions forcées

Il dit s’être engagé pour comprendre la réalité sur les champs de combats. De retour du front, Lassané Sawadogo se réserve cependant de parler de la situation qu’il a vécue. "J’ai commencé la lutte avant l’arrivée de ce pouvoir. Notre lutte c’est de ramener l’intégrité du territoire Burkinabé aux Burkinabé et de travailler à prendre en compte les aspirations profondes du peuple Burkinabé", confie-t-il. 

Une armée sous-équipée  

Vêtu de son boubou et de son bonnet, calme et le regard qui en dit long sur sa détermination, Lassané regrette que les régimes précédents n’aient pas suffisamment agi dans l’équipement militaire de l’armée pour faire face aux groupes terroristes. 

Il explique que "nous avons suggéré beaucoup de chose aux régimes passés qui n’ont pas été prises en compte. Dans l’armé burkinabé il y’avait un manque d’équipement militaire, de personnel et d’organisation interne de l’armée. Quand le président Ibrahim Traoré est venu, il a pris toutes ces aspirations en compte. Si je me suis engagé comme VDP, je me suis dit que nous voulons parler des problèmes de l’armée alors que nous n’avons pas les compétences et qu’est ce qui m’empêchait de m’enrôler ? C’est ce qui m’a motivé à le faire."

Ecoutez le témoignage de Lassané Sawadogo...

Mais le constat est que malgré les efforts fournis en armement et moyens mobiles, le Burkina Faso est toujours la cible des groupes armés terroristes. Bien que l’initiative de recruter des supplétifs soit saluée par une majorité de Burkinabé, certains se montrent tout de même critiques.  

Des complicités avec les djihadistes 

Des experts en sécurité s’interrogent toujours sur la moralité et l’engagement réel des enrôlés. Des complicités, oui, il en existe au sein des VDP puisqu’ayant été recrutés sous les régimes passés donc en contact avec certains anciens dignitaires du pouvoir raconte Lassané Sawadogo. 

"Nous avons compris que les réalités du terrain sont contraires à ce qui est dit sur la place publique. Je prends un exemple des attaques que rencontrent nos forces de sécurité en général. Vous savez qu’aucune attaque ne peut se mener sans le renseignement, note-t-il. Que ce soit du côté ennemi et ami, la première des choses c’est d’avoir des informations nécessaires. Cela signifie que ces personnes aussi procèdent aussi de la même manière pour attaquer nos bases. Quand on parle de complicité cela veut dire que des gens ont peut-être communiqué des informations. Quand je suis revenu, j’ai compris qu’on a un travail à faire. C’est-à-dire sensibiliser à ne pas donner la position des forces de sécurité et leurs moyens."

Ibrahim Traore lors d'une visite en Russie
La junte militaire a décidé de prolonger d'un an la "mobilisation générale" pour lutter contre les groupes djihadistesnull Alexey Danichev/AFP

Lassané Sawadogo dénonce aussi une autre pratique de la part de certains chefs militaires. "Figurez-vous que des chefs coupent des primes des VDP. Nous pensons que tout cela est démoralisant. Il y a beaucoup de choses. C’est militaire, on ne peut pas tout dire", assure-t-il. 

Lassané Sawadogo regrette toutefois que de nombreux Burkinabé aient rejoints les mouvements terroristes pour, dit-il, saboter la vision du capitaine Ibrahim Traoré. 

Nouveau risque d'escalade au Proche-Orient

Il était environ 17h à Damas lundi 1er avril, lorsqu'une frappe a visé l'immeuble mitoyen de l'ambassade d'Iran dans un quartier de la capitale syrienne qui abrite plusieurs autres ambassades et des bureaux des Nations unies. Le bâtiment visé a été entièrement détruit. Il abritait la section consulaire et la résidence de l'ambassadeur d'Iran. Hosein Akbari est sorti indemne de l'attaque, tout comme sa famille et a déclaré que l'immeuble avait été visé par "six missiles tirés par des chasseurs F-35" israéliens. Les médias officiels syriens ont affirmé quant à eux que le raid avait été mené par "l'ennemi israélien depuis le plateau occupé du Golan".

Deux hauts gradés iraniens tués

On sait aussi que le bilan s'élève à au moins à 13 morts parmi lesquels deux hauts gradés iraniens : Mohammad Reza Zahedi et Mohammad Hadi Haji Rahimi étaient commandants de la Force Qods, l'unité d'élite des Gardiens de la révolution, armée idéologique de la Révolution islamique.

Pour l'heure, Israël, n'a pas réagi mais rien d'étonnant à cela : son armée a déjà mené des centaines de raids sur la Syrie sans les confirmer officiellement. Des raids qui ont pour but d'empêcher l'Iran et ses milices alliées d'étendre leur influence militaire en Syrie et qui se sont intensifiés depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza, il y a près de six mois.

Ligne rouge

Avec l'attaque de lundi, c'est cependant la première fois qu'un bâtiment diplomatique iranien en Syrie est touché conduisant plusieurs experts a parlé de "ligne rouge franchie" et de "risque d'explosion" avec une possible riposte de l'Iran, via ses alliés régionaux.

Pour rappel, Téhéran soutient le Hamas mais nie toute implication dans l'attaque sanglante du 7 octobre, prélude à la guerre entre le mouvement islamiste et Israël. La République islamique a aussi déjà affirmé qu'elle ne souhaitait pas d'une guerre régionale. Mais avec le raid de lundi, tout pourrait changer : l'Iran a en tout cas prévenu Israël qu'il allait riposter - ses alliés à savoir le pouvoir syrien, le Hezbollah libanais ou encore le Hamas, sont allés dans le même sens. Quant à la Russie, principal allié du président syrien Bachar al-Assad, aux côtés de l'Iran, elle a estimé que la frappe sur Damas était "inacceptable". 

L'Union européenne a, elle, appelé à la "retenue", rappelant qu'"une nouvelle escalade dans la région n'est de l'intérêt de personne".

A Béni, la fête de Pâques va se célébrer loin des églises

À cause de l'insécurité due aux attaques rebelles contre les villages et les églises, plusieurs localités de Beni sont désormais inaccessibles et les prêtres et pasteurs ne pourront pas rejoindre leurs fidèles ce dimanche. 

Ce mercredi 27 mars, jour du marché, Zahabu Kavira arrive à Oicha pour se ravitailler en vivres pour la fête de Pâques. Elle est venue du village de Maleki près d'Oicha.

Pas de célébration de Pâques

Zahabu fait partie des personnes qui résistent encore dans ce village malgré les multiples attaques rebelles. Fervente catholique, elle se rappelle des grands moments du triduum pascal qui précède le dimanche de Pâques, mais cette année, aucune cérémonie religieuse n'est prévue dans son village.

"Je suis venue acheter juste quelque chose pour les enfants, ça ne sera pas une fête comme telle. Moi, je suis chrétienne catholique. Avant, les prêtres venaient chez nous chaque dimanche et pendant le triduum pascal, ils organisaient des catéchèses et des messes du soir, mais maintenant, c’est impossible. On se réunissait dans notre chapelle au village, mais aujourd’hui chacun reste chez soi, on a peur que les rebelles nous y attaquent pendant la messe", a raconté Zahabu Kavira.

Des populations lors de l’enterrement des victimes des ADF
Les exactions des ADF ont commencé dans la province du Nord-Kivu et se sont étendues depuis plusieurs années dans la province voisine de l'Ituri. Ils ont prêté allégeance en 2019 à l'EI et sont aussi accusés de plusieurs récentes attaques sur le sol ougandais.null J. Kanyunyu

Faustin Kangayo est un déplacé interne vivant actuellement avec ses six enfants dans une salle de classe d'une école qui accueille des déplacés à Beni. Il est nostalgique de l'ambiance de fête de Pâques dans son village d'Idou, dans la province de l'Ituri, à l'est de la RDC. Aujourd'hui, il a des difficultés pour trouver de la nourriture à ses enfants le jour de fête.

"Avant, chez nous au village, la fête était bien organisée. On avait tout ce qu'il fallait : les récoltes de nos champs, les chèvres, les vaches, les poules… On ne manquait de rien et les enfants sentaient qu'on était en fête. Chacun avait un habit neuf pour la circonstance. Mais maintenant, je n'ai rien, pas d'argent", a-t-il expliqué.

Les Eglises ne sont pas épargnées

Les attaques rebelles contre les villages à Beni n'ont pas épargné les églises. Actuellement, des herbes poussent tout autour des chapelles abandonnées. Père Omer Sivendire est curé de la paroisse Saint-Esprit d'Oicha.

Il évoque les difficultés d'évangéliser dans cette zone en proie à l'insécurité. Et contrairement aux années antérieures, ce dimanche de Pâques, Père Omer ne pourra pas rejoindre ses paroissiens qui vivent encore dans des villages un peu isolés et qui n'ont pas pu fuir.

"Dans le temps, on pouvait facilement être partout dans la contrée, mais aujourd'hui, c'est impossible alors que nos chrétiens sont là un peu plus retirés dans ces coins où ils veulent faire leurs champs, mais vivent dans l'insécurité et nous, nous sommes aussi dans l'insécurité. Nous avons du mal à y arriver. Nous espérons que l'année prochaine, nous pourrons aller partout, mais pas cette année, malheureusement. C'est très regrettable, toutes les célébrations du triduum pascal se feraient le soir, la messe de veillée pascale, c'est à minuit dans les pays qui sont en sécurité ! Mais pour nous, ça se fera à 14 heures", a déploré le prêtre catholique.

Les attaques rebelles, attribuées à l'ADF, se sont multipliées ces derniers temps à Beni, à quelques jours de la célébration de la fête de Pâques. Les deux dernières semaines, au moins 20 personnes ont été tuées.

L'armée a ainsi alerté sur des menaces terroristes pendant les festivités de Pâques. Elle a invité les populations à la vigilance.

 

Il y a deux ans, le massacre de Moura au Mali

Tout commence le 27 mars 2022. Dans le village de Moura, localité située dans le cercle de Djenné, dans le centre du Mali, les habitants voient arriver des membres de l'armée malienne et des hommes blancs, sans doute des combattants du groupe Wagner.

Moura est situé dans une zone contrôlée par les djihadistes de la katiba Macina, affiliés au groupe de soutien à l'islam et aux musulmans, et le village est assiégé au moins pendant quatre jours.

Jusqu'au 31 mars, des centaines de personnes sont exécutées, selon les organisations de défense des droits de l'homme.

Des victimes qui attendent toujours justice

L'Onu estime un an plus tard dans un rapport qu'au moins 500 civils, dont une vingtaine de femmes et sept enfants, ont été massacrés lors de l'opération menée par l'armée à Moura. 58 femmes et jeunes filles ont par ailleurs été victimes de viol et d'autres formes de violences sexuelles, selon toujours l'Onu.

À la suite des accusations d'exactions, une enquête a été ouverte par les autorités maliennes, mais elle n'avance pas, selon Ousmane Diallo, chercheur pour le Sahel à Amnesty International.

"Personne n'a été traduit devant la justice, personne n'a été sanctionné. Les gens qui ont été victimes de ce massacre et les gens qui ont été victimes de ces violences sexuelles n'ont pas reçu de justice ni de vérité par rapport à ce qui est arrivé. Certains des ressortissants du village, des témoins et des rescapés ont été traqués et sujets à des intimidations de la part des forces de sécurité", explique le chercheur.

"Personne n'a été sanctionné" Ousmane Diallo (Amnesty)

Des enquêtes en cours

Du côté de Bamako, on assure que l'enquête avance. Dans cette affaire le procureur de la République du pôle judiciaire spécialisé en matière de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée a par ailleurs été saisie d'une plainte formulée par la direction générale du contentieux de l’État contre les membres de la mission spéciale d'établissement des faits du Haut-Commissariat des Nations unies aux Droits de l'Homme. 

La plainte est intervenue à la suite de la publication du rapport du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme sur les évènements de Moura.

Fousseyni Ouattara de la Commission de Défense et de Sécurité nationale et membre du Conseil national de la transition maintient que ce ne sont pas des civils qui ont été tués.

Il assure par ailleurs que " les enquêtes suivent leur cours" et que "c'étaient des terroristes avec même des instructeurs étrangers qui les encadraient" que l'armée malienne a affronté à Moura.

"Les enquêtes suivent leur cours" Fousseyni Ouattara (CNT)

Les éventuelles raisons de la lenteur de l'enquête

Selon Ousmane Diallo, d'Amnesty International, plusieurs raisons pourraient expliquer la lenteur de la procédure judiciaire.

Selon lui, "l'ampleur de la situation est déjà un facteur parce qu'on parle de crimes de guerre, de crime contre l'humanité à Moura, et les responsabilités qui sont pointées du doigt sont les forces armées maliennes et leurs alliés militaires russes, Wagner sur le terrain". Il rappelle par ailleurs que "le massacre de Moura est intervenu dans un contexte de discours de montée en puissance de l'armée".

Selon le chercheur "les blocages sont plutôt politiques. Il n'y a pas de volonté de traduire des militaires en justice, car potentiellement ces militaires-là sont critiques pour la survie du régime. Ou bien des ordres ont été donnés de très haut et les militaires qui ont été sur le terrain n'ont fait qu'appliquer les ordres."

Dans cette affaire, le département d'Etat américain a imposé des restrictions de visa à deux militaires maliens, le colonel Moustapha Sangaré et le major Lassine Togola. Tous deux ont été désignés comme étant responsables des éléments des forces armées maliennes ayant mené l'opération à Moura.

Qui est le groupe terroriste derrière l'attentat en Russie ?

En Russie, l'enquête se poursuit  après l'attentat contre une salle de spectacle vendredi dernier (22.03). Au moins 137 personnes sont mortes, abattues par des terroristes qui sont entrés dans le bâtiment et ont visé des civils avec des armes automatiques. Ils ont ensuite mis le feu au Crocus City Hall, le lieu de l'attaque. Depuis, les autorités russes disent avoir avoir arrêté onze personnes et quatre individus, les assaillants présumés, ont été placés en détention provisoire dans la nuit de dimanche (24.03) à lundi.

Un groupe existant depuis dix ans

Vendredi, très vite, l'attentat a été revendiqué par l'organisation Etat islamique au Khorasan. Cette branche de l'Etat islamique n'est pas la plus connue du groupe. Mais elle est pourtant très active, la plus meurtrière de l'organisation. Son nom se rapporte au nom médiéval de l'Afghanistan qui englobait alors une partie du Turkménistan, de l'Ouzbékistan et du Tadjikistan.

Le groupe est connu depuis son apparition pour la première fois en Afghanistan il y a dix ans, en 2014, fondé par des anciens talibans et membres d'Al-Qaida. Un groupe puissant. "Il compte plusieurs milliers de combattants", raconte à l'agence Reuters, Dan Bymen, chercheur au Centre d'études stratégiques et internationales à Washington. "On pensait qu départ qu'il s'agissait d'un groupe de guérilla qui menait des attaques terroristes occasionnelles, mais qui se concentrait principalement sur l'Afghanistan. Et puis il y a eu des attaques au Pakistan et une attaque de grande envergure en Iran", détaille-t-il encore, faisant référence à l'attentat, en janvier dernier, qui a couté la vie à plus de 90 personnes à Kerman.

Dans un couloir de tribunal, des policiers cagoulés tiennent un homme par les bras, suspecté d'être l'un des auteurs de l'attentat terroriste meurtrier contre le Crocus City Hall
Les quatre assaillants présumés ont été placés en détention provisoire pour deux moisnull Sefa Karacan/Anadolu/picture alliance

L'Europe en ligne de mire

Dans le viseur du groupe aujourd'hui aussi, il y a donc aussi l'Europe. A quelques mois des Jeux Olympiques à Paris, la France vient d'ailleurs, après l'attentat de Moscou, de relever son niveau d'alerte terroriste au plus haut. Justification de Paris : des attentats du groupe Etat islamique au Khorassan ont déjà été déjoués en France et en Allemagne aussi. Pas plus tard que la semaine dernière, la Police allemande avait arrêté deux hommes membres de l'organisation, qui projetaient, depuis l'Allemagne, un attentat en Suède.

Vendredi dernier, c'est donc la Russie qui a été touchée. "La Russie est un ennemi de longue date de la communauté djihadiste au sens large, si l'on remonte à la lutte contre l'Union soviétique en Afghanistan, bien sûr", décrypte Dan Bymen. "Dans les années 1990, la Tchétchénie était probablement le premier foyer de djihad dans le monde. La Russie a aussi soutenu la Syrie pendant la guerre civile, face notamment à l'État islamique."

Ennemi des talibans afghans

Une voiture de police au milieu d'une foule, lors de l'attentat de Kerman, en Iran, en janvier 2024
Le 3 janvier dernier, au moins 91 personnes ont été tuées dans un attentat perpétré à Kerman en Irannull IRAN PRESS/AFP

Le groupe désigné aussi parfois sous le sigle EI-K dans le monde francophone est aussi un ennemi des talibans en Afghanistan, d'où la multiplication des attentats sur place. En 2021, le groupe Etat islamique au Khorassan avait même tué Hamdullah Mokhlis, le chef de la sécurité des talibans à Kaboul.

Ce lundi le Kremlin refuse de commenter la revendication du groupe dans l'attentat à Moscou le 22 mars. "L'enquête est en cours et l'administration présidentielle aurait tort de faire des commentaires sur le déroulement de l'enquête", a dit le porte-parole de Vladimir Poutine. Les recherches dans les décombres du bâtiment où a eu lieu l'attentat se poursuivaient ce lundi.

Difficile ramadan pour les déplacés dans l'est de la RDC

A Goma, des familles musulmanes s'organisent donc pour venir en aide à ces déplacés

Fauziya Ali, une déplacée vivant dans le camp de Bulengo, à Goma, s’efforce de faire le ramadan, malgré la situation difficile dans laquelle elle se trouve. 

"J'ai fui la guerre et je me suis retrouvée dans le camp de Bulengo il y a six mois. Ce que je veux, c'est que la guerre prenne fin. En tant que musulmane, le plus gros problème auquel nous sommes confrontés est le manque de nourriture pour rompre le jeûne, ainsi que le manque de vêtements", explique  Fauziya Ali, une déplacée.

Djuma Mapendano, un autre déplacé interne vivant dans le camp de Rusayo, se présente à la prière du soir, mais il ne cache pas, lui aussi, ses difficultés pour trouver de la nourriture pour la rupture dujeûne, à la nuit tombée.

"J'ai réussi à jeûner les deux premiers jours du ramadan avant que je n'arrête parce que je ne trouvais pas à manger le soir, comme ça se doit. Cela m'a fort affaibli, à tel point que je me sentais à bout de souffle. Dès lors, je ne reste qu'avec le programme de cinq prières par jour, et c'est la raison de ma présence ici à la mosquée", dit Djuma Mapendano. 

Des Congolais fuient en masse les combats entre les FARDC et les rebelles du M23, le 7 février 2024
La guerre a contraint des milliers de Congolais à la fuitenull Moses Sawasawa/AP/picture alliance

Solidarité envers les déplacés

Mais, ce soir, Djuma Mapendano sera invité à manger dans la famille de Mwajuma Blondel. Celle-ci explique combien il est important de faire cette aumône durant le ramadan.

"Nous sommes dans le mois sacré du ramadan, Al-ḥamdu li-l-lāh (Dieu soit loué, ndlr) et il se passe très bien. En famille d'abord, l'islam nous demande la générosité. Et cette générosité, c'est surtout avec les gens qui n'ont pas les moyens de se procurer de la nourriture. Quand nous partageons ensemble, c'est comme une aumône que nous leur faisons", estime Mwajuma Blondel.

Pour leur procurer de quoi rompre le jeûne chaque soir, la communauté musulmane de Goma apporte, depuis le début de ce mois, des vivres aux musulmans déplacés qui sont recueillis dans différents camps autour de Goma, mais aussi au sein de familles d'accueil. 

Mwajuma Blondel est membre d’une association dénommée Muslim Sisters qui récolte de la nourriture pour les déplacés.

"Je fais partie d'une association de filles et femmes musulmanes dans la ville de Goma qui s'appelle Muslim Sisters. Nous sommes en train de faire une collecte de fonds, car ce dimanche, nous allons assister les déplacés de Rusayo et Bulengo qui nous ont fait part de leur manque de nourriture pour finir le mois", indique-t-elle.

Des habitants fuient leur localité face aux combats dans la région de Goma, le 4 mai 2022
Des habitants fuient leur localité face aux combats dans la région de Goma, le 4 mai 2022null Moses Sawasawa/AP/picture alliance

"Que la guerre prenne fin"

Mais au-delà des questions religieuses, cette mère d'un enfant avoue souffrir de voir ses compatriotes obligés de fuir les combats d’une guerre qu’ils comprennent mal.

"J'ai déjà visité plus de cinq camps et quand je vois les enfants qui ont du mal à trouver même de la bouillie, ça me fait beaucoup de mal en tant qu’être humain, même en dehors de la religion. Nous avons besoin de la paix dans l'est de la RDC. Je demande à nos autorités de faire de leur mieux pour que la guerre puisse prendre fin dans notre pays", estime encore Mwajuma Blondel.

Cette année, dans la région de Goma, le mois sacré du ramadan est essentiellement consacré à la prière pour la paix en République démocratique du Congo, confient de nombreux croyants. 

Attaques contre l'Eglise catholique en Ituri

Trois institutions de l'Eglise catholique ont été attaquées en l'espace de quelques jours par des hommes armés non identifiés dans la ville de Bunia, dans la province de l'Ituri, située dans l'est de la République démocratique du Congo. Ces attaques n'ont pas fait de victimes.

Cette tension a débuté à la suite d'un message du gouverneur militaire de cette province, qui a accusé des membres du clergé  d'avoir voulu lui soutirer de l'argent, en échange de prêches positifs pour l'autorité militaire qui dirige cette province sous état de siège.

Des intimidations

La dernière attaque remonte à la nuit de mardi à mercredi et elle a visé l'internat du lycée catholique de Kigonze à Bunia.

Peu avant cela, ce sont le bureau du curé de la paroisse catholique de Nyakasanza et un couvent de sœurs qui ont été la cible d'attaques similaires, conduites par des hommes armés non identifiés jusqu'à présent. Aucune victime n'est à déplorer.

Cette situation intervient dans un contexte où plusieurs prêtres catholiques ont tenu des propos critiques à l'encontre des autorités militaires qui dirigent la province de l'Ituri, placée sous état de siège depuis près de trois ans. 

Un combattant de la Force de Résistance Patriotique de l'Ituri (FRPI) à Bukiringi (archive de janvier 2022)
L'Ituri est le théâtre de violences depuis des années. Plusieurs milices y sont activesnull Alexis Huguet/AFP/Getty Images

Tout en condamnant ces attaques contre les installations de l'église, l'évêque du diocèse de Bunia, Dieudonné Uringi, a déclaré que les prêtres ne doivent pas se laisser intimider : 

"Le gouverneur a adressé des paroles méchantes aux curés. Nous ne devons pas nous laisser écraser par des personnes de ce genre-là, il n'a qu'à aller jusqu'au bout, mais il ne va pas nous forcer à nous taire, on ne doit pas être, n'est-ce pas, intimidés."

L'évêque de Bunia faisait référence à une déclaration du gouverneur militaire de l'Ituri, le week-end dernier, dans laquelle il a accusé certains prêtres d'avoir voulu lui soutirer de l'argent en échange de leur soutien.

Accusations de chantage

Le lieutenant général Johnny Luboya a ainsi accusé, sans les nommer, certains responsables religieux catholiques d'avoir exigé jusqu'à 300.000 dollars. 

"Ils viennent ici, ils me demandent de l'argent, je refuse. Ils repartent et vont dans leurs églises, ils commencent à me traiter de tous les noms. Je ne suis ni un bandit, ni un voleur et ce n'est pas parce que vous êtes un chef religieux, ce n'est pas parce que vous êtes un abbé que vous allez m'intimider. Je ne le ferai pas et si vous voulez me faire partir, si vous pensez que vous avez ce pouvoir, faites-moi partir."

En réponse, l'évêque de Bunia, Dieudonné Uringi, a exigé du gouverneur militaire qu'il dévoile l'identité de ces présumés maitres-chanteurs : "Je lui ai dit : venez me citer les noms de ces religieux qui sont venus demander de l'argent chez vous. Mais j'attends sa réponse. Face à des choses comme ça, on ne peut pas se taire, sinon on devient complice. Il faut dire la vérité, mais ne toucher à personne par la violence."

Cette controverse entre l'Eglise catholique et les autorités militaires de l'Ituri inquiète les fidèles catholiques. 

Ce lundi, les laïcs catholiques ont manifesté contre l'attaque de la paroisse de Nyakasanza. La manifestation a été repoussée sans ménagement par les forces de police, faisant quelques blessés légers.

En RCA, l’armée et la CPC se disputent le contrôle de Ndah

En lutte avec l’Etat centrafricain, la Coalition des patriotes pour le changement de l’ancien président François Bozize peut s’appuyer sur le Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique, le FPRC de Nouredine Adam, l’ancien numéro deux de la Seleka, recherché par la Cour pénale internationale.

C’est le cas notamment à Ndah, investi jeudi (07.03.2024) par le FPRC lors d’une attaque qui a fait officiellement cinq morts au sein de l’armée.

En réaction, les forces loyalistes de Centrafrique ont utilisé des moyens aériens pour repousser l’offensive des rebelles, mais sur place, la situation reste incertaine.

Climat d’insécurité

Le commandant Franck Gonide, porte-parole de l’état-major, dresse un bilan des pertes qu’il n’a pas été possible de vérifier.

Ecoutez le reportage à Bangui du correspondant Jean-Fernand Koena

"L'intention de ces ennemis de la paix est d'entretenir un climat d'insécurité dans la zone en testant leurs capacités de nuisance auprès de notre force, afin de faire comprendre à l'opinion nationale et internationale qu'ils sont de retour pour replonger le pays dans un nouveau chaos."

"Malheureusement pour eux, poursuit le commandant Franck Gonide, les forces armées centrafricaines ont fait montre de détermination et de professionnalisme, les mettant en déroute, en leur infligeant de lourdes pertes avec le bilan ci-après : plus d'une quarantaine de rebelles tués. Toutefois, du côté des forces armées centrafricaines, il a été enregistré un cas de blessure et la perte de cinq éléments tombés sur le champ d'honneur en défendant vaillamment."

Des populations sous le choc

A Bangui, les Centrafricains interrogés sont choqués par cette attaque et ils disent vouloir avant tout la paix.

"C’est révoltant d’apprendre la mort des forces armées. Ils doivent défendre la patrie et je demande au gouvernement de leur donner les moyens, les véhicules."

"Cette attaque éclaircit sans doute les failles qui demeurent encore dans l’armée nationale et qu’il faut nécessairement corriger. Mais en marge de cette remarque, il est important de préciser que la population ne désire qu’une seule chose : vivre en paix, aussi bien dans cette région que dans les autres sur le territoire."

Un agriculteur montre sa terre endommagée par le passage d'un troupeau à Paoua, dans le nord-ouest de la République centrafricaine, le 2 décembre 2021
La ville de Ndah situé non loin du Soudan renferme de nombreuses ressources (photo d’illustration)null Barbara Debout/AFP/Getty Images

Fari Tehuruka Shabazz, analyste en matière de sécurité, estime que l’ancien ministre Nouredine Adam, qui a des contacts au Soudan voisin, dispose des hommes et du matériel pour faire face à l’armée centrafricaine.

"Tactiquement parlant, est-ce que les groupes armés ont les moyens de pouvoir faire tomber le régime de Bangui ? Généralement, les groupes armés ont la possibilité d’avoir une supériorité numérique vis-à-vis de Wagner et des forces loyalistes. Mais cette supériorité numérique est compensée, du côté des forces armées centrafricaines, par une supériorité aérienne, notamment grâce aux hélicoptères de combat et aux avions El Abatros R39 de Wagner."

A Ndah, les rebelles avaient aussi pris en otage, en 2023, vingt militaires centrafricains avant de les libérer quelques semaines plus tard.

L’attaque récente conduite par Nourredine Adam, qui est recherché par la Cour pénale internationale, est une démonstration de sa capacité de nuisance au sein de la CPC.

Mali : la ville de Boni toujours sous blocus de djihadistes

Lors du premier embargo imposé sur la ville, entre mai et août 2022, le groupe Serma, qui a prêté allégeance au JNIM, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, filiale du groupe Al-Qaïda, reprochait aux populations de Boni leur supposé soutien à l’armée malienne.

D’après des sources locales et sécuritaires, ce seraient les mêmes motifs qui motiveraient ce deuxième embargo qui dure depuis juillet 2023.

La ville de 29.000 habitants est située sur la stratégique route nationale 16, qui relie les villes de Mopti à Gao au Mali.

Difficile ravitaillement des populations

La ville n’est plus ravitaillée, comme l’explique Nouhoun Cissé de la coordination locale des jeunes de Boni.

"Depuis huit mois, rien ne rentre, rien ne sort. Les commerçants n’osent plus amener leurs camions à destination de Boni. Ils avaient même fermé l’axe de Gao. A un moment donné, ils (les groupes djihadistes) ont décidé de lever ce blocus, mais à condition que tout camion qui venait de Douentza, Hombori ou Gao n’arrive pas à Boni. C’est cette règle que tout le monde a suivie. Cela a par la suite entrainé une crise alimentaire au niveau de la ville", raconte Nouhoun Cissé sur la DW.

Ecoutez le sujet de Mahamadou Kane, le correspondant à Bamako

"Nous sommes donc sous embargo depuis huit mois, malgré la présence des forces de défense et de sécurité. C’est un message d’alerte que je lance à toutes les bonnes volontés qui veulent nous aider."

Mais selon Alexis Kalembry, journaliste et directeur de publication de Mali Tribunes, la présence de plusieurs groupes armés dans le centre du Mali augure mal d’une levée prochaine du blocus de Boni. 

"Ce qui complique davantage la situation du centre et de Boni, c’est la multiplication des intervenants qui ne parlent souvent peut-être pas le même langage, indique Alexis Kalembry. Dan Na Ambassagou (un groupe d’autodéfense de chasseurs dogons, ndlr) semble connaître des dissensions internes et c’est quelque chose qui joue énormément sur la lutte contre le terrorisme. Mais en tout état de cause, c’est une souffrance de la population et c’est récurrent."

Nous avons contacté Fousseyni Ouattara de la Commission défense du Conseil national de la transition pour évoquer la situation à Boni, mais celui-ci n’a pas souhaité s’exprimer sur la question.

L'espoir en Haïti après la démission du Premier ministre

Les chefs de gangs exigeaient son départ, ils l’ont obtenu. Le Premier ministre haïtien, Ariel Henry, a démissionné lundi (12.03.2024).

Un départ annoncé lors d'une réunion d'urgence des pays de la Communauté des Caraïbes (Caricom) et de représentants de l'ONU.

Ariel Henry jette l’éponge au nom dit-il, de la paix en Haïti.

"Après le Conseil des ministres, il a été convenu de mettre en place un Conseil présidentiel de transition. Une fois choisi, ce conseil gouvernera les différents secteurs de la vie nationale. Haïti veut la paix. Haïti a besoin de stabilité. Haïti a besoin de développement durable. Haïti a besoin de reconstruire des institutions démocratiques. Je demande à tous les Haïtiens de rester calmes et de tout faire pour que la paix et la stabilité reviennent le plus vite possible pour le bien du pays."

Le Premier ministre Ariel Henry à Nairobi le 1er mars 2024
Ariel Henry a fini par démissionner sous la pression de la ruenull Andrew Kasuku/AP Photo/picture alliance

"C'est à nous, Haïtiens, de décider"

Médecin de formation, Ariel Henry s'était emparé du pouvoir en Haïti après l'assassinat en 2021 du président Jovenel Moïse qui l'avait nommé Premier ministre deux jours avant sa mort.

Et au moment où les pays de la Communauté des Caraïbes étaient réunis ce lundi, les gangs réclamaient encore sa tête dans les rues de Port-au-Prince.

"Aujourd'hui, nous profitons de l'occasion pour demander à la communauté internationale de donner une chance à Haïti, parce que dans la situation actuelle, c'est à nous, Haïtiens, de décider qui peut gouverner le pays et quel type de gouvernement nous voulons, et comment nous allons travailler pour sortir le pays de la misère dans laquelle il se trouve" dit Jimmy Chérizier, influent chef de gang surnommé "Barbecue".

Jimmy Chérizier, influent chef de gang surnommé "Barbecue" et ses hommes à Port-au-Prince le 19 septembre 2023
Port-au-Prince est aux mains des gangsnull Ralph Tedy Erol/REUTERS

D'après une déclaration de la Caricom, le Conseil présidentiel qui sera mis en place, devrait compter sept membres représentants des principaux partis politiques, du secteur privé et du groupe Montana, une coalition de la société civile.

Insécurité totale

Port-au-Prince, la capitale haïtienne est depuis des mois, le théâtre d'affrontements entre policiers et bandes armées.  

Des sites stratégiques comme le palais présidentiel, des commissariats et des prisons ont même été prises pour cibles.

Les administrations et écoles de la capitale sont fermées depuis plusieurs jours, et l'aéroport et le port ne fonctionnent plus.

L'accès aux soins est fortement compromis, avec "des hôpitaux qui ont été attaqués par des gangs et qui ont dû évacuer personnel médical et patients, y compris des nouveau-nés, selon l'Organisation internationale pour les migrations.

Pour tenter de restaurer la sécurité, Ariel Henry avait signé début mars un accord à Nairobi pour permettre l'envoi de policiers kényans dans le pays  dans le cadre d’une force internationale de paix à laquelle les Etats-Unis viennent de promettre une contribution supplémentaire de 100 millions de dollars.
 

"Une force conjointe" pour lutter contre le terrorisme au Sahel

Après l'annonce de leur sortie de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest et la création de l'Alliance des Etats du Sahel (AES), le Niger, le Mali et le Burkina Faso poursuivent leur rapprochement. Les trois pays ont en effet décidé de créer une force militaire conjointe. L'objectif : lutter contre le terrorisme djihadiste

"Cela ne va pas mettre fin tout de suite à l'insécurité"

"Un concept opérationnel"

C'est à Niamey, la capitale nigérienne, que les chefs des armées du Mali, du Niger et du Burkina Faso ont annoncé la création d'une  force conjointe anti-djihadiste qui, assurent-ils, sera opérationnelle dans "les plus brefs délais".

Pour le moment, il existe peu de précisions sur les contours et les effectifs de cette force. Mais les trois armées assurent être parvenues "à élaborer un concept opérationnel" et selon le général Moussa Salaou Barmou, chef d'état-major nigérien des armées, les efforts conjugués des trois pays devraient permettre de créer les conditions d'une sécurité partagée.

A Niamey, Falmata Taya, militante du M62, une coalition de groupes de la société civile contre la présence militaire française au Sahel, estime que la création d'une force militaire conjointe au Mali, au Niger et au Burkina Faso était un impératif.

" Les militaires auraient dû commencer dès le départ avec cette force militaire conjointe avant autre chose, parce que tout le monde le sait, ces trois pays ont en commun le terrorisme qu'il faut éradiquer " assure-t-elle.

Au Burkina, Svenja Schulze plaide pour un retour à l'état de droit

Au Mali, la création d'une force commune aux trois pays était une attente des populations, assure pour sa part l'éditorialiste et analyste Alhousseni Alhadji basé à Tombouctou, dans le nord du pays, une zone souvent la cible d'attaques terroristes.

" Ceux qui attaquent les localités du Mali, du Burkina Faso, du Niger, très souvent, vont se cacher dans l'un ou l'autre de ces trois pays" explique-t-il.

Selon Alhousseni Alhadji "si les trois pays parviennent à se mettre ensemble, cela ne va pas mettre fin tout de suite à l'insécurité, mais il y aura quand même des résultats."

Des défis à relever

 Pour atteindre leurs objectifs, notamment en ce qui concerne la lutte contre les groupes djihadistes, le Niger, le Mali et le Burkina Faso, qui ont rompu avec Paris, se sont rapprochés économiquement et militairement de la Russie.

"Il y aura le défi de l'interopérabilité" Seidick Abba

Pour Seidick Abba, spécialiste des questions sécuritaires, la Russie pourrait appuyer les trois armées en fournissant des armements, du renseignement ou encore des formations. C'est d'ailleurs ce qui se déroule déjà au Mali.

Il rappelle toutefois que les défis restent énormes sur le plan financier, mais aussi logistique.

"Compte tenu de la nature très accidentée du terrain, il faut des moyens de mobilité adaptés et il y aura aussi le défi de l'interopérabilité. Ces armées n'ont pas l'habitude de combattre ensemble (…) Si les armées malienne et nigérienne par exemple n'ont pas le même type de matériel de combat, c'est aussi un défi qu'il faudra régler" explique Seidick Abba qui pense toutefois que ces défis devraient pouvoir être relevés.

Après la création de cette force militaire conjointe, certains analystes estiment qu'une prochaine étape pourrait être la sortie du franc CFA et la création d'une monnaie commune, au sein de l'Alliance des Etats du Sahel.

Sixième mois d'horreurs dans le conlit entre Israël et le Hamas

Il y a cinq mois, le 7 octobre, une attaque terroriste conduite par des commandos du Hamas, infiltrés depuis la bande de Gaza, dans le sud d'Israël, coûtait la vie à au moins 1.160 personnes, la plupart des civils. Les Nations unies ont livré, ce lundi (4 mars), un rapport qui conclut que des cas de viols et viols en réunion ont été commis par les auteurs des attaques du 7 octobre.

Cinq mois plus tard, la riposte israélienne dans la bande de Gaza a entraîné plusieurs dizaines de milliers de morts.

La situation humanitaire continue de se dégrader dans la bande de Gaza, qui est assiégée. De nombreux civils sont menacés par la famine. Les espoirs de trêve se sont éloignés avec le départ de la délégation du Hamas de la table des négociations, au Caire. Et ce, à quelques jours seulement du début du ramadan.

Une femme au milieu de portraits de victimes du Hamas et de drapeaux israéliens à Reim (photo du 5 mars 2024)
Dans le kibboutz de Reim, une femme visite l'endroit où des centaines de participants à un festival de musique ont été tués par le Hamas, le 7 octobre dernier null Leo Correa/AP/dpa/picture alliance

Suspension des discussions au Caire

La délégation du Hamas a quitté les discussions au Caire pour des "consultations".

La capitale égyptienne accueille des discussions depuis dimanche dernier, en l'absence de représentant israélien.

Organisées sous l'égide de l'Egypte, du Qatar et des Etats-Unis, l'objectif premier des négociations était d'obtenir une trêve. Le Hamas devait s'engager à libérer des otages israéliens retenus à Gaza depuis le 7 octobre, en échange de l'assurance par Israël qu'il laisserait entrer davantage de camions humanitaires dans le territoire palestinien totalement assiégé par son armée.

Mais les Israéliens ne proposent qu'une trêve de six semaines alors que le Hamas réclame un cessez-le-feu durable.

Catastrophe humanitaire

Um Nihad Abu Kumbaz, une Palestinienne déplacée de Gaza, fait part de son désarroi : "Nous ne voyons ni espoir, ni sécurité, ni quoi que ce soit d'autre", dit-il. "Nous voulons une solution. Chaque jour apporte son lot de martyrs, de fosses communes."

D'après les Nations unies, la plupart des Gazaouis, soit 2,2 millions de personnes, sont menacés de famine.

A son retour de mission, le coordinateur humanitaire de l'Onu, James Mc Goldrick, a témoigné mercredi (6 mars) de l'horreur de la situation qu'il a constatée sur le terrain : les besoins se chiffrent à 300 camions du Programme alimentaire mondial par jour, mais à peine la moitié parvient à rentrer dans la bande de Gaza. Le chargement est alors pris d'assaut par la population affamée.

Des repas largués avec des parachutes sur la bande de Gaza
Des repas sont largués depuis les airs sur la bande de Gazanull Jordanian Armed Force Website/dpa/picture alliance

Ce jeudi, des avions militaires de Jordanie, des Etats-Unis, de la Belgique, de la France et de l'Egypte ont procédé à de nouveaux largages aériens d'aide sur Gaza. 
Plus de 38.000 repas ont ainsi pu être largués depuis les airs. 

"Et comme le ramadan approche, précise James Mc Goldrick, on se rend compte à quel point les gens sont désespérés. Les gens cherchent un moyen de revenir à la normale, à quelque chose de plus stable et de plus certain. Nous espérons que cela se produira dans un avenir proche et que nous obtiendrons une sorte de pause qui nous permettra de stabiliser la santé et la sécurité alimentaire des populations. C'est ce que nous espérons dans les semaines à venir".

Un "retour à la vie normale", c'est effectivement ce dont dit rêver cette autre Palestinienne déplacée, Iman Zakout : "Je n'ai plus de maison. Tous mes enfants sont malades. Hier, je ne me sentais pas bien non plus. Je ne trouve pas les médicaments nécessaires. J'ai dû mendier pour obtenir des médicaments. A cause des mouches, je me suis réveillée pour tout nettoyer et désinfecter."

En empêchant l'acheminement de l'aide pour affamer des civils et en bombardant des zones habitées sans distinction, l'armée israélienne est soupçonnée de violations du droit international.

Des enfants attendent des distributions de nourriture à Rafah (photo du 5 mars 2024)
Des initiatives citoyennes se mettent en place pour aider les civils, comme ici, à Rafahnull Mohammed Abed/AFP

La position de l'Allemagne

L'Allemagne continue de proclamer le droit de l'Etat d'Israël à se défendre contre une agression du Hamas. Mais désormais, Berlin réaffirme la nécessité de ne pas viser les civils.

Udo Bullmann, eurodéputé SPD, s'est rendu au poste-frontière de Rafah, côté égyptien, et en Israël. A son retour, il a accordé une interview à nos confrères de Deutschlandfunk, dans laquelle il déclare :

"Nous devons faire en sorte que la situation humanitaire s'améliore immédiatement. Cela ne sera possible qu'avec un cessez-le-feu. Tout le monde le dit. Y compris, bien sûr, les Nations unies. Mais désormais, les Etats-Unis aussi exigent une trêve pour qu'il n'y ait plus tous ces morts civils. Et il faut aussi une trêve pour enfin libérer les otages [israéliens] qui souffrent depuis le 7 octobre."

Portrait de l'eurodéputé allemand Udo Bullmann (SPD)
L'eurodéputé allemand Udo Bullman préconise de discuter avec les deux parties belligérantesnull Udo Bullmann/Europaparlament

Des combattants du Hamas soupçonnés de viol

En début de semaine, des experts de l'Onu ont affirmé qu'il existait par ailleurs des "motifs raisonnables" de croire que le Hamas a commis des viols, des "tortures à caractère sexuel" et d'autres traitements cruels et inhumains à l'encontre des femmes, lors de son attaque terroriste du 7 octobre contre Israël.

Il existe également des "motifs raisonnables de croire que ces violences se poursuivent", selon Pramila Patten, l'envoyée des Nations unies chargée de la question des violences sexuelles dans les conflits.

Elle s'est rendue en Israël et en Cisjordanie du 29 janvier au 14 février, avec une équipe de neuf personnes pour recueillir des témoignages, notamment auprès d'otages israéliens libérés.

Orit Sulitzeanu, directrice exécutive de l'Association des centres d'aide aux victimes de viol en Israël, affirme que son organisation a été très heureuse de lire le rapport des Nations Unies : "En fait, c'est la première fois qu'un organisme international reconnaît ce qui s'est passé en Israël, déclare-t-elle. Le monde nie en bloc que la violence sexuelle ait été utilisée comme arme de guerre)). Les terroristes du Hamas ont en effet violé. Ils ont violé collectivement et mutilé des femmes et des hommes. C'est la première fois que le monde entier se rend compte que c'est un fait, un fait horrible, horrible".

Parler aux deux parties

Pour l'eurodéputé allemand Udo Bullmann (SPD), durant ces dernières décennies, le conflit israélo-palestinien a rarement été "autant dans l'impasse". Selon lui, les Européens doivent discuter avec les deux parties belligérantes.

"Nous devons utiliser nos moyens de pression en tant que partenaires économiques, suggère l'élu. Nos contrats prévoient que les signataires doivent respecter les droits humains. Les deux parties doivent comprendre que l'Union européenne et l'Allemagne prennent la situation très au sérieux."

Le conflit ouvert dans la bande de Gaza entre aujourd'hui dans son sixième mois.

Les wazalendo sont devenus les alliés de l’armée congolaise

Tout a commencé après l’appel lancé par le président congolais, Félix Tshisekedi, en novembre 2022. Un appel pour que les jeunes femmes et les jeunes hommes organisent des " groupes de vigilance " et soutiennent l’armée congolaise contre le M23

Le 3 septembre 2023, un décret du gouvernement de la RDC légalise ainsi la présence des milices au sein des FARDC, les forces armées congolaises. 

Un grand nombre de milices locales, sur les plus de 120 groupes armés présents dans l’est de la RDC, comme les Maï-Maï et les Nyatura, s'allient alors à l’armée sous la bannière des wazalendo

Fait troublant : selon le rapport des experts de l’Onu, on trouve parmi les wazalendo des éléments des Forces démocratiques de libération du Rwanda, les FDLR-Foca, un groupe armé qui affirme défendre les intérêts des hutus réfugiés en RDC et qui est opposé au président rwandais Paul Kagamé.

Un soldat congolais tenant une arme
Plus de 40 000 nouvelles recrues ont intégré les rangs des forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), selon Kinshasa.null Tom Peyre-Costa/NRC

"La majeure partie de ces groupes, qui se font appeler wazalendo, étaient des groupes armés traqués par les FARDC dans le temps par les opérations Sokola 1 et 2 et qui se sont ralliés à la cause de l'Etat", explique Josaphat Musamba, chercheur en dynamique des groupes armés. 

Celui-ci ajoute que "tous n'ont pas fait l'armée, mais parmi eux, il y en a qui sont des anciens militaires. Certains ont déserté les rangs de l'armée. Mais ce qui est évident, c’est que la majeure partie sont des jeunes qui se sont formés à la culture de combat."

Atouts des wazalendo

Les wazalendo sont d’anciens rebelles qui, devenus utiles pour combattre le M23, notamment en raison de leur connaissance du terrain, se sont convertis en supplétifs de l’armée congolaise

"Le terrain de guerre dans l'est de la RDC n'est pas très facile, ou pas très accessible, dû à des questions de terrain, d'infrastructure, etc… Donc les unités combattantes qui connaissent bien les contrées, ou bien les endroits où elles font des opérations, ont parfois un avantage", affirme Christoph Vogel, cofondateur de l’institut de recherche Ebuteli en RDC.

"Et il est vrai aussi qu’en raison de questions d'arriérés de salaires ou de difficultés socio-économiques au sein de l'armée nationale, on mise justement sur ces wazalendo pour profiter d'une forte motivation intrinsèque dans ces hostilités", conclut Christoph Vogel. 

Les wazalendo espèrent donc gagner en légitimité pour intégrer un jour les FARDC. D’ailleurs plusieurs groupes de ces milices locales ont appelé à voter en faveur de la réélection de Félix Tshisekedi avant le dernier scrutin de décembre 2023.

Mais tous ne pourront pas être intégrés dans l’armée, estime Josaphat Musamba.

"Je doute que les militaires acceptent cela parce que, à l'intérieur, les FARDC qui ont suivi des formations, et qui estiment que les anciens rebelles ne doivent pas rejoindre le rang des FARDC, vont contester. Parfois, il y a des contestations, même s’ils ne le disent pas très ouvertement."

Des manifestants contre le M23 tenant des pancartes hostiles
La guerre contre le M23 a forcé près de 7 millions de Congolais à s’enfuir de leur foyer, provoquant ainsi l’une des plus graves crises de déplacements internes au monde.null GUERCHOM NDEBO/AFP

Le chercheur en dynamique des groupes armés insiste qu'"il y ait surtout une loi qui va réglementer les questions des réserves de l‘armée. Qui devra intégrer l’armée, comment vont-ils faire la sélection, comment est-ce qu'ils vont assurer que tous ceux qui viennent n'ont pas tué, n'ont pas violé… ?" 

Le sort réservé à ceux qui ne pourront pas intégrer les FARDC

Pour Christoph Vogel, le processus de désarmement, démobilisation et réintégration ayant montré ses limites, les wazalendo risquent de devenir un vrai problème, autant pour Kinshasa que pour les civils.

"Globalement, à quelques exceptions près, toutes ces initiatives aussi de démobilisation, réintégration, ont eu beaucoup, beaucoup de problèmes. C'est de là qu'il y a justement ce risque que l'implication et l'encouragement des wazalendo puisse créer une situation où, tout d'un coup, on se retrouve, une fois que les hostilités prendront fin, avec un réservoir, avec beaucoup de gens en armes, dont on ne sait pas exactement quoi faire. Ça représente évidemment un risque énorme pour la population civile", explique le cofondateur de l’institut de recherche Ebuteli en RDC.

Le danger est aussi grand, car certaines parties du mouvement wazalendo se font aussi remarquer par une rhétorique très xénophobe à l’égard des Congolais tutsis ou d’expression kinyarwanda, ajoute Christoph Vogel.

Les wazalendo, une arme à double tranchant, donc, entre les mains de Kinshasa. Ceux-ci sont par ailleurs accusés de contrôler des sites situés dans des zones minières, à Rubaya par exemple, compromettant ainsi la chaîne d’approvisionnement en étain, tantale et tungstène, selon le groupe d’experts de l’Onusur la RDC.

La Transnistrie fait de nouveau parler d'elle

Dans leur déclaration faite mercredi (28.2.2024), les députés de Transnistrie parlent de "menaces sans précédent" venant de Moldavie - pays d'Europe centrale dont la Transnistrie s'est séparée en 1992. Depuis, le territoire russophone et pro-russe est sous forte influence de Moscou, tant militaire qu'économique - mais n'est reconnu par aucun Etat membre des Nations unies, même pas par la Russie. Pourtant, la diplomatie russe a vite fait savoir que "la protection des intérêts des habitants de Transnistrie" était l'une de ses priorités.

Évènements problématiques

Ils rappellent étrangement ceux de février 2022 lorsque, dans l'est de l'Ukraine, des séparatistes prorusses avaient appelé la Russie au secours... Peu de temps après, le président Vladimir Poutine s'était appuyé, entre autres, sur ce prétexte pour envahir le pays.

Le parallélisme des deux situations a vite fait réagir. Première concernée, la Moldavie parle de propagande et affirme qu'il n'y a aucun risque d'escalade. Voisine, l'Ukraine appelle, elle, à une résolution pacifique des questions économiques, sociales et humanitaires entre la Moldavie et la Transnistrie, "sans aucune ingérence extérieure destructrice".

De son côté, Washington a dit soutenir la souveraineté et l'intégrité de la Moldavie. Tandis que pour Paris, la Russie est "très vraisemblablement" derrière les "tentatives de déstabilisation" en Moldavie.

Enfin, du côté de l'Allemagne, on estime que l'objectif de Vladimir Poutine est clair : empêcher la Moldavie de se rapprocher de l'Union européenne. En décembre dernier, Bruxelles a décidé d'ouvrir des négociations d'adhésion avec l'Ukraine et la Moldavie.

Annexion possible ?

Il est trop tôt pour le dire ... le ministre séparatiste des Affaires étrangères, Vitali Ignatiev, a précisé que la demande des députés concernait pour le moment seulement un soutien diplomatique. Par ailleurs, ce n'est pas la première fois que la Transnistrie fait parler d'elle de la sorte.

Mais si Vladimir Poutine décidait de franchir le cap et d'annexer la Transnistrie, ce serait stratégiquement intéressant car cela lui permettrait d'ouvrir un nouveau front à partir de cette région en direction du grand port ukrainien d'Odessa, sur la mer Noire, tout en affaiblissant un peu plus la Moldavie dont le gouvernement actuel est résolument tourné vers l'Europe.

Malgré tout, l'éloignement entre la Transnistrie et la Russie, ainsi que le faible contingent militaire russe basé dans cette enclave, à peine 1.500 hommes, font que la situation est différente de celle de l'Ukraine.

Dans un contexte où la poursuite du soutien à l'effort de guerre ukrainien est en débat au sein de l'Union européenne et aux Etats-Unis, les derniers évènements en Transnistrie ont cependant de quoi inquiéter.

 

RDC : la Monusco a commencé son retrait

"C'est avec un profond honneur et une grande responsabilité que je me tiens devant vous aujourd'hui pour marquer un moment historique : le transfert d'autorité de la base de Kamanyola à la police nationale congolaise. Ce moment symbolise un pas important dans la mise en œuvre du processus de désengagement, et de transition".

Les précisions de Ruth Alonga

C'est par ces mots que le général Diouf Khar, commandant en chef par intérim des forces de la Monusco en RDC a transféré officiellement la base de Kamanyola aux autorités congolaises, mercredi 28 février 2024. La présence des soldats des Nations unies sur place remontait à 2005. Ceux-ci étaient chargés d'assurer la protection des civils et la sécurité des populations de la zone. Cette mission sera désormais gérée par la police nationale congolaise alors que Kinshasa jugeait la mission de l'ONU inefficace.

Ce transfert de responsabilités et d'équipements constitue un des premiers actes du désengagement de la Monusco dans la province du Sud-Kivu.

Un modèle pour les prochaines restitutions

Selon la cheffe de la Monusco, Bintou Keita, cette action pourrait constituer un modèle pour les prochaines restitutions de bases. "Une majorité de la population de Kamanyola ne voit pas forcément ce départ avec appréhension", a-t-elle assuré. Selon Bintou Keita, " la Monusco a en effet souvent été critiquée pour son inaction face aux violences des groupes armés et la population en a fait un bouc émissaire de ses malheurs ".

Satisfaction des habitants... 

Des manifestants devant le siège de la Monusco en 2022 avec de la fumée noire en arrière plan
Manifestation à Goma pour réclamer le retrait de la Monusconull Moses Sawasawa/AP/picture alliance

Les critiques envers la Monusco restent toujours vives. "Que la Monusco s'en aille", glisse un habitant de la région. "Les soldats ne faisaient rien ici. la population continue à mourir pendant qu'ils ne font que sillonner dans leurs véhicules et engins volants". Juste à coté, un autre habitant tient le même discours. "Depuis plusieurs décennies, la Monusco est en RDC, mais jusqu'à présent, il n'y a pas de résultat. Les deux éspèrent que le retrait de la Monusco "va permettre au gouvernement congolais de prendre les choses en main".

...Et inquiétudes aussi

Pour d'autres, le retrait de la Monusco n'est pas une bonne nouvelle."La Monusco s'en va, mais nous en tant que population femme de Kamanyola, quand on connaissait des petits problèmes, la Monusco nous aidait par exemple en cas d'incendie. On avait encore besoin d'eux", insiste ainsi une habitante

La base de Kamanyola couvre un large espace qui s'étend sur une grande partie de la plaine de Ruzizi, sur Katogota, Luvungi, Bwegera et Lemera. Cette zone est en permanence menacée par la présence de groupes armés, dont les Forces nationales de libération, une rébellion burundaise. Kamanyola a été, par le passé, le théâtre de plusieurs atrocités, notamment le massacre d'une trentaine de réfugiés burundais, le 17 septembre 2017.

Série Rwanda : Paul Kagame et le M23 (épisode 05)

Au Rwanda, au lendemain du lancement des commémorations du génocide des tutsis en 1994, le chef de l'Etat, Paul Kagame, a donné une conférence de presse, ce matin, lors de laquelle il s'est exprimé sur divers sujets, y compris sur celui du Mouvement du 23 mars, un groupe rebelle soutenu par Kigali, selon plusieurs rapports des Nations unies.

Et si Paul Kagame ne confirme toujours pas ces accusations, son discours devant la presse semble moins prudent, le discours officiel dénonçant la répression des tutsis en République démocratique du Congo

Le M23, une question qui fâche

Agacé, Paul Kagame l'a sans doute été lorsque la question du soutien rwandais au M23 lui a été une énième fois posée. 

"Ceux qui nous accusent, je leur demanderai : pourquoi ne soutiennent-ils pas le M23 eux-mêmes ?"

"Qui sont les M23 ?" demande le président rwandais. Selon lui, qui, entre les lignes, avalise les revendications des rebelles, ces derniers sont issus d'une communauté tutsi congolaise qui ne s'est jamais sentie en sécurité lors des dernières décennies. 

"Nous avons une centaine de milliers de personnes issues de cette communauté, je dis bien une centaine de milliers, qui vivent ici au Rwanda dans des camps de réfugiés. Pourquoi ? Parce qu'ils ont été déracinés des maisons de leurs ancêtres et persécutés."

Selon le Haut-commissariat pour les réfugiés, 135.000 réfugiés se trouvaient au Rwanda en octobre 2023. 

Franck Habineza sur la même ligne

Bien qu'opposant à Paul Kagame lors de la prochaine élection présidentielle de juillet, Franck Habineza, président du parti Vert démocratique, adhère au discours du chef de l'Etat rwandais.

"Les rebelles du M23 au Congo combattent pour leurs droits. Ils souhaitent avoir un pays où ils pourraient ramener les personnes parlant Kinyarwanda qui ont été persécutées. Beaucoup d'entre eux se trouvent d'ailleurs au Rwanda."

Pour l'homme politique, la RDC aurait dû respecter l'accord d'intégration des membres du Congrès national pour la défense du peuple, signé le 23 mars 2009. Une date qui donnera son nom au groupe que l'on connaît aujourd'hui. 

En attendant, les combats continuent autour de Saké, dernier verrou avant le chef-lieu de la province du Nord-Kivu, Goma, et des rapports établissent la présence sur place des forces de défense rwandaises.

Si des efforts diplomatiques sont fournis, notamment par l'Angola, le conflit a jeté des centaines de milliers de personnes sur la route depuis 2022 et a fait quatre morts, ce lundi, dans les rangs de la SamiRDC, la mission militaire de la Communauté de développement d'Afrique australe. 

Un nouvel enlèvement de masse secoue le Nigeria

L'enlèvement, survenu jeudi (7 mars) dans l'Etat de Kaduna, est le deuxième en une semaine. Ces attaques et enlèvements sont une illustration de plus de l'immense défi sécuritaire auquel sont confrontées les autorités.

Pour le moment, les recherches seraient toujours en cours pour tenter de retrouver les élèves de l'école de Kuriga. Le président nigérian, Bola Ahmed Tinubu, qui a fait de la lutte contre l'insécurité une priorité, a mobilisé les forces de sécurité pour traquer les ravisseurs.

"Tous reviendront à la maison"

 Selon certains témoins, de nombreux élèves ont réussi à s'enfuir au moment de l'attaque quand les assaillants ont tiré en l'air. Il y aurait eu toutefois au moins un mort.

Depuis jeudi, les autorités locales de l'Etat de Kaduna ont confirmé l'attaque et le kidnapping, mais il y a encore une incertitude au sujet du nombre exact d'élèves enlevés. Leur nombre varie entre 200 élèves et 280.

Le gouverneur de l'Etat de Kaduna, Uba Sani, a assuré que tout sera fait pour retrouver les élèves.

"Sous ma direction, aucun enfant ne sera laissé pour compte, tous reviendront à la maison, par la grâce de Dieu. Nous avons également rencontré les parents des enfants qui ont été kidnappés. Nous avons envoyé un message fort aux mères. Et nous leur avons clairement fait comprendre que l'une des responsabilités les plus importantes du gouvernement est de protéger la vie et les biens de nos citoyens", a-t-il affirmé

Un manifestant brandit une affiche demandant la fin de l'insécurité
Les attaques de groupes armés sont réccurents au Nigerianull Kola Sulaimon/AFP/Getty Images

Pour le moment, on dispose de peu d'informations au sujet de l'identité des ravisseurs. Mais des bandes criminelles lourdement armées ciblent régulièrement des villages, des écoles, des églises... à des fins de demande de rançon. Il y a aussi les groupes djihadistes comme Boko Haram.

On se souvient par exemple de l'enlèvement des lycéennes de Chibok dans l'Etat de Borno, en avril 2014, par des combattants de Boko Haram. Plus de 200 filles avaient été enlevées à l'époque, selon la police nigériane.

L'affaire, qui avait suscité une grande indignation, a été à l'origine de la création du mouvement "Bring back our girls" (Ramenez nos filles).Certaines des filles ont été par la suite libérées, mais on est toujours sans nouvelles de beaucoup d'autres.

La protection des écoles, un impératif

Dès l'annonce de l'attaque de Kaduna et l'enlèvement des élèves, les réactions n'ont pas tardé. Amnesty International a appelé par exemple les autorités nigérianes à mieux protéger les écoles.

Des soldats devant une école
Pour beaucoup, la protection des écoles doit être une prioriténull Sunday Alamba/AP Photo/picture alliance

Isa Sanusi est responsable du bureau d'Amnesty Nigeria et il estime que l'Etat nigérian n'a pas tenu ses promesses sur ce point.

Selon lui : "ce qui s'est passé à Chibok et dans d'autres endroits aurait pu servir de leçon (...) aider le gouvernement à mettre en place une protection spéciale pour les écoles. Malheureusement, cela n'a pas été le cas. Il fut un temps où le gouvernement avait lancé un programme pour les écoles, ce qui signifie qu'un plan avait été mis en place pour protéger les écoles. Malheureusement, il semble que ce plan ne fonctionne pas ou n'a même pas été mis en œuvre et c'est pourquoi les écoles sont toujours visées".

Il attire aussi l'attention sur le fait que "les écoles ne sont pas clôturées, n'importe qui peut entrer et sortir à tout moment", selon Isa Sanusi. Ce qui s'est passé montre un manque d'engagement et un manque de dévouement à la protection des enfants et à la protection des droits des enfants à l'éducation."

L'enlèvement des élèves de Kaduna survient quelques jours après le kidnapping de plus de 100 femmes et enfants, la semaine dernière, dans un camp de déplacés dans l'Etat du Borno. Une attaque attribuée à de présumés djihadistes.

"L'approvisionnement en ville de Goma s'est vraiment dégradé"

Alors que, face aux combats, des milliers d'habitants de Sake ont rejoint Goma en République du Congo, que les camps des réfugiés insalubres s'accumulent, la correspondante de la DW dans la ville décrit, ce jeudi 15 février, une situation toujours plus dramatique. Dans lejournal de 17hTU, elle évoque le manque de nourriture, l'inflation et les craintes des habitants sur place.

"L'approvisionnement en ville de Goma s'est vraiment dégradé depuis que la route de desserte agricole Sake-Minova est coupée", raconte Ruth Alonga. "C'était la seule qui restait à la ville de Goma après que l'autre route de desserte Goma-Rutshuru au nord a été aussi coupée en 2022". Notre correspondante raconte qu'ainsi plus de 2 millions d'habitants de la ville de Goma doivent désormais se nourrir avec des denrées venant du Rwanda. "Mais cela semble très insuffisante pour la population locale parce que les produits alimentaires ont carrément doublé de prix et diminué sur le marché". Exemple : une mesure de haricots qui pouvait coûter 4000 francs congolais coûte à présent 8000 à 10.000 francs. "Si la situation perdure, bien sûr, ça va être catastrophique sur le plan approvisionnement", explique notre journaliste.

Trafic normal à la frontière

Les femmes disent "stop" à la guerre dans l'est de la RDC

Concernant la situation à la frontière avec le Rwanda, le trafic est "plus que normal". Du côté du Rwanda, le dispositif militaire a été renforcé de façon impressionnante, avec des chars, avec des militaires présent 24h/24, avec des armes pointées et dirigées vers le Congo. Mais "comme à l'accoutumée, disons que la population s'est déjà habituée à la restriction imposée par le gouvernement de Kinshasa", raconte Ruth Alonga. "Même la population du Rwanda s'est déjà habituée et seulement quelques Congolais affichent une certaine peur en traversant vers les pays voisins".

Beaucoup craignent en revanche de façon démesurée de rencontrer des voisins rwandais. "Parce que pour eux, un Rwandais, c'est le prototype d'un terroriste ou d'un agresseur. Déjà depuis que quelques présumés sujets infiltrés M23 ont été interceptés dans la cité de Sake, la population de la ville de Goma est restée convaincue qu'il y en aurait aussi à Goma. Et cela a créé une paranoïa un peu complexe au sein de la population".

La mobilisation générale reconduite pour un an au Burkina

Au Burkina Faso, le décret de mobilisation générale et de mise en garde a été prolongé. Cette mesure, qui permet d’enrôler, parfois de force, les Burkinabè, devait prendre fin ce jeudi (18.04), mais elle a été reconduite pour une durée d’un an.  

La décision vise, selon les autorités militaires au pouvoir, à "consolider les acquis" de la lutte contre le terrorisme.  

Mais un an après, le constat est plutôt négatif : la mobilisation générale divise l’opinion publique burkinabè, notamment parce qu’elle permet les enrôlements forcés qui ont touché un certain nombre d’opposants politiques.  

A ceci s’ajoute la peur des arrestations et des enlèvements. Certaines familles n’ont plus de nouvelles de leurs proches depuis des mois.  

"Acte patriotique" selon le pouvoir 

Alassane Sawadogo, coordonnateur du Front pour la défense de la patrie, le nom de la junte au pouvoir, évoque au contraire une "décision patriotique" qui permet, selon lui, de transmettre "les visions" du chef de l’Etat, le capitaine Ibrahim Traoré : 

"C’est un acte patriotique que j’apprécie beaucoup. La mobilisation générale a permis au chef de l’Etat et à son gouvernement de pouvoir travailler sans inquiétude. Si vous remarquez, les réquisitions et la suspension des activités politiques et autres, c’est grâce à la mobilisation générale et beaucoup de personnes ont pu y contribuer. Cette mobilisation est une forme de conscientisation du peuple burkinabè, afin d’adhérer aux visions du capitaine Ibrahim Traoré. C’est une nécessité."

Daouda Diallo
Le défenseur des droits humains, Daouda Diallo, avait été enlevé en décembre 2023null Sophie Garcia/AP/picture alliance

Mais pour ce Burkinabè, qui a voulu garder l’anonymat, le décret de mobilisation est perverti par les réquisitions forcées et les arrestations qui l’ont accompagné.  

Selon lui, "les actions qu’ils mènent sur le terrain sont en parfait désaccord avec les termes réels du décret et nous nous posons la question sur l’utilité de ce décret. Des gens ont osé critiquer la mauvaise gestion du pouvoir et ils ont été envoyés au front. C’est pour dire qu’à l’étape actuelle, le décret n’a plus sa raison d’être. L’exécutif prend des textes et fait ce qu’il veut."

Envoyé au front à 70 ans 

L’article 2 du décret, dit de la mobilisation générale et la mise en garde, donne le droit au gouvernement, de "requérir les personnes, les biens et les services (…) à l’emploi de défense, à titre individuel ou collectif". 

Lassané Zoromé, analyste politique, critique pour sa part l’application d’un autre article de ce décret. 

Il dit constater "les irrégularités dans son application par le passé. Au niveau de l’article 5 du décret de la mobilisation, on a dit que sont concernés, par la présente mobilisation générale, les membres des forces de défense et de sécurité, les membres des forces de défense et de sécurité en position non active, les jeunes de 18 ans ou plus, non membres des forces armées nationales, physiquement aptes, appelés à s’enrôler selon les besoins exprimés par les autorités compétentes. Alors, si on fait une interprétation de l’article 5, on se rend compte que ce n’est pas ce qui a été appliqué. On a vu, au nom de ce décret sur la mobilisation générale, des hommes de 70 ans qui ont été réquisitionnés pour aller au front. Ce sont des abus du décret." 

Enfin, l’article 8 de ce décret permet de restreindre, dans certains cas,les libertés publiques. Il confère aussi des possibilités élargies de perquisition à domicile. 

Ces volontaires qui luttent contre le terrorisme au Burkina

Les dernières expériences de Lassané Sawadogo en tant que supplétif de l’armée burkinabè sur le front sont récentes. Dans ses témoignages accordés à la DW, Lassané ne peint pas tout en rose. Il reconnait des efforts dans l’organisation de l’armée mais des difficultés subsistent toujours. 

Lassané Sawadogo est marié et père de sept enfants. C’est en octobre 2023 qu’il s’est enrôlé comme VDP, ou Volontaire pour la défense de la patrie, pour lutter contre les groupes armés terroristes.  

Les Burkinabè débattent des réquisitions forcées

Il dit s’être engagé pour comprendre la réalité sur les champs de combats. De retour du front, Lassané Sawadogo se réserve cependant de parler de la situation qu’il a vécue. "J’ai commencé la lutte avant l’arrivée de ce pouvoir. Notre lutte c’est de ramener l’intégrité du territoire Burkinabé aux Burkinabé et de travailler à prendre en compte les aspirations profondes du peuple Burkinabé", confie-t-il. 

Une armée sous-équipée  

Vêtu de son boubou et de son bonnet, calme et le regard qui en dit long sur sa détermination, Lassané regrette que les régimes précédents n’aient pas suffisamment agi dans l’équipement militaire de l’armée pour faire face aux groupes terroristes. 

Il explique que "nous avons suggéré beaucoup de chose aux régimes passés qui n’ont pas été prises en compte. Dans l’armé burkinabé il y’avait un manque d’équipement militaire, de personnel et d’organisation interne de l’armée. Quand le président Ibrahim Traoré est venu, il a pris toutes ces aspirations en compte. Si je me suis engagé comme VDP, je me suis dit que nous voulons parler des problèmes de l’armée alors que nous n’avons pas les compétences et qu’est ce qui m’empêchait de m’enrôler ? C’est ce qui m’a motivé à le faire."

Ecoutez le témoignage de Lassané Sawadogo...

Mais le constat est que malgré les efforts fournis en armement et moyens mobiles, le Burkina Faso est toujours la cible des groupes armés terroristes. Bien que l’initiative de recruter des supplétifs soit saluée par une majorité de Burkinabé, certains se montrent tout de même critiques.  

Des complicités avec les djihadistes 

Des experts en sécurité s’interrogent toujours sur la moralité et l’engagement réel des enrôlés. Des complicités, oui, il en existe au sein des VDP puisqu’ayant été recrutés sous les régimes passés donc en contact avec certains anciens dignitaires du pouvoir raconte Lassané Sawadogo. 

"Nous avons compris que les réalités du terrain sont contraires à ce qui est dit sur la place publique. Je prends un exemple des attaques que rencontrent nos forces de sécurité en général. Vous savez qu’aucune attaque ne peut se mener sans le renseignement, note-t-il. Que ce soit du côté ennemi et ami, la première des choses c’est d’avoir des informations nécessaires. Cela signifie que ces personnes aussi procèdent aussi de la même manière pour attaquer nos bases. Quand on parle de complicité cela veut dire que des gens ont peut-être communiqué des informations. Quand je suis revenu, j’ai compris qu’on a un travail à faire. C’est-à-dire sensibiliser à ne pas donner la position des forces de sécurité et leurs moyens."

Ibrahim Traore lors d'une visite en Russie
La junte militaire a décidé de prolonger d'un an la "mobilisation générale" pour lutter contre les groupes djihadistesnull Alexey Danichev/AFP

Lassané Sawadogo dénonce aussi une autre pratique de la part de certains chefs militaires. "Figurez-vous que des chefs coupent des primes des VDP. Nous pensons que tout cela est démoralisant. Il y a beaucoup de choses. C’est militaire, on ne peut pas tout dire", assure-t-il. 

Lassané Sawadogo regrette toutefois que de nombreux Burkinabé aient rejoints les mouvements terroristes pour, dit-il, saboter la vision du capitaine Ibrahim Traoré. 

Qui est le groupe terroriste derrière l'attentat en Russie ?

En Russie, l'enquête se poursuit  après l'attentat contre une salle de spectacle vendredi dernier (22.03). Au moins 137 personnes sont mortes, abattues par des terroristes qui sont entrés dans le bâtiment et ont visé des civils avec des armes automatiques. Ils ont ensuite mis le feu au Crocus City Hall, le lieu de l'attaque. Depuis, les autorités russes disent avoir avoir arrêté onze personnes et quatre individus, les assaillants présumés, ont été placés en détention provisoire dans la nuit de dimanche (24.03) à lundi.

Un groupe existant depuis dix ans

Vendredi, très vite, l'attentat a été revendiqué par l'organisation Etat islamique au Khorasan. Cette branche de l'Etat islamique n'est pas la plus connue du groupe. Mais elle est pourtant très active, la plus meurtrière de l'organisation. Son nom se rapporte au nom médiéval de l'Afghanistan qui englobait alors une partie du Turkménistan, de l'Ouzbékistan et du Tadjikistan.

Le groupe est connu depuis son apparition pour la première fois en Afghanistan il y a dix ans, en 2014, fondé par des anciens talibans et membres d'Al-Qaida. Un groupe puissant. "Il compte plusieurs milliers de combattants", raconte à l'agence Reuters, Dan Bymen, chercheur au Centre d'études stratégiques et internationales à Washington. "On pensait qu départ qu'il s'agissait d'un groupe de guérilla qui menait des attaques terroristes occasionnelles, mais qui se concentrait principalement sur l'Afghanistan. Et puis il y a eu des attaques au Pakistan et une attaque de grande envergure en Iran", détaille-t-il encore, faisant référence à l'attentat, en janvier dernier, qui a couté la vie à plus de 90 personnes à Kerman.

Dans un couloir de tribunal, des policiers cagoulés tiennent un homme par les bras, suspecté d'être l'un des auteurs de l'attentat terroriste meurtrier contre le Crocus City Hall
Les quatre assaillants présumés ont été placés en détention provisoire pour deux moisnull Sefa Karacan/Anadolu/picture alliance

L'Europe en ligne de mire

Dans le viseur du groupe aujourd'hui aussi, il y a donc aussi l'Europe. A quelques mois des Jeux Olympiques à Paris, la France vient d'ailleurs, après l'attentat de Moscou, de relever son niveau d'alerte terroriste au plus haut. Justification de Paris : des attentats du groupe Etat islamique au Khorassan ont déjà été déjoués en France et en Allemagne aussi. Pas plus tard que la semaine dernière, la Police allemande avait arrêté deux hommes membres de l'organisation, qui projetaient, depuis l'Allemagne, un attentat en Suède.

Vendredi dernier, c'est donc la Russie qui a été touchée. "La Russie est un ennemi de longue date de la communauté djihadiste au sens large, si l'on remonte à la lutte contre l'Union soviétique en Afghanistan, bien sûr", décrypte Dan Bymen. "Dans les années 1990, la Tchétchénie était probablement le premier foyer de djihad dans le monde. La Russie a aussi soutenu la Syrie pendant la guerre civile, face notamment à l'État islamique."

Ennemi des talibans afghans

Une voiture de police au milieu d'une foule, lors de l'attentat de Kerman, en Iran, en janvier 2024
Le 3 janvier dernier, au moins 91 personnes ont été tuées dans un attentat perpétré à Kerman en Irannull IRAN PRESS/AFP

Le groupe désigné aussi parfois sous le sigle EI-K dans le monde francophone est aussi un ennemi des talibans en Afghanistan, d'où la multiplication des attentats sur place. En 2021, le groupe Etat islamique au Khorassan avait même tué Hamdullah Mokhlis, le chef de la sécurité des talibans à Kaboul.

Ce lundi le Kremlin refuse de commenter la revendication du groupe dans l'attentat à Moscou le 22 mars. "L'enquête est en cours et l'administration présidentielle aurait tort de faire des commentaires sur le déroulement de l'enquête", a dit le porte-parole de Vladimir Poutine. Les recherches dans les décombres du bâtiment où a eu lieu l'attentat se poursuivaient ce lundi.